Des chercheurs observent pour la première fois « l’effet boomerang quantique »

effet boomerang quantique
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L’effet boomerang quantique a été prédit en 2019 par une équipe du CNRS. Il décrit le fait qu’après une impulsion initiale, les particules de certains matériaux reviennent généralement à leur position de départ. Cet effet théorique repose sur un phénomène appelé « localisation d’Anderson », qui entraîne l’absence de diffusion des ondes dans un milieu désordonné. Pour la première fois, une équipe de physiciens de l’Université de Californie rapporte avoir observé expérimentalement cet effet.

Le phénomène de la localisation d’Anderson a été mis en évidence en 1958. Le physicien américain P. W. Anderson montrait alors que dans des réseaux aléatoires, la diffusion d’ondes est censée avoir lieu via des sauts quantiques entre des sites localisés ; mais à des densités suffisamment faibles, aucune diffusion ne peut avoir lieu. Par exemple, dans un matériau composé d’atomes disposés de manière complètement désordonnée, les électrons se localisent : ils sont comme bloqués à une position bien précise et ne peuvent plus conduire l’électricité.

Ce phénomène s’applique à toute sorte d’ondes (électromagnétiques, acoustiques, quantiques, de spin, etc.) et peut apparaître dans les matériaux présentant des défauts structurels (atomes manquants, empilement défectueux, impuretés, etc.). C’est sur cette localisation que repose l’effet boomerang quantique : quelle que soit sa direction initiale, la diffusion ne pouvant se produire normalement, le paquet d’ondes revient à son point de départ et y demeure.

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Un effet dépendant de la symétrie temporelle

Le physicien David Weld et ses collègues de l’Université de Californie à Santa Barbara sont parvenus à observer expérimentalement cet effet, en analysant le comportement d’atomes de lithium ultra froids à la place des électrons. Ces atomes, initialement stationnaires, ont été soumis à de brèves impulsions laser ; les chercheurs ont alors pu observer qu’en moyenne, ils revenaient à leur état stationnaire initial.

À travers cette expérience, l’équipe a également pu expliciter le rôle crucial des symétries de l’état initial. En effet, Weld et ses collègues sont parvenus à déterminer les conditions nécessaires pour éliminer le phénomène. En théorie, pour se produire, l’effet boomerang nécessite « une symétrie par renversement du temps » (ou symétrie T) — en d’autres termes les particules doivent adopter, lorsque le temps avance, le même comportement qu’elles afficheraient si le temps devait reculer. Or, lorsqu’ils ont modifié le moment de la première impulsion laser de manière à ce que le motif de l’impulsion soit décalé, la symétrie temporelle a été brisée et l’effet boomerang a disparu.

Les résultats obtenus sont en parfait accord avec les calculs théoriques énoncés précédemment. « En soulignant le rôle clé de la localisation, nous observons que lorsque le coup de pied stochastique détruit la localisation dynamique, l’effet boomerang quantique disparaît également. […] Ces résultats présentent une sonde expérimentale unique de la nature quantique sous-jacente de la matière localisée d’Anderson », écrivent les chercheurs dans leur article publié dans la revue Physical Review X.

Une combinaison qui favorise le retour à l’état initial

Cet effet, comme de nombreux autres phénomènes étranges, résulte du principe de dualité onde-corpuscule sur lequel repose la physique quantique. Tout système quantique peut être décrit par une fonction d’onde représentant la densité de probabilité d’une variable mesurable (notamment la position d’une particule). Ainsi, toutes les particules quantiques peuvent se comporter comme des ondes, qui peuvent se combiner à loisir.

Dans le cas de l’effet boomerang, ces ondes se combinent de manière à favoriser la trajectoire qui ramène la particule à son point d’origine (et éliminent, au passage, les autres possibilités). « Il s’agit d’un effet purement quantique, il n’a donc pas d’équivalent en physique classique », explique le physicien Dominique Delande du CNRS et du laboratoire Kastler Brossel à Paris, qui a prédit l’effet avec ses collègues en 2019. « Nous montrons numériquement que le boomerang quantique est une véritable signature de la localisation d’Anderson : il existe si et seulement si la dynamique quantique est localisée », écrivaient-ils à l’époque.

Étrangement, malgré le rôle central joué par la localisation d’Anderson — mise en lumière il y a plus de 60 ans — dans la compréhension moderne de la matière condensée, l’effet boomerang quantique, une caractéristique essentielle de l’état localisé, n’a été prédit théoriquement que récemment, souligne l’équipe. « Personne n’y a pensé, apparemment, probablement parce que c’est très contre-intuitif », explique Delande à ScienceNews.

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