Malgré sa capacité à être recyclé indéfiniment, le verre classique a un impact écologique significatif et une capacité d’isolation réduite par rapport aux murs. Afin de résoudre ces problèmes, des chercheurs ont développé un matériau à base d’aérogel de cellulose (tiré du bois) imitant parfaitement les propriétés du verre, mais en une version plus performante. En plus d’avoir les mêmes capacités d’isolation que les murs, le nouveau matériau aurait un moindre impact écologique et pourrait révolutionner l’industrie du bâtiment.
Le verre est le matériau le plus utilisé pour les fenêtres, mais il ne permet pas de retenir efficacement la chaleur à l’intérieur d’un bâtiment. Pour améliorer la capacité d’isolation des fenêtres en verre, les doubles vitrages sont couramment employés. Ils consistent à espacer les couches de verre avec de l’air, en élargissant cette couche d’air selon l’isolation désirée. Toutefois, les vitrages superposés réduisent la transparence des fenêtres, tandis que l’élargissement des couches d’air entrave la capacité d’isolation thermique, car les courants d’air de convection circulent plus facilement.
D’un autre côté, le verre est considéré comme un matériau écologique parce qu’il est principalement constitué de sable (disponible en grande quantité partout dans le monde), neutre et peut être recyclé indéfiniment sans perdre en qualité. De plus, il peut se décomposer dans le sol sans libérer de produits chimiques nocifs pour l’environnement. Cependant, le verre reste coûteux d’un point de vue économique et écologique. En effet, en plus des coûts énergétiques compensant sa capacité d’isolation réduite, les émissions de carbone pour sa fabrication sont d’environ 25 000 tonnes métriques par an.
Dans le but de résoudre ces problèmes, le verre conçu à partir de bois a gagné en notoriété au cours de ces cinq dernières années. Le nouveau matériau, développé par des chercheurs de l’Université de Boulder au Colorado (États-Unis) et de Bristol (Angleterre), est produit à partir d’un aérogel transparent à base de cellulose, plus précisément un aérogel de cellulose silanisé hautement transparent (SiCellA). Le gel est ponctué de bulles de gaz pour acquérir les mêmes capacités d’isolation que les murs. Une fois solidifié, le nouveau matériau transparent serait à la fois plus efficace qu’un double vitrage en matière d’isolation thermique et respecterait les normes de qualité du verre conventionnel.
« Nous avons une combinaison de propriétés très inhabituelle, sous la forme d’un aérogel très transparent qui a également une isolation thermique très élevée », explique Ivan Smalyukh, chercheur à l’Université de Boulder au Colorado et coauteur principal de la nouvelle étude, parue dans Nature Energy. D’après l’expert, obtenir une bonne capacité d’isolation avec une telle transparence est un véritable exploit.
Du verre flexible et plus léger
Pour extraire la cellulose destinée à la production du nouveau verre, les chercheurs ont choisi le balsa (Ochroma pyramidale), un arbre à croissance rapide originaire des Amériques et produisant le bois ayant l’une des plus faibles densités au monde. Pour produire l’aérogel transparent, le bois est traité dans un bain oxydant à température ambiante afin de le blanchir. Il est ensuite imprégné d’alcool polyvinylique, un polymère synthétique le rendant totalement transparent, tel du verre.
Pour solidifier l’aérogel, les chercheurs l’ont séché en augmentant la température et la pression et en remplissant les pores antérieurement remplis d’alcool avec de l’air. En ajoutant du silicium à la surface du gel, le matériau devient hydrofuge et empêche ainsi la condensation de l’humidité ambiante. En plus d’être beaucoup plus léger que le verre conventionnel (le bois de balsa ayant une très faible densité), le matériau obtenu est capable de supporter des chocs importants grâce à sa structure cellulosique. Il peut ainsi supporter de grandes contraintes sans se déformer et se plie ou se fend au lieu de se briser, contrairement au verre standard.
Par ailleurs, ce verre cellulosique serait cinq fois plus efficace que le verre conventionnel en matière d’isolation thermique. Il permettrait ainsi des économies énergétiques considérables tout en étant biodégradable et moins énergivore au cours de sa production. Il peut être utilisé pour remplacer directement le verre conventionnel des fenêtres ou pour les doubles vitrages (en tant que couche intermédiaire) afin d’en améliorer l’isolation. De plus, il serait compatible avec les équipements et traitements industriels existants et faciliterait ainsi la transition potentielle vers des matériaux de construction plus durables.
Il est toutefois important de garder à l’esprit que de nombreuses questions sont encore à considérer avant de pouvoir adopter ce genre de matériau à grande échelle, notamment : comment produire ces arbres en masse de façon écologique ? Est-ce vraiment sans impact pour l’environnement ? Le cycle de production des arbres pour obtenir la matière première nécessitera des considérations et ajustements en matière de durabilité. La plupart des arbres à croissance rapide sont par exemple considérés comme envahissants, surtout s’ils sont produits à grande échelle…