Dans le monde animal, il est connu que les parades nuptiales puissent différer fortement entre les espèces : certaines sont étonnantes d’originalité, d’autres sont très longues, avec parfois certaines habitudes très étranges et incompréhensibles. Mais dans le cadre de l’étude de l’un de ces rituels d’accouplement, des chercheurs ont constaté un comportement étrange chez une espèce particulière d’araignées. Certains mâles semblaient attaquer les femelles pour les « ligoter » avant de s’accoupler avec ces dernières.
Parmi les animaux les plus patients dans le rituel d’accouplement, il y a les araignées. En effet, « les araignées passent parfois des heures à attirer les femelles pour les courtiser », explique Lenka Sentenská de l’Université de Toronto Scarborough, au Canada. « […] mais celles-ci (les mâles) ne font que les mordre (les femelles) », ajoute-t-elle en parlant de l’espèce en question.
Les araignées-crabes, comptant plus de 600 espèces, sont très répandues en Europe, en Asie et en Afrique. En avril 2019, alors qu’elle travaillait à l’Université Masaryk de Brno, en République tchèque, Sentenská étudiait le comportement d’une espèce particulière, Thanatus fabricii, originaire d’Israël. Elle s’est rendue compte que les mâles se comportaient étrangement au moment de l’accouplement, mais l’action était si rapide qu’il était difficile de l’observer.
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À la poursuite des araignées-crabes
Sentenská et ses collègues ont alors décidé de poursuivre un certain nombre d’araignées-crabes se déplaçant rapidement dans le désert du Néguev en Israël, et les ont amenées au laboratoire pour les observer de plus près. Des enregistrements au ralenti ont permis aux chercheurs de mieux observer la reproduction de ces dernières. L’étude a été publiée dans la revue Animal Behaviour.
« Le mâle s’est précipité vers la femelle, et cela ressemblait plus à une attaque », déclare Sentenská. L’araignée mâle mordait la femelle un certain nombre de fois, davantage si elle était plus grande et moins si elle avait des pattes manquantes. Dans la plupart des cas, cela semblait effrayer la femelle, qui rentrait ses pattes et faisait semblant d’être morte. À ce moment-là, le mâle commençait à déposer quelques brins de soie sur le corps de la femelle, liant ainsi ses pattes. L’araignée mâle s’accouplait alors avec la femelle pendant les 19 minutes suivantes, en moyenne, avant de s’enfuir.
Ce comportement peut paraître sauvage, mais c’est probablement la meilleure façon pour les mâles de sortir vivants du processus d’accouplement. En effet, l’équipe a observé que certains mâles étaient dévorés par les femelles légèrement plus grandes avant qu’ils ne puissent commencer à les mordre.
Même lorsqu’elles sont attachées, les femelles peuvent être contrôlées. Cependant, Sentenská explique qu’il ne faut pas longtemps à une femelle pour se libérer. « Elle se secouait plusieurs fois, puis écartait les jambes et elle était prête à partir », précise-t-elle. Selon Sentenská, la soie pourrait contenir un message chimique sur l’aptitude de l’araignée mâle. S’il est à son goût, une femelle peut décider de laisser le mâle continuer à s’accoupler plus longtemps avant de se libérer. « Il semble brutal que la femelle n’ait pas le choix, mais ce n’est probablement pas le cas ». Sentenská étudiera donc davantage le processus d’accouplement des Thanatus fabricii afin d’en savoir plus sur leur comportement et les éventuels messages chimiques échangés dans ce cadre.
Ce que l’on sait déjà : selon l’analyse des chercheurs, les mâles possèdent des glandes à venin relativement plus grandes que celles des femelles. Les glandes des mâles semblent donc être adaptées à l’accouplement coercitif (par contrainte) plutôt qu’à la recherche de nourriture, car ils capturent moins de proies. « Nous suggérons que l’accouplement coercitif chez T. fabricii pourrait être rendu possible par l’adaptation venimeuse des mâles », écrivent-ils dans le document.