Le dernier ancêtre commun universel est apparu bien avant qu’on le pensait, révèle une étude

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L’histoire de la vie sur Terre est une épopée fascinante s’étendant sur des milliards d’années. Une étude récemment publiée dans la revue Nature révèle que le dernier ancêtre commun universel (à toutes les formes de vie), LUCA (pour Last Universal Common Ancestor), aurait émergé bien plus tôt qu’on ne le pensait jusqu’ici, remettant en question les chronologies établies de l’évolution de la vie.

Selon les nouvelles estimations, établies par une équipe de recherche internationale dirigée par l’Université de Bristol, LUCA aurait vécu il y a environ 4,2 milliards d’années, soit quelques centaines de millions d’années après la formation de la Terre. Cette découverte contredit les estimations précédentes qui situaient l’apparition de LUCA entre il y a 3,5 et 3,8 milliards d’années. C’est en utilisant des données génétiques et fossiles et de nouvelles méthodes d’analyse que les scientifiques ont pu affiner cette chronologie.

LUCA : un microbe au cœur de l’évolution

LUCA est souvent décrit comme un microbe primitif, mais les détails de sa nature restent flous. « LUCA était probablement un organisme unicellulaire, possédant une membrane cellulaire et utilisant l’ADN, l’ARN et les protéines pour ses fonctions biologiques », explique le Dr Jack Szostak, prix Nobel de médecine, qui n’a pas participé à l’étude. Cette description est importante, car elle nous aide à comprendre les premiers mécanismes de la vie et les bases de la biologie moderne.

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Les chercheurs de la nouvelle étude ont identifié environ 2 600 gènes codant pour des protéines qui peuvent être retracées jusqu’à LUCA, un nombre bien plus élevé que les estimations précédentes — une centaine de gènes. Ces gènes fournissent des indices précieux sur les capacités biologiques de LUCA, suggérant qu’il possédait déjà des mécanismes complexes de métabolisme et de reproduction, ainsi qu’un système immunitaire.

« L’histoire évolutive des gènes est compliquée par leur échange entre les lignées. Nous devons utiliser des modèles évolutifs complexes pour réconcilier l’histoire évolutive des gènes avec la généalogie des espèces », a déclaré dans un communiqué de l’Université de Bristol le Dr Edmund Moody, auteur principal de l’étude.

Les conditions de vie sur Terre à l’époque de LUCA étaient extrêmes. Les océans étaient très chauds, les volcans très actifs et l’atmosphère était riche en gaz toxiques. Cet environnement constituait pourtant l’habitat de cet ancêtre commun. Ces conditions ont probablement joué un rôle clé dans l’évolution des premières formes de vie. Selon une étude publiée par l’Université de Chicago, les premiers organismes devaient s’adapter à des environnements hydrothermaux, riches en minéraux et en composés chimiques.

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De l’eau riche en minéraux émergeant d’une cheminée hydrothermale du volcan sous-marin Niua, situé dans le bassin de Lau dans le sud-ouest de l’océan Pacifique. Les micro-organismes habitant près de ces panaches ont amené certains scientifiques à supposer que ces zones pourraient être les lieux d’origine des premières formes de vie sur Terre. © U.S. Geological Survey/Schmidt Ocean Institute Virtual Vents

Une plongée au cœur des gènes du dernier ancêtre commun universel

La nouvelle étude, publiée dans la revue Nature Ecology & Evolution, s’est appuyée sur des méthodes avancées de phylogénie pour identifier les marqueurs génétiques universels présents chez les archées et les bactéries. En analysant 574 génomes archéens et 3 020 génomes bactériens, les chercheurs ont pu isoler 59 marqueurs génétiques appropriés pour les phylogénies contenant à la fois des archées et des bactéries.

Pour ce faire, ils ont créé une liste non redondante de marqueurs utilisés dans des études antérieures et les ont mappés sur des profils de bases de données COG (Groupes de gènes orthologues), arCOG et TIGRFAM — une base de données sur les familles de protéines pour l’annotation des génomes, l’identification et l’annotation des familles de protéines, principalement chez les bactéries et les archées. Les protéines correspondantes ont été extraites et analysées pour vérifier leur présence dans les génomes des archées et des bactéries.

« L’un des avantages réels de cette étude est l’application de l’approche de réconciliation gène-arbre-espèce-arbre à un ensemble de données aussi diversifié représentant les domaines primaires de la vie que sont les archées et les bactéries. Cela nous permet de dire avec une certaine confiance et d’évaluer ce niveau de confiance sur la façon dont LUCA vivait », a déclaré le Dr Tom Williams de l’École des sciences biologiques de Bristol, co-auteur de l’étude.

Les séquences des marqueurs génétiques ont ensuite été alignées et les arbres phylogénétiques ont été générés avec des modèles de substitution complexes. Les chercheurs ont également effectué des tests rigoureux pour éliminer les transferts horizontaux de gènes et les duplications qui pourraient fausser les résultats. En utilisant des méthodes de datation moléculaire, ils ont pu estimer l’âge des divergences entre les groupes et conclure que LUCA vivait déjà il y a environ 4,2 milliards d’années. Ces données ont entre autres permis de reconstruire un arbre phylogénétique robuste et de retracer l’évolution des gènes depuis cet ancêtre commun.

Une réécriture de l’histoire de la vie

Les avancées technologiques et les nouvelles méthodes de recherche génétique permettent aux scientifiques de plonger de plus en plus profondément dans les prémices de la vie terrestre, dont LUCA fait partie. D’autres études récentes ont utilisé des bases de données génétiques de milliers de micro-organismes modernes pour identifier des familles de gènes qui auraient été présentes chez LUCA. Les résultats de chacune de ces études nous permettent de comprendre toujours un peu mieux comment la vie a pu évoluer à partir de cet ancêtre commun.

« Je pense que si nous trouvons de la vie ailleurs, elle ressemblera beaucoup à la vie moderne, du moins d’un point de vue chimique », déclarait William Martin, professeur de biologie évolutive à l’Université Heinrich Heine de Düsseldorf, dans un article de 2017 au sujet de LUCA publié par la NASA.

Ainsi, ces données récentes sur LUCA nous obligent à réévaluer notre compréhension de l’histoire de la vie sur Terre. Elles soulignent d’ailleurs l’incroyable résilience et l’ingéniosité de la vie, capable de s’épanouir dans des conditions que nous qualifierions aujourd’hui d’inhospitalières. Ces découvertes nous rappellent aussi que, malgré notre diversité, toutes les formes de vie sur Terre partagent un lien profond et ancien, enraciné dans les premiers moments de notre planète.

Source : Nature

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