Artemis est la première étape de la prochaine ère de l’exploration spatiale humaine, comprenant trois missions visant, à terme, à établir une présence durable sur la Lune pour se préparer aux voyages vers Mars. Artemis I est la mission qui ouvrira la voie à ce programme ambitieux. Mercredi 17 août, le lanceur SLS, avec à son bord la capsule Orion, a été transféré sur son pas de tir de Cap Canaveral. Dans les prochains jours, les ingénieurs et les techniciens configureront les systèmes pour le lancement, qui est actuellement prévu au plus tôt le 29 août à 8h33 heure locale (14h33 en France).
La mission lunaire Artemis 1 de la NASA est sur le point de lancer une nouvelle ère d’exploration lunaire américaine, plus d’un demi-siècle après le premier pas de l’Homme sur la Lune. Dirigée par la NASA, Artemis repose sur une collaboration internationale, dont l’Agence spatiale européenne (ESA), l’Agence spatiale canadienne (ASC), l’Agence japonaise d’exploration aérospatiale ainsi que des partenaires commerciaux.
Artemis 1 est un vol d’essai sans équipage de la mégafusée du système de lancement spatial (SLS) et de son vaisseau spatial Orion, que la NASA utilisera pour les vols en équipage vers la Lune plus tard. La date de lancement prévue pour Artemis 1 est le 29 août, avec les 2 et 5 septembre comme jours de sauvegarde.
Pour des raisons de sécurité, cette première mission du programme Artemis s’effectuera donc sans astronaute à bord. L’objectif est de tester en conditions réelles le lanceur SLS, fruit d’un partenariat entre Boeing, Lockheed Martin, Northrop Grumman et Aerojet Rocketdyne, ainsi que la capsule Orion, chargée de mannequins et d’appareils de mesure.
La fusée sur le pas de tir
Le 17 août, la fusée est arrivée au sommet du complexe de lancement 39B au Kennedy Space Center de la NASA en Floride, après un voyage de près de 10 heures depuis le bâtiment d’assemblage de véhicules (VAB). Ce transfert a eu lieu deux jours plus tôt que prévu, ce qui laisse à penser que la NASA est en avance sur son planning de préparation de la mission Artemis 1.
Avant son voyage de 10 heures, le vaisseau spatial avait attendu à l’intérieur du bâtiment d’assemblage de véhicules du Kennedy Space Center depuis fin juin, où il a subi beaucoup de tests, de calibrages et d’entretien, notamment après la fin de la « répétition de chronologie de lancement avec remplissage ». Il s’agit d’une séquence d’essais avant vol consistant à remplir le réservoir de la fusée avec du carburant. Il a fallu quatre essais, et parallèlement à l’annonce par la NASA de son achèvement, une fuite d’hydrogène avait été signalée, sans conséquence pour la mission cependant.
Enfin, au cours du week-end dernier, l’équipe a terminé les tests du système de terminaison de vol, qui a marqué la dernière activité majeure avant de fermer la fusée et de rétracter les plates-formes d’accès finales dans le VAB.
Une séquence bien orchestrée
Haute de 98 mètres, Artemis est l’héritière des fusées Saturn V. L’anatomie de base comprend la fusée SLS, des boosters ornés du logo emblématique de la NASA, et le vaisseau spatial Orion, qui contient ici des charges utiles destinées à l’exploration scientifique. Le SLS est surmonté d’Orion, comme un crayon avec une pointe.
Après le compte à rebours, le SLS remontera à travers l’atmosphère terrestre. En deux minutes, tout son propergol solide sera consommé et les propulseurs de la fusée seront largués. En huit minutes, tout son carburant liquide sera consommé et l’étage central de la fusée sera largué. Ensuite, pendant environ 18 minutes, Orion et l’étage supérieur de la fusée effectueront seuls un tour complet de la Terre. Orion mettra alors environ 12 minutes pour déployer ses panneaux solaires et éteindre la batterie.
Judd Frieling, directeur du vol d’ascension et d’entrée d’Artemis 1, déclare lors de la conférence du 5 août : « Notre dernière manœuvre à l’étage supérieur sera la manœuvre d’orbite d’injection translunaire, qui durera environ une heure et 20 à 30 minutes, après le début du vol. Cela nous enverra jusqu’à la Lune, à environ un quart de million de kilomètres ». À ce stade, comme le dit Sarafin, la fusée a fait son travail et Orion est en route vers la Lune.
