Une expérience sur des rats révèle que les cellules souches de tissu adipeux possèdent une capacité remarquable à réparer les fractures de la colonne vertébrale et à restaurer la solidité des os. Ces cellules possèdent notamment une structure particulière qui favoriserait leur capacité à réparer les tissus. Facile à prélever même chez les personnes âgées, elles pourraient ouvrir la voie à une alternative peu invasive pour le traitement des lésions dues à des maladies osseuses telles que l’ostéoporose.
Affectant environ 200 millions de personnes dans le monde, l’ostéoporose survient naturellement avec le vieillissement ou, dans certains cas, en raison d’une carence en nutriments. Elle se manifeste par une diminution de la densité osseuse et de la qualité du tissu osseux, qui devient plus poreux et plus fragile – ce qui augmente le risque de fracture. On estime que 9 millions de fractures par an sont liées à l’ostéoporose, un chiffre qui devrait augmenter dans les prochaines décennies en raison du vieillissement de la population.
Parmi les lésions ostéoporotiques les plus fréquentes figurent les fractures vertébrales par compression. Le tissu osseux cortical et spongieux, fin et fragile, devient plus poreux et s’affaisse sous son propre poids. Cela crée des défauts au niveau de la zone affectée même après réduction de la fracture, ce qui peut à nouveau conduire à un affaissement. Ces fractures nécessitent ainsi des soins prolongés et peuvent affecter considérablement la qualité de vie des patients.
Malgré les avancées en matière de réparation osseuse, d’importants défis subsistent, notamment l’échec des implants et une régénération osseuse qui n’est généralement pas optimale. Les cellules souches dérivées de tissu adipeux (CSDA) suscitent un intérêt croissant pour surmonter ces défis et faciliter la régénération des fractures réfractaires.
En effet, contrairement aux cellules souches mésenchymateuses osseuses (CSM-O) qui ont été précédemment explorées pour la régénération osseuse, les CSDA sont plus faciles à prélever en ne nécessitant qu’une anesthésie locale. Elles possèdent également un haut potentiel de culture même en étant prélevées chez des patients âgés avec une faible densité osseuse. Leur capacité à proliférer n’est notamment pas affectée par le vieillissement ou l’ostéoporose, ce qui n’est pas le cas des CSM-O.
Leur potentiel à réparer les fractures vertébrales ostéoporotiques est cependant peu exploré. Des chercheurs de l’Université métropolitaine d’Osaka, au Japon, ont évalué l’approche sur des modèles in vivo. « Bien que la chirurgie soit nécessaire dans les cas réfractaires [de fractures vertébrales ostéoporotiques], des difficultés telles que la perte de correction et la rupture d’implant persistent et il n’existe pas de méthode chirurgicale standardisée. Des améliorations du traitement chirurgical sont donc indispensables », expliquent les experts dans leur récente étude publiée dans la revue Bone & Joint Research.

Un agencement sphérique améliorant la régénération des tissus
Les implants osseux nécessaires à la réparation d’une fracture doivent à la fois être biocompatibles et disposer d’une résistance mécanique similaire à celle de l’os d’origine, tout en favorisant la formation de nouvelles cellules. Les CSDA seraient idéales pour cela, car elles sont connues pour améliorer la capacité de régénération tissulaire. Elles peuvent se différencier en différents types de cellules et sont organisées en sphères tridimensionnelles dites sphéroïdes – ce qui améliore leur capacité à réparer les tissus.
L’équipe de la nouvelle étude a avancé l’hypothèse selon laquelle l’orientation de ces sphéroïdes vers une différenciation en cellules ostéogéniques pourrait renforcer leur capacité à favoriser la guérison osseuse. Plus précisément, les chercheurs ont isolé des sphéroïdes de CSDA pour induire une différenciation en CSM-O. Les sphéroïdes CSM-O résultants ont ensuite été combinés avec du β-phosphate tricalcique, un matériau couramment utilisé en reconstruction osseuse.
Pour tester la combinaison, les chercheurs ont sélectionné 33 rats chez lesquels l’ostéoporose a été induite par ovariectomie. Des fractures ont été induites au niveau de leurs vertèbres L4 et L5. Les groupes témoins ont reçu soit des sphéroïdes non différenciés, soit du β-phosphate tricalcique seul. Le taux de régénération osseuse a été évalué par microtomographie (micro-CT), histologie et par des tests biomécaniques à quatre et huit semaines.



L’équipe a constaté que le groupe traité avec la combinaison de sphéroïdes ostéogéniques et de β-phosphate tricalcique présentait une masse osseuse, un score de régénération et une résistance mécanique nettement supérieurs à ceux du groupe témoin. Les analyses histologiques ont montré un renouvellement des tissus osseux, ainsi qu’une bonne intégration du β-phosphate tricalcique.
« Cette étude a révélé le potentiel des sphéroïdes de différenciation osseuse utilisant des cellules souches mésenchymateuses dérivées du tissu adipeux pour le développement de nouveaux traitements des fractures vertébrales », affirme Yuta Sawada, étudiant en médecine à l’Université métropolitaine d’Osaka et auteur principal de l’étude, dans un communiqué. « Comme les cellules sont obtenues à partir de tissu adipeux, le traitement est peu invasif pour l’organisme, ce qui garantit la sécurité du patient », a-t-il ajouté.
Une expression accrue des gènes liés à la formation et à la régénération osseuse était également observée chez les animaux traités. Cela suggère que le traitement stimule les processus de régénération naturels. D’après Shinji Takahashi, qui a dirigé l’équipe de l’Université métropolitaine d’Osaka : « cette méthode simple et efficace permet de traiter même les fractures complexes et peut accélérer la guérison. Cette technique devrait devenir un nouveau traitement contribuant à prolonger la vie en bonne santé des patients. »


