Sam Altman, le PDG d’OpenAI, semble s’inquiéter des problèmes d’authentification liés au développement de l’IA. Pour contrer la menace, il a lancé un projet crypto révolutionnaire, baptisé Worldcoin, sécurisé par une authentification biométrique : il repose sur un système d’identification par reconnaissance de l’iris. Après avoir scanné son œil, chaque utilisateur pourra s’identifier à partir d’une application, nommée World App, pour accéder à son portefeuille numérique.
« Mettre l’identité numérique et la finance mondiale à la portée de tous », c’est l’objectif annoncé par le site du projet. Fondé en 2019 et rendu public en 2021, Worldcoin vise à créer une cryptomonnaie détenue collectivement et partagée à l’échelle mondiale ; le projet se distingue par son système d’identités numériques, qui repose sur le scan de l’œil des utilisateurs. L’avantage ? Ces derniers peuvent se connecter aux applications de l’écosystème Worldcoin sans avoir à dévoiler leur identité ou tout autre donnée personnelle. C’est également un atout en termes de sécurisation des transactions.
Pour favoriser l’adoption et l’utilisation de cette nouvelle
cryptomonnaie, la plateforme récompense ses utilisateurs avec des
jetons — plus on l’utilise, plus on cumule de jetons.
Le projet Worldcoin a déjà réussi à lever 100 millions de dollars.
La start-up est actuellement en discussion avec d’autres
investisseurs pour tenter de lever 100 millions de dollars
supplémentaires. Alors que le marché des cryptomonnaies
est lui aussi largement impacté par la crise économique — de
surcroît depuis la faillite de FTX en novembre 2022 – les experts
de la finance s’étonnent que des investisseurs misent sur ce
nouveau cheval.
Un scan de l’iris en échange de 25 worldcoins
Conçue par Tools for Humanity, l’application World App, lancée il y a quelques jours dans plus de 80 pays, constitue le premier portefeuille de l’écosystème Worldcoin. Seule une poignée de cryptomonnaies est prise en charge pour le moment (WETH, WBTC, DAI, USDC et Beta WLD). « Au fil du temps, elle évoluera pour devenir une boîte à outils permettant aux individus de s’autonomiser à l’ère de l’IA, en permettant l’utilisation de la preuve de la personnalité, la distribution mondiale équitable des monnaies numériques et, en fin de compte, une voie vers l’Universal Basic Income financée par l’IA », annonce le site du projet.
La « preuve de personnalité » évoquée ici permet d’établir l’humanité et l’unicité d’un individu. En d’autres termes, elle permet de différencier du contenu en ligne généré par un être humain du contenu généré par une IA — une préoccupation croissante à mesure que progresse les IA génératives. Dans ce but, le projet Worldcoin propose un protocole d’identité décentralisé baptisé World ID, une forme de passeport numérique qui permet à une personne de prouver qu’elle est unique et réelle tout en restant anonyme.
La preuve de personnalité est obtenue via un « Orb », un dispositif d’imagerie biométrique permettant de scanner l’iris d’une personne ; l’image est ensuite convertie en une « chaîne impénétrable de nombres », que Worldcoin nomme un « IrisCode ». Toutes les données collectées par l’appareil sont pour le moment stockées sur le réseau Polygon, mais la société prévoit une migration vers Optimism.
Worldcoin précise que la preuve de la personnalité offre certains avantages et encore plus de fonctionnalités. Pour commencer, chaque fois qu’une personne est scannée, vérifiée et intégrée au système, elle reçoit 25 worldcoins. Par la suite, les utilisateurs disposant d’un IrisCode peuvent profiter de transactions sans frais, et en toute sécurité, vers d’autres utilisateurs vérifiés, d’un accès à des cours pour apprendre à gagner de l’argent et d’une assistance prioritaire par chat 24/7. Ce même identifiant permettra d’accéder à toutes les futures applications de la plateforme.
Un projet ambitieux, qui ne fait pas encore l’unanimité
Bien que le projet n’ait pas encore été lancé sur le marché, Worldcoin est évalué à près de 3 milliards de dollars. Au mois de mars, le magazine Fortune rapportait qu’environ 40 000 personnes se font scanner l’iris chaque semaine pour obtenir leur preuve de personnalité. La société revendique aujourd’hui plus d’1,7 million d’inscriptions et ambitionne de collecter pas moins d’un milliard de scans d’iris d’ici la fin de l’année.
L’approche est séduisante, mais certains demeurent sceptiques et s’interrogent notamment sur la sécurité des données collectées et une potentielle utilisation commerciale de ces dernières. L’authentification biométrique étant un processus unique, il n’y a pas de lien permanent entre les utilisateurs et leurs World ID. Interrogé par TechCrunch sur la possibilité qu’une clé générée par Worldcoin puisse être vendue ou cédée, Alex Blania — CEO et cofondateur de Tools for Humanity — a reconnu qu’« aucun système n’est parfait » et qu’« il ne sera jamais possible de l’empêcher complètement », mais a ajouté que l’usurpation d’identité deviendra très difficile.
Les méthodes de recrutement d’utilisateurs sont également sujettes à controverse : en échange de quelques worldcoins, TFH a convaincu des milliers de personnes issues de pays en développement, comme l’Indonésie ou le Brésil, de se faire scanner l’iris. Or, ces populations sont sans doute moins sensibilisées que d’autres à la confidentialité des données personnelles.
Enfin, la perspective d’un revenu universel financé par l’IA reste peu crédible pour le moment. Comme le souligne TechCrunch, Sam Altman a déjà avancé cette idée dans un tweet il y a plus d’un an. Mais il est difficile de croire que Worldcoin pourrait à lui seul lutter contre les inégalités et assurer un financement suffisant à tout un chacun, notamment sur le long terme. L’idée même du revenu universel — qui consiste en une allocation versée périodiquement par un gouvernement (donc un système centralisé) à ses citoyens — est incompatible avec la propriété collective décentralisée qui caractérise Worldcoin.
En résumé, si Worldcoin veut atteindre ses objectifs et gagner la confiance du plus grand nombre, il devra faire preuve de plus de transparence en matière de protection des données. Même si le projet est soutenu par d’importants investisseurs, il est encore trop tôt pour le considérer comme l’avenir des cryptomonnaies.