Ces dernières décennies, l’agriculture et la biologie ont franchi un cap en allant au-delà de l’atmosphère terrestre. Un exploit que l’on croyait autrefois irréalisable. Pourtant, des potagers et des plantes à fleurs poussent désormais dans l’espace, notamment à bord de la Station spatiale internationale. Parallèlement, la biotechnologie a également fait des merveilles permettant de cultiver des extraits améliorés de fruits, à partir de simples cellules végétales. Avec l’avènement du tourisme spatial, Chris Hadfield, célèbre astronaute canadien à la retraite, estime que cette technologie pourrait être utilisée dans l’espace pour ravitailler plus facilement les astronautes. Il a également abordé la possibilité d’y cultiver du cannabis, car les plants « extraterrestres » de cannabis pourraient offrir de larges perspectives dans le domaine médical — cependant, tout en pouvant être utilisées dans un simple but récréatif par les futurs touristes spatiaux.
Réussir à faire pousser des plantes dans l’espace a fait partie des objectifs de recherche de nombreuses missions spatiales. Produire de la nourriture dans l’espace via l’agriculture permettrait notamment de rendre les équipages plus autonomes, en réduisant les ravitaillements depuis la Terre. De plus, cette autonomie permettrait de plus longues missions, telle que celle qui permettra d’envoyer les premiers hommes sur Mars, où les ravitaillements depuis la Terre seraient rares.
Produire des « supercompléments alimentaires »
Bioharvest, une société de biotechnologie où Chris Hadfield est membre du conseil d’administration, se concentre actuellement sur le développement de nutriments améliorés en microgravité. Ces nutriments seraient destinés aux futurs astronautes, qui auront besoin d’apports nutritifs spécifiques (pour se maintenir en bonne performance physique et mentale dans l’espace et une fois de retour sur Terre), surtout si les missions s’allongent et deviennent de plus en plus fréquentes.
Grâce à des bioréacteurs ultraperformants, l’entreprise a en effet réussi à produire un extrait dérivé de cellules de raisin rouge qui préserve les propriétés bénéfiques de la plante d’origine. La capacité de ce supercomplément alimentaire à apporter des avantages cardiovasculaires significatifs a été cliniquement démontrée. « Cela pourrait être une aubaine pour les astronautes, qui doivent être en parfaite condition physique à tout moment pendant leurs voyages dans l’espace », déclare à Futurism Ilan Sobel, PDG de Bioharvest.
En s’associant à la start-up Space Tango, Bioharvest projette d’adapter ses bioréacteurs pour une utilisation à bord de la Station spatiale internationale. « Le gros avantage de faire pousser des cellules dans un milieu de culture est que pour une quantité donnée d’énergie, ou pour une dose donnée de nutriments, c’est plus efficace en termes de masse et de volume », explique Alain Berinstain, PDG de Space Tango. Cette technologie pourrait également contribuer à pallier le problème de pénurie de ressources alimentaires auquel nous ferons peut-être face dans un futur proche.
L’espace, un environnement idéal pour du cannabis de qualité ?
Actuellement, Bioharvest travaille sur une nouvelle façon de cultiver des trichomes de cannabis (les parties contenant les molécules actives de la plante) en laboratoire, par le biais de leurs bioréacteurs. Cette méthode de culture permettrait notamment des économies en eau et autres ressources nécessaires à la plante, par rapport aux cultures terrestres. « Cela reproduit en fait le processus de croissance naturel de la partie qui nous est utile, mais sans la plante entière », explique Hadfield.
L’espace pourrait peut-être ainsi fournir des cannabinoïdes de qualité qui pourront être utilisés dans le domaine médical. D’après les experts, certains de ces cannabinoïdes ne sont retrouvés qu’en petites quantités dans le cannabis cultivé sur Terre. Ces quantités pourraient être beaucoup plus élevées dans les cultures spatiales en microgravité. Produits de façon optimale, ces composants du cannabis à large spectre pourraient potentiellement révolutionner les thérapies à base de cannabinoïdes.
D’un autre côté, la popularité des projets de tourisme spatial ainsi que la baisse considérable des coûts de lancement pourraient probablement l’intégrer dans les activités récréatives. D’après Chris Hadfield, quand ce tourisme futuriste sera devenu plus banal, les gens voudront sûrement se détendre et consommer un peu de cannabis tel un simple cocktail dans un bar.
Néanmoins, il faut quand même garder à l’esprit que faire l’usage de drogues dans l’espace reste un acte très irresponsable. En effet, il est (presque) inutile de rappeler que dans le cadre d’une mission spatiale, aucune dérive ne peut être permise, car en cas d’urgence chaque membre de l’équipage doit pouvoir compter sur autrui tout comme sur soi-même. Les astronautes doivent ainsi être en pleine possession de leurs moyens à tout moment. De plus, le cannabis n’est pas encore autorisé à bord de l’ISS. Mais d’après l’astronaute à la retraite et ancien commandant de l’ISS, l’espace sera un jour assez peuplé pour qu’astronautes et simples voyageurs puissent se permettre de se détendre.