L’étude des impacts d’astéroïdes offre des indices précieux sur l’évolution géologique de la Terre. Des chercheurs ont récemment identifié, en Australie du Sud-Est, une structure souterraine qui pourrait être la trace du plus grand impact d’astéroïde connu. Nommée structure multi-anneaux de Deniliquin, elle suggère un événement d’une ampleur sans précédent. Sa découverte pourrait nous aider à mieux comprendre les conséquences géologiques des impacts et leur rôle historique sur notre planète.
Les astéroïdes ont joué un rôle crucial dans la formation et l’évolution de la Terre. Durant des milliards d’années, leurs impacts ont façonné la géologie, influencé le climat et même provoqué des extinctions massives. Ces événements cataclysmiques ont laissé des empreintes indélébiles, mais souvent cachées sous des couches de roches ou des océans. De plus, ces dernières peuvent s’éroder, rendant difficile leur identification.
Au cœur de l’Australie du Sud-Est, une gigantesque structure enfouie vient d’être dévoilée. Son étude, menée par des experts de l’UNSW (Université de Nouvelle-Galles du Sud, à Sydney), met en lumière ce qui pourrait être la plus grande structure d’impact d’astéroïde jamais découverte. Au-delà de sa taille impressionnante, elle offre une perspective inédite sur les conséquences géologiques des impacts et leur rôle dans l’évolution de notre planète. L’étude est publiée dans la revue Tectonophysics.
Des éléments géophysiques révélateurs
La structure multi-anneaux de Deniliquin est un trésor géophysique. Elle s’étend jusqu’à 520 kilomètres de diamètre. À titre de comparaison, la structure d’impact de Vredefort (Afrique du Sud), considérée comme la plus grande du monde, s’étend sur près de 300 km. Deniliquin se distingue par ses motifs magnétiques à anneaux multiples, qui sont des variations concentriques de l’intensité magnétique de la région.
Au cœur de cette structure se trouve une zone magnétique centrale silencieuse, une région où les champs magnétiques sont remarquablement faibles ou absents. Elle correspond à une déformation de 30 km de profondeur au-dessus d’un dôme mantellique défini sismiquement. Le sommet de ce dôme est environ 10 km moins profond que le sommet du manteau.
En complément de ces motifs magnétiques, le cratère présente des motifs gravitaires circulaires de Bouguer. Ces motifs mettent en évidence des variations de la gravité à la surface de la Terre, souvent utilisées pour identifier des structures souterraines ou des variations de densité dans la croûte terrestre.
Les mesures magnétiques montrent également des preuves de « failles radiales » : des fractures qui rayonnent à partir du centre d’une grande structure d’impact. Cela s’accompagne en outre de petites anomalies magnétiques qui peuvent représenter des « digues » ignées, qui sont des feuilles de magma injectées dans des fractures au sein d’un corps rocheux préexistant.
Les auteurs soulignent également dans un article qu’ils ont publié dans The Conversation que la taille de cette structure est tout simplement stupéfiante. Avec un rayon d’environ 260 km, elle s’étend sur une vaste zone, témoignant de l’ampleur de l’événement qui a pu la créer. Cette dimension la place parmi les plus grandes structures géophysiques de ce type découvertes à ce jour.
Des indices d’un impact ancien
La caractéristique de Deniliquin, malgré sa position profondément enfouie sous la surface, révèle des indices intrigants d’un événement passé. Lorsque les chercheurs ont effectué des forages dans cette région, ils ont découvert des lamelles de Boehm. Ces formations, qui sont des minces couches ou inclusions dans des minéraux, peuvent être indicatives de processus géologiques spécifiques.
Cependant, ce qui est particulièrement intéressant, c’est l’absence de textures métamorphiques de choc dans les échantillons prélevés. Ces textures sont généralement associées à des impacts d’astéroïdes et sont le résultat de pressions et de températures extrêmes. Leur absence pourrait suggérer que l’impact n’était pas aussi violent que ceux qui engendrent habituellement de telles textures, ou que les conditions spécifiques de cette région ont empêché leur formation.
Néanmoins, d’autres éléments pointent vers un impact d’astéroïde. La structure à anneaux multiples est atypique et ne correspond pas aux formations géologiques régionales environnantes. De plus, la présence d’une zone magnétique centrale silencieuse est un autre indice fort. Ces caractéristiques, combinées, suggèrent que nous sommes en présence de la zone racinaire, c’est-à-dire la partie la plus profonde, d’une vaste structure d’impact. Cette zone racinaire serait le vestige direct de l’endroit où l’astéroïde a frappé, ayant depuis été recouverte par des couches de roche et de sédiments au fil du temps.
Conséquences géologiques et futurs enjeux de recherche
La mise en lumière de cette potentielle structure d’impact en Australie ouvre une nouvelle page dans le livre de la géologie terrestre. Tout d’abord, elle remet en question notre connaissance actuelle des sites d’impact d’astéroïdes. Si cette structure est confirmée comme étant le résultat d’un impact, elle pourrait bien être l’une des plus grandes jamais découvertes, changeant ainsi notre perspective sur la fréquence et l’ampleur des impacts majeurs dans l’histoire de la Terre.
De plus, cette découverte pourrait servir de point de départ pour de nouvelles recherches. Les scientifiques pourraient être en mesure d’étudier en détail les conséquences d’un tel impact sur l’environnement local et global. Cela inclut les changements climatiques potentiels, les perturbations de l’écosystème, et même les extinctions qui pourraient avoir été déclenchées par l’impact.
Selon les auteurs, celui-ci aurait pu se produire lors de l’événement d’extinction massive de l’Ordovicien supérieur. Ils précisent : « Plus précisément, je pense que cela a peut-être déclenché ce qu’on appelle le stade de glaciation hirnantien, qui a duré entre 445,2 et 443,8 millions d’années, et est également défini comme l’événement d’extinction ordovicien-silurien ». 85% des espèces de la planète ont disparu à cette époque, soit le double de l’impact de Chicxulub, qui a tué les dinosaures.