Les modèles galactiques actuels prédisent l’existence d’un trou noir supermassif au centre de chaque galaxie suffisamment grande, et la Voie lactée n’y fait pas exception. Sa région centrale active abrite une source d’émission radio, Sgr A*, et l’équipe de l’Event Horizon Telescope espère bien y capturer l’image du trou noir supermassif qui s’y cache, renouvelant ainsi l’exploit réalisé avec M 87*. Récemment, une équipe d’astrophysiciens a détecté des oscillations quasi cycliques millimétriques en provenance de cette région. Et ce « clignotement » du cœur de la Voie lactée pourrait avoir pour origine le disque d’accrétion du trou noir supermassif qui s’y trouve.
Des astrophysiciens utilisant l’Atacama Large Millimeter/submillimeter Array (ALMA) ont trouvé des oscillations quasi périodiques dans les ondes millimétriques au centre de la Voie lactée, dans la région de Sgr A*. L’équipe a interprété ces oscillations comme étant dues à la rotation de spots radio encerclant le trou noir supermassif avec un rayon d’orbite plus petit que celui de Mercure. L’article a été publié dans la revue Astrophysical Journal Letters.
« On sait que Sgr A* donne parfois lieu à des éruptions en longueur d’onde millimétrique. Cette fois, en utilisant ALMA, nous avons obtenu des données de haute qualité sur la variation de l’intensité des ondes radioélectriques de Sgr A* pendant 10 jours, 70 minutes par jour. Ensuite, nous avons trouvé deux tendances : les variations quasi périodiques avec une échelle de temps typique de 30 minutes et des variations lentes d’une heure », explique Yuhei Iwata, de l’Université Keio, au Japon.
Des oscillations millimétriques de courte durée
Les astrophysiciens supposent qu’un trou noir supermassif d’une masse de 4 millions de soleils est situé au centre de Sgr A*. Des éruptions en provenance de Sgr A* ont été observées non seulement en longueur d’onde millimétrique, mais aussi en lumière infrarouge et dans les rayons X. Cependant, les variations détectées avec ALMA sont beaucoup plus petites que celles précédemment détectées.
L’équipe s’est concentrée sur les variations de courte durée et a constaté que la période de variation de 30 minutes est comparable à la période orbitale du bord le plus intérieur du disque d’accrétion du trou noir avec un rayon de 0.2 unité astronomique. À titre de comparaison, Mercure, la planète la plus interne du Système solaire, tourne autour du Soleil à une distance de 0.4 unité astronomique. Compte tenu de la masse colossale au centre du trou noir, son effet gravitationnel est également extrême dans le disque d’accrétion.
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Un phénomène prenant place dans le disque d’accrétion du trou noir ?
« Cette émission pourrait être liée à certains phénomènes exotiques se produisant au voisinage même du trou noir supermassif », explique Tomoharu Oka, professeur à l’Université de Keio. Leur scénario est le suivant : des points chauds se forment sporadiquement dans le disque et tournent autour du trou noir, émettant de fortes ondes millimétriques. Selon la théorie de la relativité restreinte d’Einstein, l’émission est largement amplifiée lorsque la source se déplace vers l’observateur à une vitesse comparable à celle de la lumière.
La vitesse de rotation du bord intérieur du disque d’accrétion est assez grande, donc cet effet extraordinaire se produit. Les astronomes pensent que ce phénomène est à l’origine de la variation à court terme de l’émission millimétrique de Sgr A*. L’équipe suggère que cette variation pourrait affecter la prise d’une future image du trou noir supermassif avec le télescope Event Horizon.
« En général, plus le mouvement est rapide, plus il est difficile de prendre une photo de l’objet. Au lieu de cela, la variation de l’émission elle-même fournit un aperçu convaincant du mouvement du gaz. Nous pouvons assister au moment même de l’absorption de gaz par le trou noir avec une campagne de surveillance à long terme avec ALMA », conclut Oka.