Le 30 septembre, après beaucoup de battage médiatique, le robot Optimus développé par Tesla a fait une entrée remarquée sur scène lors d’un événement organisé par la société. Si la foule semblait enthousiaste, le robot n’était pas vraiment à la hauteur des capacités annoncées par Elon Musk quelques mois auparavant… Le PDG a déclaré qu’il était néanmoins capable de réaliser bien plus de choses que ce que le public a pu voir en direct.
Optimus, qui repose sur l’IA que Tesla utilise dans ses véhicules autonomes (Full Self-Driving), est entré sur scène lentement et plutôt maladroitement, puis a salué la foule. Mais il s’est avéré finalement assez décevant par rapport à la vision d’Elon Musk du robot humanoïde, présentée l’an dernier. Le public assistant à cet événement dédié à l’intelligence artificielle a également pu avoir un aperçu de la prochaine génération d’Optimus : le prototype a été amené sur la scène… porté par trois personnes. Le PDG de Tesla s’est justifié en précisant que son robot était si fragile qu’il ne voulait pas risquer qu’il tombe.
La démonstration n’a donc pas eu l’effet escompté et a déçu bon nombre d’experts. Filip Piekniewski, chercheur en intelligence artificielle, a tweeté que cette journée Tesla AI était une « arnaque complète et totale » et a ajouté qu’il serait « bien de tester la chute, car cette chose tombera beaucoup ». Cynthia Yeung, experte en robotique, apparaît tout aussi déçue : « J’ai rêvé que j’étais dans une comédie, avec Taika Waititi en tant que chef de produit travaillant sur des robots. Puis je me suis réveillée et je me suis souvenue que j’avais tweeté en direct les 3-4 heures du Tesla AI Day ». En résumé, le robot intelligent de Tesla n’est pas près de révolutionner le secteur de la robotique.
Une démonstration qui soulève un certain scepticisme
« Je tiens à définir certaines attentes en ce qui concerne notre robot Optimus… L’année dernière, c’était juste une personne dans un costume de robot, mais nous avons parcouru un long chemin, et par rapport à cela, il va être très impressionnant », a déclaré Elon Musk avant qu’Optimus n’entre en scène. L’un des ingénieurs a précisé que c’était la première fois que le robot marchait sans attache, ni support.
Mais après plusieurs mois de développement, le robot ne semble pas pour l’instant doté de capacités si exceptionnelles. Les critiques soulignent sa démarche lente et peu assurée (alors qu’il évoluait sur un sol bien plat et sans obstacle). Il n’a en outre fait aucune démonstration en direct. Un aperçu de ses compétences a toutefois été montré dans une vidéo, dans laquelle on voit le robot arroser des plantes, porter une boîte et ramasser une barre de métal.
Bien que l’engin soit doté de mains à cinq doigts, promettant une dextérité proche de celle des humains, les experts en robotique demeurent sceptiques quant à ses capacités futures. Elon Musk avait en effet annoncé que son robot serait conçu pour effectuer des tâches utiles aux humains, comme préparer les repas, ou tondre la pelouse.
« Lorsque vous essayez de développer un robot qui soit à la fois abordable et utile, une forme et une taille humanoïdes ne sont pas nécessairement la meilleure solution », a souligné Tom Ryden, directeur exécutif de Mass Robotics, un incubateur de start-ups à but non lucratif. Honda avait lui aussi développé un robot humanoïde par le passé, baptisé Asimo. Développé en 2000, ce fut le premier robot humanoïde capable de marcher de façon réaliste ; la version la plus améliorée s’est avérée capable de verser un liquide dans un verre. Mais le projet n’a jamais dépassé le stade de la recherche et développement.
Un robot « extrêmement performant » à moins de 20 000 $
Hyundai — actionnaire majoritaire de Boston Dynamics depuis juin 2021 — de même que Ford, qui s’est associé à Agility Robotics, ont tous deux participé à des projets de robots humanoïdes. Mais si ces recherches peuvent potentiellement déboucher sur des machines capables de marcher et de franchir des obstacles, aucun projet n’a pour le moment abouti à « un scénario d’utilisation réelle », note Tom Ryden. Elon Musk a précisé, quant à lui, qu’Optimus sera probablement commercialisé « d’ici trois à cinq ans».
L’objectif de Tesla est de fabriquer un robot « extrêmement performant » en très grande quantité (Musk parle de millions d’unités), à un coût qui pourrait être inférieur à celui d’une voiture (moins de 20 000 $ selon les estimations du PDG).
Le Tesla Bot dernière génération a également été présenté, bien qu’il ne soit pas encore capable de marcher. « Nous avons un robot Optimus avec des actionneurs entièrement conçus par Tesla, un bloc de batteries, un système de contrôle, tout. Il n’était pas tout à fait prêt à marcher, mais nous voulions vous montrer quelque chose d’assez proche de ce qui sera mis en production », a déclaré Musk. En apparence, ce dernier prototype se rapproche effectivement un peu plus du concept présenté par le PDG de Tesla l’an dernier. Il est notamment capable de bouger chacun de ses doigts indépendamment et possède des pouces opposables.
Tesla sera-t-il le premier constructeur à proposer un robot humanoïde réellement utile ? Pour le moment, en termes d’autonomie et de capacités, il n’a pas fait mieux que les projets existants. Il dispose de 28 degrés de liberté et 11 degrés de liberté supplémentaires dans chaque main — qui sont conçues pour porter un sac de 9 kg ; sa batterie de 2,3 kWh lui permet d’être autonome pendant environ une journée complète de travail. « Il reste encore beaucoup de travail à faire pour affiner Optimus et l’améliorer », reconnaît Elon Musk. Ceci dit, l’Optimus a été développé en très peu de temps (huit mois environ) ; il se pourrait donc que Tesla nous surprenne avec un robot réellement « à tout faire » d’ici trois ans.