À l’instar d’une grande partie des maladies évolutives affectant la vision, il n’existe à ce jour pas encore de traitement médicamenteux spécifique contre la cataracte. Si l’on en connaît en effet les causes et les facteurs de prédisposition, la seule option pour l’instant disponible pour la traiter est la chirurgie. Une récente recherche internationale, dirigée par l’Université d’Anglia Ruskin au Royaume-Uni, offre toutefois un espoir d’alternative à la chirurgie, avec un potentiel traitement médicamenteux. À base d’oxystérol, le traitement expérimental a montré des résultats prometteurs chez la souris et pourrait à terme révolutionner la recherche thérapeutique en ophtalmologie.
La cataracte est une maladie qui se manifeste par l’opacification du cristallin, cette fine lentille dans l’œil qui permet la convergence et la divergence de la lumière sur la rétine. Dans le cas d’une cataracte, la qualité de la vision diminue progressivement, allant parfois jusqu’à la cécité — dans les cas les plus graves. De l’extérieur, l’on peut voir les pupilles des patients blanchir progressivement avec le temps. La cataracte représente d’ailleurs 40% des cas de cécité dans le monde, soit plus de 17 millions de personnes.
Causes et facteurs de risque
L’opacification du cristallin lors d’une cataracte résulte d’une perturbation dans sa structure protéinique, qui entraîne la formation d’amas qui dispersent la lumière. Mal capturée et focalisée, cette dernière est mal transmise à la rétine, provoquant alors des difficultés de vision.
Il faut savoir qu’il existe plusieurs formes de la maladie, selon les facteurs de risque. La première et la plus courante est la cataracte sénile, liée au vieillissement du cristallin. Comme son nom l’indique, elle atteint les personnes âgées, mais aussi les personnes présentant en amont une forte myopie, un glaucome chronique ou une dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA).
La deuxième forme de cataracte (ou cataracte secondaire) se développe à cause de certaines maladies telles que le diabète ou d’intenses traitements médicamenteux (corticostéroïdes, radiothérapie, …). La troisième forme (ou cataracte traumatique) fait suite à des chocs traumatiques (brûlures, blessures physiques, …) des yeux et se manifeste surtout chez les jeunes.
Les personnes habitant en haute altitude ou dans des zones très ensoleillées sont aussi à risque de développer la maladie, à cause de la forte concentration en rayons ultraviolets. Le tabac, l’alcool ainsi qu’un déséquilibre nutritionnel peuvent aussi être des facteurs de risque importants.
La dernière forme, et la plus rare, est la cataracte infantile, liée à une prédisposition génétique. Cependant, elle peut aussi se développer suite à une maladie affectant la mère pendant la grossesse (toxoplasmose, herpès génital, rubéole, etc.).
Bien que les avancées et prouesses en chirurgie ophtalmologique permettent aujourd’hui d’opérer la cataracte en à peine sept minutes, l’intervention reste tout de même invasive et douloureuse pour les patients. Le nouveau traitement, décrit dans le document d’étude publié dans la revue Investigative ophtalmologie and visual science (IOVS), pourrait peut-être changer la donne.
Dans une expérience, le nouveau composé à base d’oxystérol a permis de nettement améliorer la vision chez des souris atteintes de cataracte, ce qui constitue « un grand pas en avant vers le traitement de cette condition extrêmement courante avec des médicaments plutôt qu’avec la chirurgie », estime l’auteure principale de l’étude, Barbara Pierscionek, vice-doyenne en recherche et innovation de la Faculté de santé, d’éducation, de médecine et de protection sociale de l’Université Anglia Ruskinsocial.
Surtout efficace sur des formes spécifiques de la maladie
Pour tester leur médicament, les chercheurs britanniques ont sélectionné 35 souris présentant des cataractes induites. 25 d’entre elles ont ensuite été traitées avec le composé à base d’oxystérol et les neuf autres n’ont reçu aucun traitement. Résultats : une amélioration des profils d’indice de réfraction (un paramètre optique essentiel pour maintenir une capacité de focalisation élevée) a été observée dans 61% des lentilles (ou cristallins) des souris. De plus, le degré d’opacité a été réduit chez 41% des souris vivantes.
Ces résultats montrent que le composé a amélioré les propriétés optiques des lentilles, en y réorganisant les protéines cristallines αA et αB (essentielles à la structure du cristallin et empêchant l’agglomération des protéines altérées). « Cette étude a montré les effets positifs d’un composé qui avait été proposé comme médicament anti-cataracte, mais jamais testé auparavant sur l’optique de la lentille », explique Pierscionek. « C’est la première recherche de ce genre au monde », ajoute-t-elle.
De plus, il y avait des différences marquées entre les lentilles atteintes des mêmes formes de cataracte et traitées avec le médicament et celles qui n’ont pas été traitées. Plus précisément, les améliorations se sont produites pour certaines formes de la maladie, tandis qu’aucune amélioration n’a été constatée pour certaines autres formes. Le médicament expérimental est peut-être ainsi destiné à des types spécifiques de cataracte, bien que les auteurs de l’étude n’aient pas encore précisé lesquels.