Malgré les avancées considérables en matière d’imagerie spatiale, nous disposons de peu d’images d’Uranus. Après Neptune, les puissants instruments du télescope spatial James Webb se sont tournés vers Uranus. Le résultat des observations est à couper le souffle, révélant la planète dans des détails inédits.
Uranus est une planète atypique du système solaire, en raison de caractéristiques mystérieuses. Par exemple, la géante de glace, septième planète de notre système solaire, est inclinée de 90° par rapport à son orbite (à titre comparatif, l’inclinaison de la Terre sur le plan orbital n’est que de 23° environ). Cette inclinaison entraîne un écart extrême entre les saisons, durant lesquelles ses pôles connaissent de longues années sans ensoleillement et un nombre équivalent d’années constamment ensoleillées. La planète met environ 84 ans à effectuer une révolution autour du Soleil, et actuellement, c’est la fin du printemps pour son pôle Nord, qui entamera l’été en 2028.
Longtemps, les astronomes ont cru que Saturne était la seule planète possédant des anneaux. Cependant, l’amélioration de la résolution de nos télescopes a permis de découvrir plus tard que d’autres planètes du système solaire en sont également pourvues. Uranus en possède 13, dont 11 sont visibles sur les images capturées par James Webb. Il faut savoir que les anneaux d’Uranus sont difficiles à saisir pour la plupart des télescopes, car les roches et poussières sombres qui les composent reflètent peu la lumière du Soleil. Avant James Webb, seule la sonde spatiale Voyager 2 (lors de son passage près de la planète en 1986) et le télescope à haute résolution Keck à Hawaï ont réussi à capturer ses anneaux diffus.
Parmi les 13 anneaux de la planète, 9 sont classés comme principaux, tandis que les 4 autres sont très poussiéreux et diffus. L’anneau zêta, l’un d’entre eux, est le plus proche de la planète et a été découvert par Voyager 2. En revanche, ceux que Webb a photographiés sont si brillants qu’ils semblent fusionner en un seul et grand anneau. Les images ont été capturées en infrarouge et offrent une vue imprenable sur 11 des anneaux.
Des détails inédits
Lorsque Voyager 2 a photographié Uranus, les images montraient la planète sous des tons presque uniformes de bleu et de vert. Grâce aux capteurs infrarouges de James Webb, on peut distinguer beaucoup plus de détails de son atmosphère. La caméra proche infrarouge NIRCam combine notamment les données de deux filtres à 1,4 et 3,0 micromètres, représentés respectivement en bleu et en orange. L’image résultante montre la planète avec une teinte bleue.
Uranus est une géante de glace dont la majeure partie de la masse est composée de fluides denses et glacés (eau, méthane et ammoniac). Au centre de la planète et sous les couches de fluides se trouve un petit noyau rocheux. Cette composition chimique contribuerait au dynamisme de son atmosphère. Lorsque Voyager 2 a approché la planète, c’était l’été au pôle Sud et l’hiver au pôle Nord. Le télescope Webb offre ici des images d’été inédites du pôle Nord, ainsi que d’intenses perturbations atmosphériques.
Sur le côté droit de l’image, on peut apercevoir une zone claire et plus brillante au centre de la calotte polaire. Il s’agit d’une calotte polaire propre à Uranus, car la tache brillante apparaît uniquement lorsque le pôle Nord est exposé à la lumière du soleil. Elle disparaît ensuite progressivement vers l’automne. Au bord de la calotte se dégage aussi une brume brillante semblant s’étendre au-delà de ce bord. Un deuxième nuage très brillant se trouve également vers le centre de la planète (en allant vers la gauche de l’image). Ces nuages sont probablement les manifestations de puissantes tempêtes, qui s’intensifient lors de la saison estivale au pôle Nord.
Par ailleurs, Webb a également transmis une vue panoramique sur les 6 plus brillants des 27 satellites naturels d’Uranus : Puck, Miranda, Ariel, Umbriel, Titania et Obéron. L’image a été capturée en grand-angle avec une exposition de 12 minutes et deux filtres différents. Les 5 dernières de ces lunes, géologiquement jeunes et donc actives, pourraient abriter des océans sous leur surface. Les scientifiques estiment que ces océans pourraient abriter la vie. Le projet « Moons of Uranus », qui est en cours, fournira peut-être bientôt des indices.
Prochainement, les chercheurs espèrent obtenir les images des 2 anneaux qui n’ont pas pu être révélés sur les dernières images, en effectuant quelques ajustements sur le télescope. Les deux anneaux extérieurs, découverts par Hubble en 2007, sont en effet très peu visibles. De plus, « contrairement au survol de Voyager, nous serons en mesure de surveiller son apparence au fil du temps pour voir quel effet son étrange rotation basculée pourrait avoir sur ses conditions météorologiques », suggère Michael Merrifield, un chercheur de l’Université de Nottingham (Royaume-Uni).