Il y a quatre ans, Chris Long, un informaticien de Reno, dans le Navada, a reçu une greffe de moelle osseuse d’un donneur étranger européen. À l’époque, il ne se doutait pas que cela pouvait avoir un impact si inattendu : son liquide séminal est maintenant celui du donneur, ne contenant plus que l’ADN de ce dernier.
Selon un article paru dans le New York Times, le but de la greffe était de traiter une leucémie myéloïde aiguë, un type de cancer qui empêche le corps de produire du sang normalement.
Après la procédure, les cellules hématopoïétiques saines du donneur ont remplacé les cellules endommagées de Long, permettant à son corps de reprendre une production sanguine normale. Il est donc logique que le sang de Long contienne également l’ADN de son donneur.
Un cobaye…
Mais une collègue de Long (qui travaille au bureau du Shérif du comté de Washoe), Renee Romero, qui dirige le laboratoire de médecine légale du bureau, a suggéré que la greffe de moelle osseuse pourrait affecter l’ADN ailleurs dans son corps. Elle avait donc encouragé Long à prélever des échantillons de son ADN avant la procédure, afin que l’équipe puisse les comparer aux échantillons post-opératoires. En d’autres termes, l’équipe du bureau a voulu utiliser Long comme cobaye (bien entendu, après acceptation de sa part).
Depuis sa procédure, l’équipe du bureau du shérif a donc collecté de nombreux échantillons supplémentaires de son ADN dans diverses parties de son corps, et à intervalles réguliers au fil des ans.
Après analyses, ils ont pu identifier à la fois l’ADN de Long et celui de son donneur dans certains échantillons, provenant notamment de ses lèvres, de ses joues et de sa langue (salive). Les échantillons prélevés dans sa poitrine et ses cheveux, quant à eux, ne révèlent que l’ADN de Long.
Ce qui a été surprenant pour tout le monde, c’est que quatre ans après la procédure, les échantillons de liquide séminal de Long ne révèlent plus que l’ADN de son donneur, alors qu’une année après, son sperme contenait les deux ADN. « Je pense que c’est assez incroyable que je puisse disparaître et que quelqu’un d’autre puisse apparaître… », a déclaré Long au NYT.
Un cas particulier
Trois experts en greffe de moelle osseuse, interrogés par le NYT, ont tous convenu qu’il est normalement impossible dans le cadre d’une telle procédure qu’un receveur produise du liquide séminal contenant l’ADN du donneur.
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Mais Mehrdad Abedi, le médecin qui a traité Long à l’Université de Californie à Davis, a quant à lui déclaré que le liquide séminal surprenant de son patient était probablement dû au fait qu’il avait subi une vasectomie après la naissance de son deuxième enfant. Cependant, le mécanisme derrière ce changement d’ADN du liquide séminal reste mystérieux.
Pourtant, la situation de Long soulève toutes sortes de nouvelles questions sur l’utilisation de l’ADN comme preuve dans les affaires judiciaires. Les médecins légistes et la police scientifique doivent maintenant se pencher sur la question de l’ADN de personnes innocentes apparaissant sur les scènes de crime en raison de greffes de moelle osseuse.
Si quelqu’un dans la situation de Long commet un crime sexuel et que les enquêteurs collectent des échantillons de liquide séminal, le donneur de moelle osseuse pourrait être accusé du crime en l’absence de tout autre ADN sur les lieux… Une comparaison de l’ADN de plusieurs parties du corps de l’accusé serait donc nécessaire. Un cas particulier que la police doit maintenant considérer…