Des chercheurs de l’Institut de neurologie de l’UCL (université de Londres) et de l’Université d’Oxford ont récemment réalisé une étude explorant le potentiel de l’IA dans le domaine de la psychiatrie. Axée sur l’analyse du langage, la recherche visait plus précisément à déceler des spécificités dans le discours des patients suggérant une schizophrénie. Les résultats sont prometteurs, l’IA ayant permis de déceler des différences (même subtiles) entre les patients non malades et ceux souffrant de schizophrénie.
La médecine est probablement l’un des domaines parmi les plus impactés, à terme, par l’essor de l’IA. En effet, de nouvelles technologies d’IA promettent d’apporter des innovations majeures à la filière : assistance aux opérations, suivi à distance des patients, pré-diagnostic médical gratuit (Jarvis Medical en est un exemple parmi d’autres), systèmes intelligents dans les prothèses et bien d’autres applications.
Dans une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’UCL et d’Oxford, l’IA est utilisée dans le cadre du diagnostic médical de la schizophrénie. Touchant jusqu’à 1% de la population mondiale, cette pathologie psychiatrique se manifeste souvent par des hallucinations, des changements comportementaux et des délires. Les chercheurs se sont ici penchés sur la manière dont un modèle d’IA pourrait analyser le discours des patients afin d’identifier des signes distinctifs de la schizophrénie pour ainsi aboutir à une évaluation plus précise de la maladie.
Un processus assisté par l’IA
52 individus au total ont participé à l’expérience. 26 de ces participants sont atteints de schizophrénie (diagnostic confirmé), tandis que les 26 autres servaient de témoins. Chaque participant a été soumis à un test de fluidité verbale : ils devaient énumérer autant de mots que possible appartenant à la catégorie « animaux » ainsi que des mots commençant par la lettre « p » pendant cinq minutes. L’objectif était d’observer et de comparer la spontanéité et le choix des mots entre les deux groupes.
Dans le cadre de l’expérience, les chercheurs ont utilisé un modèle d’IA préalablement formé sur d’immenses quantités de textes issus du web. Ce dernier avait pour mission d’analyser la prédictibilité des mots choisis par les participants. En d’autres termes, l’équipe voulait savoir si l’IA pouvait anticiper les mots que les participants allaient proposer afin d’évaluer si cette capacité de prédiction était différente entre les deux groupes de personnes.
Les résultats de l’expérience ont révélé que les mots choisis par les patients schizophrènes étaient moins prévisibles pour l’IA par rapport à ceux des personnes non schizophrènes. La différence était plus prononcée chez les patients présentant des symptômes plus graves. Les chercheurs ont interprété cette différence comme étant potentiellement liée à la manière dont le cerveau des patients schizophrènes apprend et stocke les informations dans ce qu’ils appellent des « cartes cognitives ».
L’IA au service d’un diagnostic plus précis
Quelles sont les implications de cette étude ? Avant de répondre à cette question, il convient de rappeler que le diagnostic de certains troubles mentaux est difficile. En effet, contrairement à d’autres maladies, les troubles psychiatriques ne peuvent généralement pas être diagnostiqués à l’aide de tests médicaux simples, comme les analyses sanguines ou l’imagerie cérébrale. Bien que ces tests puissent être utilisés pour obtenir des informations supplémentaires sur l’état de santé général du patient, ils ne jouent qu’un rôle secondaire dans le diagnostic des troubles psychiatriques.
Dans leur processus, les médecins effectuent généralement plusieurs entretiens avec les patients ainsi qu’avec leurs proches. Or, les informations récoltées de la sorte sont parfois subjectives ou biaisées. C’est ici que l’IA entre en jeu, en comblant le manque de précision et peut-être même d’honnêteté de la part du patient. En effet, la présence du thérapeute peut à elle seule biaiser les réponses des patients pour diverses raisons. Une conversation plus neutre avec une IA, plus introspective, pourrait donc dans certains cas (dont celui du diagnostic de la schizophrénie) apporter un bénéfice notable dans le processus.