En seulement 35 ans, l’Antarctique gagne une inquiétante couverture végétale

L Antarctique se recouvre de plus en plus de végétation en 35 ans
| Michala Garrison
⇧ [VIDÉO]   Vous pourriez aussi aimer ce contenu partenaire

L’Antarctique, parfois surnommé le continent blanc, est recouvert à 98 % d’une couche de glace épaisse. Durant la période de l’été austral, la banquise et la calotte glaciaire fondent, laissant place à des mousses et des lichens qui recouvrent les rochers. Pendant cette période, le paysage se transforme et une nuance verdoyante vient se mélanger au blanc de l’Antarctique. Récemment, dans une nouvelle étude, des chercheurs, en analysant les données satellites de la NASA, ont constaté que la zone occupée par les plantes s’est étendue à un rythme inquiétant en l’espace de 35 ans. Le réchauffement climatique pourrait bien être la cause de ce changement.

Récemment, une équipe de recherche a compilé 35 années de données satellites afin d’étudier le paysage blanc de l’Antarctique, qui devient de plus en plus vert. L’étude, codirigée par Thomas Roland de l’Université d’Exeter et Olly Bartlett, expert en télédétection de l’Université de Hertfordshire, s’est penchée spécifiquement sur les données des satellites Landsat 5 à Landsat 8. « Cette étude visait à évaluer la réponse de la végétation au changement climatique dans la péninsule Antarctique au cours des 35 dernières années, en quantifiant les taux de changement dans l’étendue spatiale et la ‘direction’ (verdissement versus brunissement), qui n’ont pas encore été quantifiés », ont écrit les chercheurs.

Selon les résultats, publiés dans la revue Nature Geoscience, la quantité de végétation poussant au niveau de la pointe septentrionale de l’Antarctique a été multipliée par 14 au cours de ces 35 dernières années. D’après les chiffres avancés, entre 1986 et 2021, les zones de végétation sont passées de 0,86 km² à 11,95 km². Une accélération récente a également été constatée entre 2016 et 2021 avec une progression de 0,424 km²/an contre 0,317 km²/an sur l’ensemble de la période étudiée. Roland et ses collaborateurs avancent que cette accélération est probablement due à la diminution de la couche de glace, provoquée par le réchauffement climatique. En effet, depuis 1950, les températures de la péninsule Antarctique ont augmenté d’environ 3 °C.

Comparaison de la progression du développement du paysage verdoyant d'Antarctique
Développement du paysage verdoyant de l’Antarctique de 1986 à 2021. © Michala Garrison

Un paysage de mousses et de lichens

Dans leur étude, les chercheurs britanniques ont affirmé qu’une grande partie de la végétation couvrant de plus en plus le continent blanc est constituée de mousses. Ces végétaux figurent souvent parmi les premiers à coloniser un nouvel habitat en raison de leur grande résistance et de leur capacité à proliférer même dans des environnements pauvres en nutriments. Dans des travaux de recherche antérieurs, Roland et son équipe avaient déjà collecté des échantillons de carottes sur des bancs de mousses. Leurs analyses ont montré que la mousse s’est accumulée de manière accélérée au cours des cinq dernières décennies.

Les résultats de cette étude antérieure ont conduit les chercheurs à approfondir leurs recherches sur le développement de la mousse en Antarctique. « Sur la base des échantillons de carottes, nous nous attendions à voir un certain verdissement, mais je ne pense pas que nous nous attendions à un tel résultat à l’échelle que nous avons rapportée ici », a déclaré Roland à Universe Today.

Banc de mousse en Antarctique
Un banc de mousse sur la roche nue de Norsel Point sur l’île Amsler. © Roland et al. 2024.

En plus de la mousse et des lichens, des touffes de canche antarctique, connues sous le nom de Deschampsia antarctica, et des coussinets de sagine antarctique (Colobanthus quitensis), poussent également sur les quelques centimètres de sol exposé du paysage. Ce sont les deux seules espèces de plantes à fleurs présentes sur le continent. Cependant, avec les mousses, les champignons et les lichens, qui transforment progressivement la roche mère de l’Antarctique en sol fertile, les scientifiques envisagent la possibilité de la propagation d’autres plantes sur le continent à l’avenir, notamment des espèces envahissantes.

Roland suggère que les données recueillies avec les satellites Landsat et des échantillons de carottes ne sont qu’un point de départ. « Nous devons nous rendre dans les endroits où nous observons les changements les plus marquants et voir ce qui se passe sur le terrain », conclut le chercheur.

Source : Nature Geoscience

Laisser un commentaire