Utilisés pour les nouvelles technologies, les cristaux liquides intéressent beaucoup les chercheurs en ingénierie. Précédemment, une équipe de l’Université de Chicago avait réussi à contrôler les « défauts topologiques » de ces types de cristaux par lumière dirigée, et l’on sait maintenant qu’ils pourraient être utilisés pour des opérations de calcul logique. Une application utile en robotique douce, mais également en biologie synthétique.
Pas tout à fait solide ni liquide, un cristal liquide est un état de la matière qui possède les propriétés d’un liquide conventionnel et d’un solide cristallisé. Ces substances attirent toujours l’attention des spécialistes des matériaux car elles constituent la base des nouvelles technologies. On les retrouve notamment dans les écrans LCD.
Des chercheurs de la Pritzker School of Molecular Engineering de l’Université de Chicago viennent de leur trouver une utilité supplémentaire : effectuer des opérations logiques, ce qui ouvre la voie à une nouvelle façon d’effectuer des calculs. Les cristaux liquides pourraient ainsi être utilisés comme petits « ordinateurs » et dans le domaine de la robotique douce.
« Nous avons montré que l’on pouvait créer les éléments de base d’un circuit – portes, amplificateurs et conducteurs – avec des cristaux liquides, ce qui signifie que l’on devrait pouvoir les assembler pour réaliser des opérations plus complexes », détaille dans un communiqué le professeur Juan De Pablo, chercheur en ingénierie moléculaire à l’Université de Chicago et co-auteur de l’étude. « Ce n’est pas souvent que l’on est capable de voir une nouvelle façon de faire de l’informatique, et c’est une étape vraiment passionnante pour le domaine des matériaux actifs ».
Contrôler les défauts topologiques par lumière dirigée
Les cristaux liquides s’écoulent comme un liquide, mais leur structure moléculaire ressemble à un cristal ; à tel point que le réseau formé par les molécules est le plus souvent ordonné. Cependant, la structure peut également être « en mouvement » comme dans un liquide, et les points de désordre sont appelés « défauts topologiques ». Ils permettent aux cristaux liquides de couler, de se déplacer, et d’acquérir des propriétés optiques (comme le changement de couleur dans les écrans).
Il n’est pas nouveau que les défauts dans les structures moléculaires soient à la base d’applications intéressantes, comme c’est le cas des diamants imparfaits pour l’internet quantique. Dans le cas qui nous intéresse ici, « les défauts topologiques présentent de nombreuses caractéristiques des électrons dans un circuit », explique le professeur Rui Zhang, du département de physique de l’université des sciences et technologies de Hong Kong. Ils pourraient ainsi être utilisés pour transporter des informations, mais encore faut-il pouvoir contrôler leur comportement. « Normalement, si vous regardez au microscope une expérience avec un cristal liquide actif, vous verrez un chaos total : des défauts qui se déplacent dans tous les sens », déclare De Pablo.
L’année dernière, une équipe — dont faisaient partie les deux professeurs — avait réussi à contrôler le mouvement des défauts topologiques dans les cristaux liquides. En utilisant un faisceau de lumière dirigé vers des zones spécifiques, ils ont pu guider les défauts vers ces zones.
Des applications utiles en robotique douce et en biologie synthétique
Dans la nouvelle étude, les chercheurs ont montré par des simulations que la « technique de la lumière » permet aux défauts d’effectuer des opérations de calcul, tel un ordinateur. Mais les chercheurs estiment que les cristaux liquides seront davantage utilisés pour la robotique douce. Pour rappel, le corps des robots mous est constitué de matériaux malléables, leur permettant d’effectuer d’autres opérations par rapport aux robots à corps dur. En outre, ces robots mous pourraient donc effectuer des opérations mathématiques.
Les défauts topologiques des cristaux liquides pourraient aussi être utilisés pour déplacer des objets d’un endroit à un autre, à l’intérieur de minuscules dispositifs. « Par exemple, on pourrait peut-être exécuter des fonctions à l’intérieur d’une cellule synthétique », explique Zhang. Les scientifiques doivent maintenant confirmer les résultats trouvés par des expériences.