Percée médicale : un antidépresseur courant se révèle prometteur pour le traitement du glioblastome

immunotherapie glioblastome
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Un antidépresseur couramment prescrit pourrait se révéler efficace dans le traitement de l’un des cancers du cerveau les plus agressifs, le glioblastome. Cette découverte a été réalisée par une équipe de chercheurs suisses dans le cadre d’une étude visant à trouver un traitement non invasif pour ce type de cancer. D’après les résultats, publiés dans la revue Nature Medicine, cet antidépresseur a détruit efficacement les cellules tumorales cérébrales ex vivo. Ces résultats pré-cliniques prometteurs ouvrent ainsi une nouvelle voie thérapeutique pour les patients atteints de glioblastome.

Une étude menée par des chercheurs de l’Université d’Angers a révélé qu’en France, environ 3 500 nouveaux cas de glioblastome sont diagnostiqués chaque année. Cette tumeur maligne de stade 4 est l’une des plus graves formes de cancer du cerveau, causée par une dégénérescence des cellules gliales, essentielles au fonctionnement des neurones et représentant entre 50 et 90 % des cellules du système nerveux.

À ce jour incurable, les oncologues ne peuvent que prolonger l’espérance de vie des patients qui en sont atteintes, notamment par le biais d’interventions chirurgicales, de la radiothérapie et de la chimiothérapie. Toutefois, la survie médiane pour un patient atteint de glioblastome est estimée à 15 mois après le diagnostic. Le besoin de nouvelles approches thérapeutiques non invasives est donc devenu une priorité.

La difficulté de trouver des médicaments efficaces pour traiter les tumeurs cérébrales réside principalement dans la barrière hémato-encéphalique, qui empêche les substances thérapeutiques d’atteindre le cerveau et d’agir. Cependant, des chercheurs de l’hôpital universitaire de Zurich (Suisse), en collaboration avec le groupe de neurologues de l’hôpital universitaire de Zurich (USZ), ont découvert que la vortioxétine, un antidépresseur approuvé par la FDA et commercialisé sous le nom de Brintellix, est capable de traverser cette barrière. Elle dispose ainsi d’un potentiel insoupçonné dans le traitement des cancers du cerveau, et notamment du glioblastome. « L’avantage de la vortioxétine est qu’elle est sûre et très peu coûteuse », a déclaré dans un communiqué Michael Weller, neurologue à l’hôpital universitaire de Zurich et co-auteur de l’étude.

Vortioxétine : un traitement prometteur, non invasif et efficace

Pour parvenir à cette découverte, l’équipe, dirigée par le professeur Berend Snijder de l’ETH Zurich, a eu recours à une nouvelle technique appelée pharmacoscopie. Cette plateforme de criblage de médicaments, développée par les chercheurs dans le cadre de l’étude des hémopathies malignes, permet de tester simultanément des centaines de substances actives sur des cellules vivantes de tissus cancéreux.

Dans cette nouvelle étude, l’équipe s’est concentrée sur les substances neuroactives capables de traverser la barrière hémato-encéphalique, notamment des antidépresseurs, des antipsychotiques et des médicaments spécifiquement conçus pour la maladie de Parkinson. Au total, l’équipe a testé 132 médicaments sur des échantillons de tissus tumoraux de 27 sujets. Ces tissus ont été cultivés en laboratoire à partir d’échantillons prélevés chez des patients atteints de glioblastome ayant subi une intervention chirurgicale. Les scientifiques ont ensuite répertorié près de 2 500 réponses aux différents médicaments.

Les résultats ont montré, de manière surprenante, que certains antidépresseurs étaient efficaces contre les cellules tumorales, notamment ceux qui déclenchaient une cascade de signalisation, essentielle aux cellules progénitrices neuronales, inhibant ainsi la division cellulaire. Parmi ces antidépresseurs, la vortioxétine s’est avérée la plus efficace, déclenchant une réponse neurophysiologique qui permet de détruire les cellules cancéreuses tout en activant les cascades de signalisation.

La première expérience des chercheurs, basée sur des techniques d’imagerie et des analyses informatiques, a été un succès. Cependant, pour approfondir son analyse, l’équipe a décidé de tester les médicaments sur des modèles murins : des souris atteintes de glioblastome. Les chercheurs ont ensuite divisé les souris en trois groupes. La première cohorte comprenait des souris non traitées. La deuxième cohorte incluait des modèles murins ayant reçu comme traitement le citalopram, tandis que le troisième groupe a été traité avec la vortioxétine.

Les résultats, 38 jours après l’expérience, ont montré que le groupe traité à la vortioxétine présentait une croissance tumorale largement inférieure aux deux autres groupes. Cette réduction de la croissance tumorale s’accompagnait d’une diminution considérable des cellules cancéreuses. Les chercheurs ont également constaté que l’efficacité du traitement était encore plus élevée lorsque la vortioxétine était administrée en complément d’une chimiothérapie.

comparaison des scanners cérébraux des trois groupes de souris
Images IRM du cerveau des souris de chaque groupe, 38 jours après l’implantation de la tumeur. La rangée supérieure correspond au groupe témoin, celle du milieu au groupe citalopram et celle du bas au groupe vortioxétine. Le contour jaune indique la tumeur. © Lee et al.

Vers des essais cliniques

Bien que les résultats pré-cliniques soient prometteurs, l’équipe prévoit de réaliser rapidement des essais cliniques afin de confirmer l’efficacité de cet antidépresseur dans le cadre du traitement du glioblastome. « Nous ne savons pas encore si le médicament est efficace chez l’homme ni quelle dose est nécessaire pour combattre la tumeur, c’est pourquoi des essais cliniques sont nécessaires », a déclaré Weller.

Snijder et son équipe préparent désormais deux autres essais. Le premier consistera à traiter les patients avec de la vortioxétine en complément des traitements standards. Le second consistera à utiliser la pharmacoscopie pour offrir une sélection de médicaments personnalisée aux patients.

Comme la vortioxétine est un antidépresseur déjà commercialisé, Weller conseille de ne pas l’utiliser à cet effet sans surveillance médicale. « L’automédication serait un risque incalculable », prévient le chercheur. Il ajoute : « Nous ne savons pas encore si le médicament fonctionne chez l’homme et quelle dose est nécessaire pour combattre la tumeur, c’est pourquoi des essais cliniques sont nécessaires ».

Source : Nature Medicine

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