En fervente défenseuse du droit à la réparation, la France n’hésite pas à s’en prendre à Apple. L’enseigne s’adonnerait effectivement au modèle commercial d’obsolescence programmée dans la conception de ses produits. De cette pratique résultent des coûts de réparation prohibitifs ainsi qu’un penchant pour le fait de jeter au lieu de réparer.
Il y a seulement quelques années, Apple se voyait verser une amende de 27 millions de dollars à la France. La firme était accusée d’avoir réduit les performances de certains de ses appareils après que les utilisateurs ont effectué une mise à jour. Aujourd’hui, le géant américain est à nouveau pointé du doigt par l’association française Halte à l’Obsolescence Programmée (HOP). L’organisme a déposé plainte fin 2022, ce qui a abouti à l’ouverture d’une enquête officielle le 15 mai dernier. Celle-ci est prise en charge par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
De nombreux utilisateurs ont probablement déjà fait face à certains dysfonctionnements de leur iPhone après avoir remplacé une pièce. Après le remplacement d’un écran d’origine, par exemple, la luminosité diminue anormalement. Une batterie de remplacement non originale pour un iPhone génère une notification presque angoissante mentionnant qu’il est « Impossible de vérifier si cet iPhone possède une batterie Apple d’origine ». De plus, on ne peut plus accéder à des informations importantes concernant la batterie dans le menu du système, sans justifications techniques. De tels désagréments témoignent de la pratique que l’association HOP tente de contrer.
Apple dénoncé pour sérialisation
L’association HOP dénonce principalement la sérialisation pratiquée par le géant Apple. La technique consiste à faire correspondre le numéro de série de chaque composant avec celui de l’iPhone. Par conséquent, le téléphone n’est compatible qu’avec ces pièces. Chez Apple, cette pratique est adoptée depuis l’iPhone 4, mais ne concernait au départ qu’une puce spécifique de la carte mère. Selon Alexander Isaac, PDG du groupe de recherche et de formation The Repair Academy, le phénomène touche de plus en plus de pièces au fil des nouvelles versions d’iPhone. L’appareil photo, les capteurs Face ID et Touche ID, l’écran et la batterie ont maintenant chacun un numéro de série apparié avec celui du téléphone.
À cause de la sérialisation, les clients sont désormais contraints de faire réparer leur téléphone uniquement chez les réparateurs agréés. Ces derniers sont les seuls à être en mesure de réattribuer des numéros de série pour que le téléphone retrouve son fonctionnement normal. L’association HOP rappelle pourtant la loi selon laquelle « les fabricants doivent permettre aux consommateurs de réparer leur appareil sans discrimination à l’égard des réparateurs ».
Des coûts de réparation élevés et des conséquences environnementales
Monopolisant le marché de la réparation, Apple se permet de fixer des prix exorbitants. Selon les estimations de The Repair, les coûts pourraient aller jusqu’à deux fois ceux des techniciens non agréés. D’autres rapportent que la réparation équivaudrait à un tiers du prix d’un téléphone. De telles différences poussent les utilisateurs à jeter au lieu de réparer, un geste allant totalement à l’encontre de la valeur écologique revendiquée par le géant de la Silicon Valley. La firme veut effectivement refléter une image « verte » à travers son investissement dans le photovoltaïque, ou encore sa démarche d’utilisation d’aluminium recyclé pour ses MacBooks.
Il faut savoir que l’année dernière, environ 5,3 milliards de téléphones s’étaient retrouvés à la poubelle, évidemment au détriment de l’environnement. D’après Isaac de The Repair Academy, Apple ne fait que contribuer à ce fléau en rendant ses téléphones difficiles à réparer. C’est pour cela qu’au-delà d’une amende, HOP espère qu’à l’issue de la procédure, l’enseigne apprenne l’importance de démocratiser la réparation de ses produits.