Comme nous avons pu le constater cet été encore, dans plusieurs régions du monde les conditions météorologiques deviennent de plus en plus extrêmes. Cela fait des années que les scientifiques mettent en garde contre les conséquences du changement climatique, mais selon eux, les dirigeants et les entreprises ne réagissent pas assez rapidement. Selon un nouveau rapport du collectif United in Science, le monde se dirige dans la mauvaise direction et les impacts du changement climatique seront de plus en plus dévastateurs.
Le rapport, publié le 13 septembre, dresse un état des lieux des concentrations de gaz à effet de serre, de l’évolution des températures mondiales et des différents « points de basculement » climatiques. Les conclusions ne sont pas bonnes : les émissions nocives issues des combustibles fossiles continuent d’augmenter et ont déjà dépassé les niveaux pré-pandémiques. Côté températures, les sept dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées.
« Il y a 48% de chances que, pendant au moins une année au cours des cinq prochaines années, la température moyenne annuelle soit temporairement supérieure de 1,5 °C à la moyenne de 1850-1900 », précise le communiqué de l’Organisation météorologique mondiale (OMM). L’écart entre les objectifs climatiques et la réalité est considérable et les experts craignent des conséquences physiques et socio-économiques tragiques. Pour l’OMM, il est désormais urgent d’intensifier les mesures relatives aux systèmes d’alerte précoce pour protéger les populations les plus vulnérables.
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Des mesures insuffisantes pour limiter le réchauffement
Canicules, sécheresse et incendies en Europe, en Chine et aux États-Unis, inondations au Pakistan… Cet été n’était qu’un aperçu des conditions météorologiques qui seront de plus en plus fréquentes, voire habituelles, à l’avenir. « L’ampleur nouvelle de ces catastrophes n’a rien de naturel. Elles sont le prix de la dépendance de l’humanité aux combustibles fossiles », a déclaré le secrétaire général des Nations unies, António Guterres. Selon lui, nous nous dirigeons tout droit vers « des territoires de destruction inexplorés ».
Il est aujourd’hui avéré que les phénomènes météorologiques extrêmes se font plus intenses et plus fréquents à cause des activités humaines et de leur impact sur le climat. Mais malgré les avertissements, malgré les événements climatiques récents, le message ne semble pas encore bien compris et les efforts d’atténuation des émissions sont insuffisants. Les niveaux atmosphériques de dioxyde de carbone, de méthane et d’oxyde nitreux continuent d’augmenter (et ce, malgré une réduction temporaire des émissions de gaz pendant la pandémie de COVID-19). Les données montrent même que les émissions mondiales de CO2 de janvier à mai 2022 sont supérieures de 1,2% à celles enregistrées en 2019 à la même période ! L’invasion de l’Ukraine et la flambée des prix du gaz ont malheureusement poussé certains gouvernements à revenir aux énergies fossiles.
Le rapport souligne que l’ambition des engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2030 doit être quatre fois plus élevée pour limiter le réchauffement à +2 °C et sept fois plus élevée pour être conforme à l’objectif de +1,5 °C fixé par l’Accord de Paris. Les experts précisent à ce propos que cet objectif fait référence à un réchauffement à long terme : considérées isolément, les années au-dessus de 1,5 °C devraient se produire « avec une régularité croissante ».
Les estimations le confirment : la température annuelle moyenne mondiale près de la surface pour chaque année de 2022 à 2026 devrait être supérieure de 1,1 °C à 1,7 °C aux niveaux préindustriels. Maigre consolation : il n’y a qu’une faible probabilité (10 %) que la moyenne quinquennale dépasse le seuil des +1,5 °C. Cette température moyenne sera toutefois très probablement supérieure à la moyenne des cinq années précédentes (2017-2021).
La nécessité de systèmes d’alerte précoce multirisques
Si les gouvernements conservent leurs politiques actuelles en matière d’environnement, les experts prédisent que le réchauffement climatique pour ce 21e siècle sera compris entre 2,3 et 3,3 °C. Les villes — où réside 55% de la population mondiale – en subiront de plein fouet les conséquences : à l’échelle mondiale, d’ici les années 2050, plus de 1,6 milliard de personnes vivant dans plus de 970 villes seront régulièrement exposées à des températures moyennes sur 3 mois atteignant au moins 35 °C, prédit le rapport.
C’est ce qu’ont subi l’Inde et le Pakistan cette année, entre mars et mai. Dans certaines villes, la température a atteint ou frôlé les 50 °C. Cette vague de chaleur exceptionnellement intense et précoce a causé la mort de 90 personnes et provoqué des coupures d’électricité et des pénuries d’eau pour des millions d’habitants. Depuis 2010, les vagues de chaleur ont tué plus de 6500 personnes en Inde, rapporte France Info. La Chine a elle aussi connu une canicule durable au cours de l’été, qui n’a pas été sans conséquences. La différence étant qu’en Inde, une grande partie de la population vit dans des quartiers à faible revenu et est de ce fait encore plus vulnérable aux températures extrêmes.
Les villes côtières sont particulièrement menacées par le changement climatique : elles devront faire face à des inondations de plus en plus fréquentes et étendues, de par l’élévation du niveau de la mer. « Les villes ont un rôle important à jouer dans la lutte contre le changement climatique en mettant en œuvre des mesures d’atténuation inclusives, urgentes et renforcées et en augmentant la capacité d’adaptation de milliards d’habitants », résume le rapport.
Les points de basculement climatiques sont aujourd’hui sous haute surveillance, chacun pouvant entraîner des conséquences dramatiques au niveau mondial. La fonte des calottes polaires et l’assèchement de la forêt amazonienne en particulier sont très préoccupants, en raison des répercussions mondiales en cascade que ces phénomènes entraînent. Le nombre de catastrophes liées au temps, au climat et à l’eau a été multiplié par cinq au cours des 50 dernières années, causant chaque jour 202 millions de dollars de pertes.
Faute de réussir à atténuer les émissions de gaz à effet de serre, il faudra nécessairement s’adapter au changement climatique et aux événements extrêmes qu’il provoquera. Les spécialistes somment aujourd’hui les dirigeants du monde entier à mettre en place des systèmes d’alerte précoce multirisques, qui permettent de sauver des vies et de limiter les dégâts matériels. Il s’avère que moins de la moitié des pays du monde en sont équipés : l’Afrique, les petits États insulaires et les pays en développement ne disposent généralement pas de ces systèmes.
« L’une des principales priorités internationales est de faire en sorte que chaque habitant de la planète soit protégé », soulignent les experts. Une aide financière substantielle des pays les plus riches — responsables de la plupart des émissions de CO2 — est vivement souhaitée et attendue pour soutenir les pays en développement les plus vulnérables. La COP27, qui se tiendra en novembre en Égypte, sera l’occasion de définir de nouveaux plans d’action pour faire face à cette urgence climatique.