Que se passerait-il si une bombe nucléaire s’abattait sur votre ville ? Rien de bon, certes. Mais de quelle manière, et à quel point ? C’est à cette troublante question que le site Nukemap, créé par Alex Wellerstein en 2012, permet de répondre avec précision.
Nukemap se présente sous la forme d’une carte interactive. Celle-ci permet de placer un curseur où on le souhaite pour évaluer les dégâts que causerait à cet endroit l’explosion d’une bombe nucléaire. Des menus déroulants permettent de tester différents types de bombes. Il est possible d’ajuster manuellement différents paramètres, comme la puissance, l’altitude de l’explosion, ou encore la présence de retombées de débris radioactifs.
L’autre option possible, historiquement ou géopolitiquement intéressante, est de choisir une bombe parmi les 33 préenregistrées. Les paramètres de ces dernières sont déjà rentrés dans le calculateur. On y retrouve des bombes qui ont été larguées par le passé, comme la fameuse « Little boy » sur Hiroshima en 1945, mais aussi de nombreuses bombes qui ont été testées par le passé.
On trouve même dans cette sélection des bombes existantes, mais qui n’ont jamais été larguées, comme la Tsar Bomba, la plus grosse bombe jamais conçue par l’URSS. Pour donner une idée vertigineuse de l’impact qu’elle pourrait avoir, sa charge explosive fait plus de 6600 fois celle de « Little boy ».
Pour rappel, une bombe nucléaire est une arme qui exploite l’énergie nucléaire. C’est-à-dire l’énergie issue de la réaction d’atomes entre eux. La fission d’atomes lourds d’uranium ou de plutonium, en l’occurrence, pour une bombe atomique, ou la fusion d’atomes dans le cas d’une bombe H (bombe à hydrogène). Cette dernière est encore plus puissante qu’une bombe atomique.
Et si une bombe nucléaire tombait sur Paris ?
Les effets d’une bombe nucléaire sont de différentes natures. En effet, on trouve d’abord des effets mécaniques liés à la charge explosive, qui génère une gigantesque boule de feu et un souffle dévastateur. Au-delà de ces effets, les bombes nucléaires ont aussi la particularité de générer une forte radioactivité, à court et long terme.
Prenons l’exemple d’une bombe atomique similaire à celle qui a causé l’explosion à Hiroshima, « Little boy », qui tomberait en plein cœur de Paris, au niveau de la cathédrale de Notre-Dame.
Une boule de feu de 180 mètres : tout ce qui se trouve dans ce rayon, en orange foncé, est vaporisé dans une gigantesque explosion. Si la bombe touche le sol, la quantité de retombées radioactives est considérablement augmentée.
Un rayonnement thermique sur 1.91 km : les personnes présentes dans ce rayon subissent des brûlures au troisième degré pouvant entraîner la mort, des invalidités, des cicatrices, ou encore nécessiter une amputation.
Des dégâts de souffle sur 4.52 km (en gris clair) : dans un rayon proche de 340 mètres, « les décès approchent les 100% », indique le simulateur, et même de solides bâtiments en béton sont gravement endommagés ou démolis. Jusqu’à 1.67 km, la plupart des bâtiments résidentiels s’effondrent et l’on compte de nombreux morts ou blessés. Au-delà, les dégâts sont plus légers et l’on assiste à des explosions de vitres.
Une zone d’irradiation immédiate de 1,2 km : dans cette zone, en vert, les radiations émises sont si fortes que le risque de décès à un mois de l’explosion est très élevé. Le site précise que 15% des survivants exposés finissent par mourir d’un cancer.
En tout, le site estime le nombre de morts possibles à 199 170, en prenant en compte les données sur la population locale, et les blessés à 530 430. Les morts liées aux effets des retombées radioactives ne sont pas calculées. Bien entendu, ces effets seraient amplifiés dans le cas d’armes de guerre plus récentes, car depuis les événements de 1945, des bombes bien plus puissantes ont été développées. Par exemple, si on sélectionne B-83, la bombe la plus puissante présente actuellement dans l’arsenal des États-Unis selon le site, d’une puissance de 1,2 mégatonne, la boule de feu initiale vaporiserait tout sur un rayon de plus d’un kilomètre, les bâtiments de Paris tout entière seraient balayés par le souffle, et on observerait des brûlures au troisième degré jusqu’à l’extérieur de la ville — jusqu’à Argenteuil ou Orly. Le nombre de décès estimé monte alors à 1 871 930, et le nombre de blessés à 3 088 520.
Depuis son lancement en 2012, le site internet de Nukemap a enregistré plus de 246 millions de détonations. Sa fréquentation est en ce moment plus forte que jamais, notamment depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie. « Le graphique du trafic ressemble moins à un pic qu’à un tsunami », explique le créateur du site dans une interview donnée dans The Atlantic. « Le trafic de base d’une journée normale sans crise peut aller jusqu’à environ 20.000 personnes par jour. (…) En ce moment, cependant, nous sommes à plus de 150 000 personnes chaque jour ».