Ensuite, l’équipe d’Orion intervient, afin de le positionner en orbite lunaire, après un voyage tortueux de trois jours, pour réaliser les expériences, tests et analyses programmés. À la fin de son excursion mouvementée de 42 jours, Orion reviendra sur Terre.
Tests de rayonnement
Comme mentionné précédemment, Artemis 1 est la première mission du vaste programme Artemis de la NASA, qui vise à renvoyer les astronautes sur la Lune, à construire une base lunaire durable, puis à viser Mars. Les astronautes de ces longues missions lunaires seront soumis à un environnement de rayonnement beaucoup plus intense (environ le double) que ceux en orbite terrestre basse sur la Station spatiale internationale (ISS). En effet, au-delà de cette orbite, le rayonnement cosmique est piégé dans les ceintures de Van Allen, qui font partie de la magnétosphère terrestre. Il peut être dangereux pour les humains et d’autres organismes vivants, ainsi que pour l’électronique sensible. La Lune se situe à environ 402 330 km de la Terre, soit environ 1000 fois plus loin que la Station spatiale internationale. Elle constitue un véritable environnement de rayonnement dans l’espace lointain en dehors des ceintures de Van Allen.
Pour comprendre les risques du rayonnement spatial, ainsi que pour développer des contre-mesures, trois mannequins seront embarqués dans la capsule Orion. Ces mannequins, appelés fantômes, sont fabriqués à partir de matériaux qui imitent les os humains, les tissus mous et les organes. Il y a un mannequin homme (Commander Moonikin Campo, fourni par la NASA) et deux mannequins femmes (Helga et Zohar, de l’ESA).
Malgré le partage du voyage, leurs missions seront différentes — Zohar portera le gilet AstroRad, tandis que Helga ne le fera pas. Les formes féminines ont été choisies parce que les femmes ont généralement une plus grande sensibilité aux effets du rayonnement spatial, mais le gilet AstroRad est conçu pour protéger à la fois les hommes et les femmes. Tout comme un vrai astronaute, Commander Moonikin Campo sera installé dans l’un des sièges de la capsule Orion. Bardé d’électronique, le gilet enregistrera tout ce que subiront les astronautes en route vers la Lune.
Les fantômes ont une grille de trois centimètres, intégrée dans le torse, qui permettra aux scientifiques de cartographier les doses de rayonnement internes aux zones du corps qui contiennent des organes critiques. Avec deux torses identiques, les scientifiques pourront déterminer dans quelle mesure le nouveau gilet pourrait protéger l’équipage du rayonnement solaire, tout en collectant des données sur la quantité de rayonnement que les astronautes pourraient subir à l’intérieur d’Orion lors d’une mission lunaire — des conditions qui ne peuvent pas être recréées sur Terre.
De petites expériences biologiques pour de grandes missions
La première mission avec le vaisseau spatial Orion de la NASA sera sans équipage, mais il y aura plusieurs petits passagers biologiques durant le voyage autour de la Lune. En effet, le programme de biologie spatiale de la NASA a sélectionné quatre enquêtes de biologie spatiale qui examineront la valeur nutritionnelle des graines, la réparation de l’ADN des champignons, l’adaptation de la levure et l’expression génique des algues pour aider les chercheurs à mieux comprendre comment les systèmes biologiques sont affectés par un environnement spatial lointain, en préparation pour les missions humaines sur la Lune, et éventuellement sur Mars.
Les expériences seront transportées dans un conteneur stocké dans le compartiment de l’équipage de la capsule Orion pendant toute la durée de la mission lors de son passage à travers les ceintures de Van Allen sur le chemin de la Lune et de nouveau sur le chemin du retour vers la Terre. Tous les spécimens seront retournés aux chercheurs pour des analyses après le vol après que le vaisseau spatial se soit écrasé dans l’océan Pacifique.
Finalement, en 2024, la mission Artemis 2 emportera des astronautes jusqu’en orbite autour de la Lune, sans y atterrir. Cet honneur sera réservé à l’équipage d’Artemis 3, mission prévue au plus tôt en 2025.