Le surpoids et l’obésité sont des problématiques de santé grandissantes à travers de nombreux pays développés ou en développement. Considérée comme un simple « handicap » aux yeux de certains, en France, l’obésité est définie comme étant une véritable maladie chronique. Récemment, une équipe de chercheurs a identifié des traces d’ADN bactérien dans le sang, le foie et le tissu adipeux de personnes obèses, révélant que des fragments de bactéries (ou des bactéries vivantes entières) s’infiltrent dans leur corps depuis les intestins.
Quelques chiffres avant d’aborder le sujet de l’étude. En tête de liste des pays et États les plus « obèses » ou en surpoids, c’est-à-dire avec l’indice de masse corporelle (IMC) global le plus élevé, il y a Nauru (avec un IMC moyen de 32.5), l’État de Tonga (IMC de 31.9) et les Samoa américaines (IMC de 31.7). Contrairement aux croyances populaires, les États-Unis ne se situent (en 2020) qu’en 16e position, avec un IMC moyen de 28.8. Ils sont suivis de près par l’Arabie Saoudite (IMC : 28.5) et le Mexique (IMC : 28.1).
Pour vous donner une idée de la signification de ces chiffres : un IMC de 25 à 30 indique un surpoids, l’obésité étant définie entre 30 et 35 pour la forme modérée et entre 35 et 40 pour l’obésité sévère.
Récemment, des biologistes de l’Institut de recherche sur le cœur et les poumons du Québec, ont découvert des fragments d’ADN de bactéries intestinales dans le corps de personnes obèses. Les résultats de l’étude, publiés dans la revue Nature Microbiote, sont à prendre très au sérieux, sachant que de tels fragments de bactéries peuvent déclencher une réponse immunitaire et contribuer au développement de certaines maladies.
Une barrière intestinale plus fragile
« Même des fragments de bactéries peuvent déclencher une réponse immunitaire », explique l’un des auteurs principaux de l’étude, André Marette, de l’Institut de recherche sur le cœur et les poumons du Québec, au Canada.
Chez les personnes obèses, la barrière intestinale est plus fragile, explique Marette, ce qui permet à des fragments de bactéries ou à des bactéries vivantes de pénétrer dans leur corps. Cela pourrait contribuer au développement du diabète en provoquant une inflammation dans des organes tels que le foie. Et en effet, nous savons déjà depuis longtemps que l’obésité augmente le risque de diabète de type 2.
Fuite de bactéries, un rôle potentiel dans le développement du diabète
Pour étudier la question de l’impact de l’obésité sur l’intégrité des tissus, Marette et ses collègues ont analysé des échantillons de sang, de foie et de tissu adipeux prélevés sur des personnes ayant subi une opération chirurgicale pour perdre du poids. L’équipe a pris de nombreuses précautions pour exclure toute contamination bactérienne, ce qui aurait compromis les résultats.
À leur grande surprise, les chercheurs ont trouvé de l’ADN bactérien dans les trois types d’échantillons. « Je n’aurais jamais pensé qu’elles (les bactéries) pouvaient réellement atteindre les organes », déclare Marette.
Ils ont notamment trouvé un large éventail d’ADNs bactériens, dont certains provenaient de bactéries connues pour provoquer des maladies — telle que Escherichia–Shigella, responsable de la dysenterie bacillaire —, tandis que d’autres bactéries identifiées sont considérées comme bénéfiques (du moins dans l’intestin). Certains autres groupes de bactéries rapportés dans l’étude vivent normalement dans le sol ou dans l’eau, et ne se trouvent pas dans le corps humain. « Cela nous a beaucoup surpris », ajoute Marette.
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L’étude a également révélé que le type de bactéries variait d’un tissu à l’autre et selon que les personnes souffraient ou non de diabète de type 2. Comme les scientifiques n’ont recherché que la présence d’ADN bactérien, ils ne peuvent pas être certains que l’ADN provient de bactéries vivantes ou de fragments de bactéries mortes.
Il faut savoir que les bactéries vivantes peuvent provoquer des infections potentiellement mortelles lorsqu’elles pénètrent dans l’organisme, mais aucune des personnes testées n’a montré de signes de ce genre. Marette prévoit d’essayer de cultiver des bactéries à partir de tels échantillons de tissus dans de futures études, pour voir si elles sont vivantes ou non.
Si la fuite de bactéries dans le corps joue vraiment un rôle dans le développement du diabète, il pourrait être possible de développer de nouveaux traitements, déclare Marette. Par exemple, il pourrait y avoir des moyens de rendre l’intestin plus « étanche » ou de tuer les bactéries qui causent le problème.