Préparez-vous à découvrir les toutes premières images de l’horizon des événements d’un trou noir d’ici peu. L’Event Horizon Telescope va observer l’espace entourant le trou noir supermassif de notre galaxie, Sagittarius A* !
Des astronomes viennent d’ajouter à l’Event Horizon Telescope (EHT) la capacité d’un télescope connecté faisant (virtuellement) la taille de la Terre. Son but est de réaliser quelque chose qui n’a encore jamais été fait auparavant : photographier ce qui se situe juste autour d’un trou noir, son horizon des événements.
L’une des cibles du télescope est Sagittarius A* (Sgr A*), le trou noir supermassif situé au centre de la Voie lactée, avec une masse d’environ 4 millions de Soleils.
Comme il est si massif et (relativement) proche, à une distance de 25’600 années-lumière, c’est le plus grand trou noir visible dans notre ciel. Mais le terme « grand » est ici également relatif : en effet, les estimations actuelles placent la taille du trou noir à 100 unités astronomiques (AU), voire moins. À savoir qu’une UA est la distance moyenne entre la Terre et le Soleil, soit 150 millions de kilomètres. Mais certaines estimations indiquent même que le diamètre de ce trou noir pourrait être plus petit, de l’équivalent de la distance entre Mercure et le Soleil, soit « seulement » 46 millions de kilomètres.
Lorsque les astronomes « voient » des trous noirs, ce qu’ils observent en réalité est la lumière émise par le disque de matière entourant le trou noir, au-delà de l’horizon des événements. Tout ce qui se trouve à l’intérieur de l’horizon des événements à proprement parler est invisible pour nos instruments actuels, car cela marque le point où la lumière même ne peut pas se déplacer assez rapidement pour se libérer de la gravité du trou noir et s’en échapper.
C’est pourquoi les images existantes des divers trous noirs ne sont autre que des réalisations artistiques, et non des photographies réelles. Mais justement, cela devrait bientôt changer !
L’EHT utilise une technique appelée interférométrie à très longue base (ou VLBI), qui nécessite plusieurs télescopes observant un même objet à partir de différents endroits, pour créer des images très détaillées. Plus ces télescopes sont éloignés (entre eux), et les images résultantes seront détaillées.
Lors de cette mission, l’EHT reliera huit radio-télescopes à travers le monde, y compris le grand réseau d’antennes millimétrique/submillimétrique de l’Atacama (ALMA) au Chili, le Caltech Submillimeter Observatory (CSO) à Hawaï, le Grand Télescope Millimétrique (GTM) au Mexique, le South Pole Telescope (SPT) en Antarctique ainsi que d’autres installations en France et en Espagne pour réaliser les clichés les plus précis et détaillés possibles.
Cela permettra aux astronomes d’étudier la structure du disque situé autour du trou noir, de mieux comprendre comment ce dernier se nourrit, et peut-être même de déterminer l’origine des jets de matière qu’il recrache.
Cet immense réseau de télescopes a débuté sa mission le 5 avril dernier et effectuera ses observations jusqu’au vendredi 14 avril, avant de rassembler toutes les données collectées. En plus d’imager Sgr A*, il est prévu que le réseau de télescopes nous renseigne sur un trou noir supermassif plus actif, qui se trouve au sein de Messier 87 (M87), une énorme galaxie elliptique située dans l’amas de la Vierge.
La quantité d’informations qui seront obtenues est si énorme qu’elles ne pourront pas être transférées numériquement. Les données seront physiquement stockées et transportées à l’Institut Max-Planck en Allemagne et à l’Observatoire Haystack au Massachusetts (États-Unis), afin d’être traitées.
Et le traitement risque de prendre du temps. Mais, dans quelques mois, nous seront enfin sûrement en mesure d’obtenir la toute première image de l’horizon des événements d’un trou noir supermassif !