La Nouvelle-Zélande est un paradis pour les oiseaux : l’île abrite 5 espèces endémiques, dont le kiwi. Il y a fort longtemps, l’île était déjà le refuge d’oiseaux géants incapables de voler. Récemment, des paléontologues ont découvert les ossements de deux espèces de manchots inconnues jusqu’ici, qui vivaient il y a 50 millions d’années, et dont l’une pesait en moyenne plus de 150 kg. Le spécimen rapporté ici est ainsi considéré comme le plus grand pingouin découvert à ce jour.
La Nouvelle-Zélande renferme une biodiversité précieuse avec des espèces endémiques. Nombre d’entre elles sont protégées, car menacées d’extinction. Malgré des décennies de travail acharné des défenseurs de l’environnement, près des deux tiers sont plus proches de l’extinction qu’ils ne l’étaient il y a 40 ans, selon une étude de 2020.
Plus particulièrement pour les oiseaux terrestres, incapables de voler, la Nouvelle-Zélande est un refuge, depuis des siècles, par l’absence de prédateurs. Le kiwi est d’ailleurs l’emblème national. Néanmoins, certains oiseaux comme le kākāpō, le kiwi tacheté et le merle noir, ont été déplacés vers des sanctuaires insulaires dans le cadre d’efforts de conservation afin d’empêcher leur extinction. Beaucoup de ces îles sont interdites au grand public, car ces écosystèmes sont fragiles et le risque d’introduction de rats et d’autres ravageurs est trop grand pour autoriser les visiteurs.
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Récemment, des paléontologues de l’Université de Cambridge ont ajouté deux nouvelles espèces de manchots préhistoriques à cette longue liste d’espèces endémiques. L’une des espèces est un mastodonte vivant le long de la côte néo-zélandaise il y a près de 60 millions d’années, il pesait autant qu’un gorille adulte et est désormais le manchot le plus lourd connu à ce jour. L’équipe, dirigée par Daniel Ksepka du Bruce Museum dans le Connecticut, et Alan Tennyson du Museum of New Zealand Te Papa Tongarewa, rapporte leur découverte dans le Journal of Palaeontology.
Des découvertes imposantes
Les fossiles de cette nouvelle espèce, Kumimanu fordycei, ont été trouvés aux côtés de huit autres spécimens à l’intérieur de rochers de la plage de North Otago, sur l’île du sud de la Nouvelle-Zélande. Cinq des spécimens appartenaient à une seconde espèce inédite, Petradyptes stonehousei, un spécimen d’une espèce de manchot géant déjà connue, Kumimanu biceae, et deux autres n’ont pas été identifiés. Les estimations des fossiles placent leur ancienneté entre 59,5 millions et 55,5 millions d’années.
En utilisant des scanners laser pour créer des modèles numériques des os, ainsi que des moulages 3D, l’équipe a pu comparer ces ossements à d’autres espèces fossiles. Pour estimer la taille, ils ont mesuré des centaines d’os de manchots modernes et ont utilisé les dimensions des os des nageoires pour prédire le poids.
Ils ont conclu à partir des plus gros os de nageoires appartenant à l’espèce Kumimanu fordycei que les individus pesaient environ 154 kg. La plus grande espèce vivante aujourd’hui — le manchot empereur — pèse entre 22 et 45 kg. Quant à l’espèce Petradyptes stonehousei, la moyenne était de 50 kg.
Un regard neuf sur l’évolution des manchots
Ces deux espèces nouvellement décrites montrent que les manchots ont atteint des tailles surprenantes au début de leur histoire évolutive, des millions d’années avant qu’ils n’aient affiné leur appareil de locomotion aquatique, à savoir les nageoires. La nouvelle espèce apporte la preuve que ces espèces préhistoriques sont devenues imposantes avant d’affiner leurs nageoires en appendices en forme de pagaie.
De plus, l’équipe a observé que les deux espèces conservaient des caractéristiques primitives telles que des os de nageoires minces et des points d’attache musculaire qui ressemblent à ceux des oiseaux volants, ce qui reste étonnant comparativement à leur taille et poids, les empêchant de voler.
Concernant la grande taille des spécimens, l’auteur principal, le Dr Ksepka, a émis l’hypothèse que cela les rendait plus efficaces dans l’eau froide. En effet, ils pouvaient ainsi mieux conserver leur température corporelle et atteindre des eaux plus profondes pour s’alimenter. Néanmoins, si Kumimanu était puissant, il n’a pas évincé les espèces plus petites, qui occupaient alors d’autres aires de nourrissage, ne pouvant pas atteindre les profondeurs. Mais cela reste une simple hypothèse.
D’ailleurs, le co-auteur de l’étude, le Dr Daniel Thomas de l’Université Massey d’Auckland, déclare dans un communiqué : « Les grands animaux marins à sang chaud qui vivent aujourd’hui peuvent plonger à de grandes profondeurs. Cela soulève des questions quant à savoir si Kumimanu fordycei avait une écologie que les manchots n’ont pas aujourd’hui, en étant capables d’atteindre des eaux plus profondes et de trouver de la nourriture qui n’est pas accessible aux manchots actuels ».
De plus, dans un article du New York Times, les auteurs expliquent que la taille des manchots aurait également permis d’éloigner les prédateurs. Les deux nouvelles espèces vivaient autour de la Nouvelle-Zélande à une époque où peu d’animaux plus gros les auraient dérangés — l’astéroïde qui a anéanti les dinosaures a également tué la plupart des reptiles marins, et les ancêtres des phoques et des baleines vivaient encore sur la terre ferme.
Le Dr Field, conservateur au musée de zoologie de l’Université de Cambridge, conclut : « Kumimanu fordycei aurait été un spectacle tout à fait étonnant sur les plages de Nouvelle-Zélande il y a 57 millions d’années, et la combinaison de sa taille et de la nature incomplète de ses restes fossiles en fait l’un des oiseaux fossiles les plus intrigants jamais découverts ».