L’origine des éléments volatils, indispensables à l’apparition de la vie sur Terre, fascine les spécialistes depuis des décennies. Une étude récente a tenté de percer ce mystère en scrutant les empreintes chimiques du zinc emprisonné dans des fragments de météorites, vestiges des tout premiers astéroïdes et planétésimaux. Les résultats de cette recherche suggèrent que sans ces derniers, la Terre primitive aurait été dépourvue des éléments essentiels au développement de la vie.
Lors d’une étude antérieure, Jack Szostak, lauréat du prix Nobel de physiologie ou médecine et chimiste à l’Université de Chicago, avait déjà émis l’hypothèse que les impacts d’astéroïdes auraient contribué à l’essor de la vie sur Terre. Selon lui, un impact d’ampleur modérée aurait pu générer de l’hydrogène et du méthane dans l’atmosphère, créant ainsi des conditions favorables à la formation de composés organiques.
Cette hypothèse de Szostak vient s’ajouter à une série de recherches qui soutiennent que les éléments volatils, pouvant passer de l’état solide à l’état gazeux à basse température, ont joué un rôle clé. En effet, le soufre, le carbone, l’azote, l’hydrogène, le phosphore et l’oxygène, tout comme l’eau, sont des éléments volatils présents dans les organismes vivants.
Bien que ces éléments volatils soient présents depuis la formation de la Terre, il y a environ 4,5 milliards d’années, leurs origines demeurent en grande partie mystérieuses. De nombreux scientifiques, à l’instar de Szostak, postulent que ces éléments proviendraient des impacts d’astéroïdes, en se basant sur le fait que la Terre s’est formée par l’accrétion de matières issues du milieu protosolaire interne.
Afin d’éclairer cette question controversée, des chercheurs de l’Université de Cambridge et de l’Imperial College de Londres ont analysé une série de météorites. « Comprendre comment ces matériaux ont atteint la Terre pourrait nous éclairer sur l’origine de la vie et sa possible émergence ailleurs », a déclaré la Dr Rayssa Martins, du département des sciences de la Terre à Cambridge, dans un communiqué.
Les planétésimaux au cœur de la recherche
Dans le cadre de leur étude, la Dr Martins et son équipe se sont penchés sur les principaux constituants des planètes rocheuses du système solaire : les planétésimaux. Ces corps se forment par accrétion autour d’une étoile naissante, processus durant lequel des particules s’agglomèrent pour former des corps rocheux. Les planétésimaux se divisent généralement en deux catégories : ceux qui se sont formés dans le système solaire sous haute radioactivité (planétésimaux fondus) et ceux formés après l’extinction des sources de radioactivité (planétésimaux tardifs, ou « non fondus »), qui ont conservé leurs composés volatils.
Martins et ses collaborateurs ont analysé divers isotopes du zinc présents dans 18 échantillons de météorites issues de différents planétésimaux, dont 11 météorites non carbonées et 7 carbonées. Le zinc a été privilégié en raison de sa composition atypique. L’équipe a ensuite comparé chaque empreinte isotopique avec des échantillons de roches terrestres. Les données obtenues ont servi à modéliser l’acquisition des isotopes de zinc au fil des dizaines de millions d’années pendant lesquelles la Terre a accumulé de la matière.
Selon les résultats, publiés dans la revue Science Advances, 70 % de la masse terrestre provient de planétésimaux fondus, mais ceux-ci ne fournissent qu’environ 10 % de la teneur en zinc. L’équipe suggère que 90 % du zinc terrestre proviendrait de météorites non carbonées, notamment les chondrites, qui, n’ayant pas subi de fusion au début du système solaire, ont conservé leurs éléments volatils.
« Nos résultats montrent qu’aucune garantie n’existe quant à la présence de matériaux adéquats pour contenir suffisamment d’eau et d’autres substances volatiles sur les planètes, quel que soit leur état physique », avance Martins. Elle conclut : « Le rôle de ces différents matériaux dans l’approvisionnement en substances volatiles est un facteur à considérer dans la recherche de planètes habitables ailleurs ».