Le lauréat français du prix Nobel de chimie 2023 a raté son examen de chimie de 1re année universitaire

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Moungi Bawendi, prix Nobel 2023 de chimie et professeur au MIT. | Jodi Hilton/MIT
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Pour ses travaux sur les points quantiques, Moungi Bawendi, professeur au Massachusetts Institute of Technology (MIT), s’est vu décerner le prix Nobel de chimie aux côtés de Louis Brus de l’Université Columbia et d’Alexei Ekimov du Nanocrystals Technology. En expliquant comment il a échoué à son premier examen de chimie de première année à Harvard et appris de ses erreurs, le lauréat français du prix Nobel de chimie 2023 apporte un témoignage marquant de persévérance académique.

Né en 1961 à Paris d’une mère française et d’un père tunisien, Moungi Bawendi a déménagé aux États-Unis (à Lafayette-Indiana) lorsque son père a décroché un poste de professeur de mathématiques à l’Université de Purdue. Son parcours jalonné d’épreuves et d’échecs, l’ayant mené jusqu’au Nobel, témoigne de son incroyable persévérance — un message qu’il dédie aux jeunes générations de scientifiques.

« Vous pouvez toujours persévérer »

Alors qu’il excellait dans ses études secondaires, Bawendi a soudainement été pris de panique lors de son examen de chimie à Harvard, vers la fin des années 1970. Intimidé par la taille de la salle et par l’air sévère du surveillant, le jeune étudiant qu’il était a vécu le cauchemar de tout bon élève qui se respecte. « Alors que je prenais connaissance du questionnaire de l’épreuve, j’ai regardé la première question et je n’ai pas compris, puis la deuxième question, je n’ai pas compris non plus », a-t-il raconté aux journalistes.

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Il avait l’habitude de réussir facilement ses examens et pourtant, il a reçu une note de 20/100 — la plus basse de sa classe, ce qui lui a valu un F cuisant… Cette expérience traumatisante l’avait anéanti, jusqu’à ce qu’il se dise : « C’est ma fin, qu’est-ce que je fais ici ? ». Il s’est alors rendu compte d’une lourde erreur : il ne s’était tout simplement jamais donné la peine de véritablement préparer ses examens.

« Vous avez un revers, mais vous pouvez toujours persévérer, le surmonter et apprendre de votre expérience, c’est ce que j’ai évidemment fait », a-t-il déclaré. « Et j’aurais pu décider que ce n’était pas pour moi, mais j’aimais ce que je faisais et j’ai donc appris comment réussir en tant qu’étudiant ». Cette leçon de vie lui a finalement permis de brillamment réussir aux futurs examens pour obtenir son diplôme et pour finalement devenir professeur au MIT (depuis les années 1990).

Sa persévérance l’a mené jusqu’au prix Nobel, pour ses travaux aux côtés de Brus et d’Ekimov. Alors qu’il s’était endormi, le chimiste a été à la fois choqué et honoré d’être réveillé par un appel du comité. Sa technique permettant de fabriquer des points quantiques avec une excellente précision lui a valu l’une des plus prestigieuses reconnaissances scientifiques.

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Bawendi remporte le prix Nobel de chimie aux côtés de Brus et d’Ekimov pour ses travaux sur les points quantiques. © The Nobel Prize

Ajouter de la couleur à la nanotechnologie

Les points quantiques sont de minuscules particules semi-conductrices de seulement quelques nanomètres de diamètre, soit environ un millionième de la taille d’une tête d’épingle. Dès les années 1930, les scientifiques ont prédit que ce type de particules présenterait des comportements inhabituels. En effet, à des échelles aussi petites, il y a si peu d’espace entre les électrons qu’ils sont presque plaqués les uns contre les autres. D’autre part, leurs caractéristiques diffèrent fondamentalement de celles des particules standard, car elles sont en partie régies par la mécanique quantique. Il en a été déduit que la taille des particules peut influencer d’autres propriétés physiques, telles que la couleur.

Cependant, la théorie n’avait pas pu être expérimentée jusqu’à récemment, car aucune technologie permettant de produire d’aussi petites particules avec précision n’était disponible. Ce n’est que dans les années 1980 que Brus et Ekimov ont réussi (chacun de leur côté) à créer les premiers points quantiques. En les mettant en suspension dans une solution, le premier a pu confirmer que leur taille déterminait la couleur émise lorsqu’ils sont éclairés par une lumière ultraviolette. En effet, les points affichent une fluorescence selon une gamme de couleurs conditionnée par leur taille. Le second a démontré le même phénomène, en travaillant avec des nanoparticules de verre teintées avec du chlorure de cuivre. Ils ont en quelque sorte « ajouté » des couleurs à la nanotechnologie impliquée, en démontrant que les effets quantiques surviennent à mesure que les particules rétrécissent.

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Les effets quantiques surviennent lorsque les particules rétrécissent. © Johan Jarnestad/Académie royale des sciences de Suède

Mais malgré ces avancées, les techniques de Brus et d’Ekimov ne permettaient pas de produire des points quantiques de taille uniforme. Suite à sa formation postdoctorale dans le laboratoire de Brus (en 1988), Bawendi a tenté d’améliorer la méthode de production des points quantiques, notamment en explorant toute une gamme de solvants, de températures et de techniques, dans le but de former des nanocristaux uniformes. Ce n’est qu’en 1993 que le chimiste a réussi à déterminer les conditions précises idéales permettant de former des points quantiques uniformes et homogènes.

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Illustration du principe de la technique de Bawendi pour produire des points quantiques uniformes. © Johan Jarnestad/Académie royale des sciences de Suède

À l’époque, les chercheurs souhaitaient créer ces points uniformes uniquement dans le but d’en étudier les propriétés uniques et ne s’attendaient pas à ce qu’ils soient aujourd’hui appliqués à de nombreuses technologies. « Nous avons juste poussé et poussé, et nous avons finalement développé un processus pour fabriquer des particules suffisamment homogènes pour des études scientifiques fondamentales, et il s’est avéré que le processus pouvait être utilisé pour bien plus que cela, ce que nous n’aurions jamais pensé à l’époque », explique Bawendi.

Suite à la prouesse de Bawendi, les points quantiques ont progressivement été introduits dans les écrans LED. Grâce au développement des moyens de contrôler l’efficacité de leur émission lumineuse et d’éliminer leur tendance à clignoter, diffuser des images en ultrahaute définition par le biais d’écrans plats ultrafins est maintenant possible. Les points quantiques sont également utilisés dans l’imagerie médicale, notamment en tant que marqueurs fluorescents pour les tissus biologiques, ainsi que dans le domaine de l’informatique quantique.

Actuellement, les scientifiques explorent la possibilité d’utiliser les points quantiques pour améliorer la performance de nombreuses autres technologies, telles que les cellules solaires, l’électronique flexible et les photocatalyseurs. Le laboratoire de Bawendi travaille également sur des spectromètres à points quantiques suffisamment petits pour être introduits dans les lentilles photographiques des smartphones. À terme, ces dispositifs permettraient de diagnostiquer instantanément les affections cutanées ou de détecter des polluants environnementaux.

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