Le microdosage de substances psychédéliques tel que le LSD — connu pour apporter un certain bien-être et de nombreux bienfaits sur la santé mentale — à des fins médicales gagne en popularité. Cependant, encore très peu d’études scientifiques ont tenté de décrypter les véritables mécanismes neurologiques supposément induits par ces substances, dont les effets ne sont pas encore entièrement vérifiés (de manière scientifique). Certaines études suggèrent même que les prétendus bienfaits ne tiendraient que d’un effet placebo. Une nouvelle étude de l’Université de Chicago a récemment révélé qu’une seule microdose de LSD augmenterait l’activité cérébrale liée à la récompense — qui est réduite chez les personnes souffrant de dépression. Bien que l’étude nécessite encore davantage de recherches pour observer les effets potentiels du LSD sur l’humeur et la cognition, il s’agit peut-être d’une piste prometteuse pour le traitement de la dépression.
Le microdosage de LSD serait bénéfique pour la créativité et le bien-être psychologique en général. Cela consiste notamment à prendre régulièrement (avec un intervalle de quelques jours) des très petites doses de la substance psychédélique, allant d’une dizaine à une vingtaine de microgrammes. En comparaison, les doses utilisées pour les effets hallucinogènes vont jusqu’à 200 microgrammes par prise.
Cependant, il n’existe encore que très peu voire pas de preuves scientifiques indiquant que le microdosage de LSD peut réellement avoir des avantages (à long terme) sur la santé mentale. Certaines recherches précédentes indiquent même que les prétendus effets seraient influencés par les fortes attentes des utilisateurs. Il pourrait dans ce cas s’agir d’un effet placebo.
« Après avoir vu les nombreux reportages médiatiques sur les avantages du microdosage, j’ai senti qu’il y avait un besoin d’études contrôlées », estime Harriet de Wit, professeure à l’Université de Chicago, directrice du Behavioral Pharmacology Laboratory et auteure principale de la nouvelle étude, parue dans la revue Neuropsychopharmacology.
La nouvelle étude cherche notamment à comprendre ce qui se passe exactement au niveau des circuits neuronaux, pendant la prise de microdoses de LSD. Par le biais d’expériences en double aveugle et de comparaisons avec des placebos, cette étude consistait à observer comment la substance modifie la réponse du cerveau face à des stimulus gratifiants (en impliquant le circuit de la récompense).
Des effets independants de la dose ?
Pour l’étude, les chercheurs ont recruté 18 jeunes adultes en bonne santé pour trois séances expérimentales de cinq heures. Lors de chacune des expériences, les volontaires ont reçu soit un placebo, soit 13 et 26 microgrammes de LSD, administrés dans un ordre aléatoire et à intervalles d’au moins sept jours.
Après avoir reçu chaque dose de LSD ou de placebo, les participants ont effectué une tâche « d’attente » par rapport à une incitation monétaire, où les chercheurs enregistraient en parallèle leurs électroencéphalogrammes (ECG). Plus précisément, les participants devaient en quelque sorte répondre spontanément et le plus rapidement possible à des stimulus (sous la forme de questions ou de mises en situation, affichées sur un écran) incluant un gain potentiel de petites sommes d’argent. Après chaque réponse, ils reçoivent des commentaires positifs ou négatifs, selon leur performance.
Par le biais des ECG, les chercheurs ont particulièrement recherché trois modèles d’activité cérébrale. Le premier concerne un effet lié au plaisir, visible lorosqu’on reçoit une récompense et que l’on pense être le reflet de l’encodage des commentaires sur le succès dans l’apprentissage par renforcement. Le deuxième aspect concerne l’effet qui se produit lorsqu’on prend connaissance d’un résultat (potentiel positif tardif), reflétant la réponse aux stimulus émotionnels. Le troisième concerne la réponse aux commentaires que l’on reçoit concernant les performances, que les chercheurs appellent « rétroaction-P3 ».
En comparant les résultats des deux doses de LSD avec le placebo, les chercheurs ont découvert que le LSD augmentait la rétroaction-P3. La dose de 13 microgrammes augmentait l’activité cérébrale concernant la récompense positive et le potentiel positif tardif, lorsque les participants pensaient recevoir une récompense potentielle.
Par ailleurs, les effets induits par le LSD ne seraient pas forcément liés à la dose, car certains seraient plus importants à plus faible dose, et une plus forte dose n’induirait pas forcément d’effets plus importants. De ce fait, même si la substance peut potentiellement débloquer les activités cérébrales liées à la récompense chez les personnes souffrant de dépression, il est encore difficile de définir exactement les bonnes doses qui soient à la fois efficaces et sans risques.
De plus, cette étude ne concerne que 18 sujets en bonne santé, testés sur un intervalle relativement court. Les effets des microdoses de LSD sur un plus large groupe de sujets tests et sur des personnes en mauvaise santé mentale n’ont pas encore été évalués.