L’hydrogène… cet élément chimique présent en abondance sur Terre semble plein de promesses. Nombreux sont ceux qui le perçoivent comme « l’énergie verte du futur ». Les choses ne sont pourtant pas si simples : à commencer par son extraction, qui demande des ressources en eau douce. Des scientifiques ont récemment tenté de résoudre cette problématique en générant de l’hydrogène à partir d’eau de mer non traitée.
Notre planète est recouverte à plus de deux tiers d’océans. Cela fait beaucoup d’eau, certes, mais aussi beaucoup de ressources. Entre autres, l’eau de mer contient de l’hydrogène, un élément chimique qui a de multiples usages. On peut donc dire que les ingénieurs du monde entier ont une fabuleuse réserve de cet hydrogène à disposition… mais les moyens de l’exploiter de façon durable n’existent pas encore vraiment.
En réalité, pour extraire de l’hydrogène avec les dispositifs existants, il faut utiliser de l’eau douce. Une ressource cruciale et limitée, qui manque déjà dans de nombreux territoires. Une équipe composée de chercheurs de différents pays a donc tenté de concevoir un appareil capable d’extraire l’hydrogène non pas de l’eau douce, mais de l’eau salée. « Nous avons divisé l’eau de mer naturelle en oxygène et en hydrogène… Pour produire de l’hydrogène vert par électrolyse, en utilisant un catalyseur non précieux et bon marché dans un électrolyseur commercial », explique l’ingénieur chimiste Shizhang Qiao de l’Université d’Adélaïde en Australie.
Pour bien comprendre le procédé qu’ils ont mis en place, il faut d’abord savoir ce qu’est l’électrolyse. Il s’agit d’une méthode qui permet de provoquer des réactions chimiques grâce à une activation électrique. En l’occurrence, l’électrolyse de l’eau permet de « séparer » les atomes de dihydrogène (H2) et de dioxygène (O2). L’électrolyseur est donc l’appareil dans lequel ce phénomène se produit. L’hydrogène peut être utilisé comme source d’énergie. Toutefois, plusieurs points dans ce procédé posent question d’un point de vue écologique actuellement.
L’électricité utilisée, en premier lieu, qui peut être issue d’énergies fossiles. Admettons que l’on utilise des énergies renouvelables pour ce point. Une des faiblesses des procédés d’électrolyse est qu’ils ne fonctionnent qu’avec de l’eau douce. « Trouver un moyen de réaliser l’électrolyse avec de l’eau de mer pourrait rendre l’avenir de la production d’hydrogène vert beaucoup plus durable », commente Science Alert.
Des ions chlorures perturbateurs
Si l’eau de mer ne fonctionne habituellement pas pour la catalyse, c’est à cause du chlore. Plus exactement des ions chlorures. Ils sont présents naturellement dans l’eau de mer, et érodent les matériaux catalyseurs destinés à entraîner la réaction de production d’hydrogène et de séparation de l’eau. De plus, lors de l’électrolyse, des précipités massifs insolubles se forment également. Ces derniers bloquent les sites de réaction et gênent la production d’hydrogène à grande échelle.
C’est donc sur la façon de gérer ces ions chlorures si gênants que le nouveau prototype conçu par les scientifiques se concentre. Pour les neutraliser, ils ont superposé un acide particulier appelé « acide de Lewis » à une série de catalyseurs communs à base d’oxyde de cobalt. Ils ont ensuite effectué une série de tests. Ils ont ainsi pu observer que les catalyseurs modifiés résistent à l’attaque du chlore et empêchent la formation de tout précipité.
« Il s’agit d’une stratégie générale qui peut être appliquée à différents catalyseurs sans qu’il soit nécessaire de concevoir des catalyseurs et des électrolyseurs spécifiques », écrivent les chercheurs dans leur article, publié dans Nature Energy. Leur méthode est donc prometteuse quant aux applications à venir. Toutefois, comme les scientifiques eux-mêmes le soulignent, ils ne sont ni les premiers, ni les derniers à se frotter à cette épineuse question : « L’électrolyse directe de l’eau de mer sans processus de purification ni additifs chimiques est très attrayante et fait l’objet de recherches depuis environ 40 ans, mais les principaux défis de cette technologie restent l’ingénierie des catalyseurs et la conception des appareils », rappellent-ils.
Leur prototype doit donc encore faire ses preuves à grande échelle. Il faut aussi noter que l’utilisation du cobalt dans l’électrolyse pose question. Il s’agit en effet d’un matériau rare, qui doit être miné, utilisant nécessairement des ressources.