Dimanche dernier, un astéroïde de la taille d’une voiture est passé à moins de 2950 kilomètres de la Terre : il s’agit du survol le plus proche de la Terre jamais enregistré. Et nous ne l’avons même pas vu venir.
Cet astéroïde a frôlé la Terre de manière remarquablement proche : en réalité, selon les traqueurs d’astéroïdes et un catalogue compilé par l’observatoire astronomique de Sormano en Italie, il s’agit du passage le plus proche de la Terre jamais enregistré.
En raison de sa taille, la roche spatiale n’aurait probablement pas représenté un danger pour les personnes au sol si elle avait frappé l’atmosphère de notre planète. Mais cette proximité reste néanmoins inquiétante, car les astronomes n’avaient aucune idée de l’existence de l’astéroïde avant son passage. « L’astéroïde s’est approché sans être détecté, de la direction du Soleil. Nous ne l’avons pas vu venir », a déclaré Paul Chodas, directeur du Center for Near Earth Object Studies de la NASA.
En effet, l’Observatoire Palomar en Californie a détecté pour la première fois la roche spatiale environ six heures après qu’elle a survolé la Terre. Chodas a confirmé la nature record de l’événement : « Le passage d’hier est le plus proche jamais enregistré, si l’on écarte quelques astéroïdes connus qui ont effectivement eu un impact sur notre planète », a-t-il déclaré.
Il faut savoir que la NASA ne connaît qu’une fraction des objets géocroiseurs (NEO, de l’anglais Near Earth Object) comme celui-ci. En effet, une grande quantité d’entre eux ne traversent pas la ligne de visée des télescopes, et plusieurs astéroïdes potentiellement dangereux ont difficilement été détectés par les scientifiques ces dernières années.
Le problème est le suivant : si un astéroïde dangereux pour la Terre arrive à échapper à la vue de nos télescopes et autres systèmes de surveillance et de détection d’objets géocroiseurs, ce dernier pourrait tuer des dizaines de milliers de personnes.
L’astéroïde 2020 QG a survolé l’hémisphère sud
Cet astéroïde qui a frôlé la Terre s’appelait initialement ZTF0DxQ, mais est maintenant officiellement connu des astronomes sous le nom de 2020 QG. « L’astéroïde nouvellement découvert, ZTF0DxQ, a dépassé le quart du diamètre de la Terre hier, ce qui en fait le survol le plus proche connu qui n’a pas frappé notre planète », a tweeté Tony Dunn lundi, fondateur du site Orbitsimulator.com.
L’animation ci-dessus montre 2020 QG survolant l’océan Austral près de l’Antarctique. Cette simulation accélérée montre la trajectoire orbitale approximative de 2020 QG, tandis qu’il se déplaçait à une vitesse d’environ 12,4 kilomètres par seconde, ou environ 44’000 km/h.
Les premières observations suggèrent que la roche spatiale a survolé l’hémisphère sud juste après 4 heures du matin ET (10 heures du matin heure française). Cependant, le Minor Planet Center de l’Union astronomique internationale a calculé une trajectoire légèrement différente. Le rendu du groupe (illustré ci-dessous) suggère que l’astéroïde a survolé l’océan Pacifique à des centaines de kilomètres à l’est de l’Australie.
Un astéroïde pas dangereux, mais certainement pas le bienvenu sur Terre…
Dans le domaine des astéroïdes, 2020 QG n’était pas très dangereux. Mais ce n’est pas pour autant qu’il est le bienvenu sur Terre. Les observations de télescopes suggèrent que l’objet mesure entre 2 et 5,5 mètres de large (soit quelque part entre la taille d’une petite voiture et d’une grande camionnette). Selon le simulateur « Impact Earth » de l’Université Purdue et de l’Imperial College London, même si l’astéroïde se situait à la plus grande extrémité de ce spectre, et était composé de fer dense (la plupart des astéroïdes sont rocheux), seuls de petits morceaux de l’astéroïde pourraient avoir atteint le sol.
En effet, un tel astéroïde aurait littéralement explosé dans l’atmosphère, créant une boule de feu brillante et déclenchant une explosion aérienne équivalente à l’explosion de quelques dizaines de kilotonnes de TNT. C’est à peu près la même chose que l’une des bombes atomiques que les États-Unis ont larguées sur le Japon en 1945. Mais l’explosion aérienne se serait produite à environ 3 à 5 kilomètres au-dessus du sol.
Bien entendu, cela ne rend cependant pas la découverte de l’astéroïde beaucoup moins déconcertante – il ne faut pas nécessairement une énorme roche spatiale pour engendrer de gros problèmes…
Prenez par exemple l’astéroïde d’environ 20 mètres de large qui a explosé sans avertissement au-dessus de Tcheliabinsk, en Russie, en février 2013. Cette roche spatiale a créé un événement connu sous le nom de superbolide, déclenchant une explosion aérienne équivalant à 500 kilotonnes de TNT – soit environ 30 fois l’énergie des bombes nucléaires d’Hiroshima. L’explosion, qui a commencé à environ 20 kilomètres au-dessus de la Terre, a déclenché une onde de choc qui a brisé les fenêtres de six villes russes et blessé environ 1500 personnes.
Et en juillet 2019, un astéroïde de 130 mètres, appelé 2019 OK, est passé à moins de 72’400 kilomètres de notre planète, soit moins de 20% de la distance entre la Terre et la Lune. Les astronomes avaient détecté cette roche moins d’une semaine avant son passage le plus proche, ce qui a amené un scientifique à penser que l’astéroïde est essentiellement apparu « de nulle part ».
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Dans un impact direct improbable sur une ville, une telle roche spatiale capricieuse pourrait tuer des dizaines de milliers de personnes. C’est notamment pour cette raison que la NASA scrute activement le ciel à la recherche de telles menaces. Cependant, l’agence est mandatée par le Congrès américain pour détecter seulement 90% des roches spatiales dites « tueuses de villes », de plus de 140 mètres de diamètre.
En mai 2019, la NASA a déclaré qu’elle avait trouvé moins de la moitié des quelque 25’000 objets estimés de cette taille ou plus. Et bien entendu, cela ne prend pas en compte les astéroïdes plus petits tels que le superbolide de Tcheliabinsk et 2019 OK.
Les objets qui proviennent de la direction du soleil, quant à eux – comme 2020 QG – sont notoirement difficiles à repérer : « Nous ne pouvons pas faire grand chose pour détecter les astéroïdes entrants venant de la direction du Soleil, car les astéroïdes sont détectés à l’aide de télescopes optiques uniquement, et nous ne pouvons les rechercher que dans le ciel nocturne », a déclaré Chodas. « L’idée est que nous les découvrons sur l’un de leurs passages antérieurs par notre planète, puis que nous fassions des prédictions des années et des décennies à l’avance pour voir s’il y a possibilité d’impact ».
Fort heureusement, la NASA a un plan pour combler ces lacunes dans son programme de chasse aux astéroïdes : l’agence en est aux premières étapes du développement d’un télescope spatial capable de détecter les astéroïdes et les comètes venant de la direction du Soleil. À savoir que le budget 2020 de la NASA a alloué près de 36 millions de dollars américains à ce télescope, nommé NEOSM, ou NEO Surveillance Mission (anciennement Near-Earth Object Camera, en abrégé NEOCam). Si le financement se poursuit, il pourrait être lancé dès 2025.