Le célèbre chien robot de Boston Dynamics « Spot » n’est plus à présenter, un bijou technologique dont la société conceptrice vient d’ailleurs d’être rachetée par Hyundai. Actuellement, des chercheurs travaillent sur une nouvelle version du robot, en l’équipant de capteurs spéciaux et d’une intelligence artificielle qui lui permettra d’évoluer de façon autonome dans des environnements irréguliers et dangereux, tels que les grottes martiennes.
Lors d’une présentation le 14 décembre 2020 à l’occasion de la réunion annuelle de l’Union géophysique américaine (AGU), qui s’est tenue en ligne cette année, des chercheurs du JPL-Caltech de la NASA ont présenté leur « chien martien », une version spécialement conçue de Spot qui lui permettra de se déplacer sur la planète rouge comme jamais aucun rover ne l’a fait. En effet, les célèbres rovers Spirit, Opportunity, Curiosity et le récent Perseverance sont de véritables réussites, mais selon le terrain, ils restent tous limités par leur mode de déplacement sur roues.
L’agilité et l’intelligence artificielle des nouveaux chiens robots sont ici couplées à des capteurs qui leur permettent d’éviter facilement les obstacles, de choisir entre plusieurs chemins et de construire des cartes virtuelles des tunnels et cavernes martiens souterrains pour les opérateurs sur Terre, ont déclaré les scientifiques durant l’AGU.
Une façon nouvelle d’explorer la planète
Les rovers martiens traditionnels se limitent pour la plupart à des surfaces planes, mais de nombreuses régions martiennes scientifiquement intéressantes ne sont accessibles qu’en traversant des terrains très accidentés ou en descendant sous terre. Les chiens robots sont bien adaptés à de tels défis : même s’ils tombent, ils peuvent facilement se relever. Le projet BRAILLE (Biologic and Resource Analog Investigations in Low Light Environments) de la NASA a pour but d’étudier et de quantifier la diversité géologique et biologique dans les grottes martiennes (également appelées « tunnels de lave »), tout en développant des stratégies pour leur exploration dans une multitude de scénarios. Le robot Spot semble donc être un candidat de choix.
« Tomber ne signifie pas l’échec de la mission », ont déclaré les scientifiques lors de la présentation. « Grâce à des algorithmes de récupération, le robot peut se relever d’une multitude de chutes ». Un chien martien serait également environ 12 fois plus léger que les rovers actuels et serait capable de voyager beaucoup plus vite, atteignant des vitesses de marche normale de 5 km/h lors des tests. Pour mettre cela en perspective, le rover Curiosity roule sur la surface martienne à environ 0,14 km/h, indiquent les chercheurs.
Sur Mars, nous savons que les grottes pourraient offrir un abri aux futures colonies humaines, permettant une protection naturelle contre les rayons UV mortels, le froid extrême et les tempêtes de poussière intenses qui peuvent durer des semaines. Ces dernières sont parfois assez grandes pour être repérées par les télescopes terrestres, explique la NASA. Les grottes peuvent également abriter des preuves de vie provenant du lointain passé de Mars, ou même fournir un habitat pour des organismes vivant actuellement profondément sous terre.
Des robots sur pattes comme Spot, capables d’évoluer autour des rochers, de s’abaisser dans les grottes et choisir un chemin de façon autonome — tout en recueillant des mesures et en dressant une carte de ce qu’ils « voient » — pourraient offrir aux scientifiques de nouvelles possibilités de détecter des signes de vie. Le chien robot martien autonome, baptisé « Au-Spot », est donc une version modifiée de Spot dans un but d’exploration de ces environnements. Plus de 60 scientifiques et ingénieurs de l’équipe de la Collaborative SubTerranean Autonomous Resilient Robots (CoSTAR) ont équipé Au-Spot de capteurs et de logiciels en réseau pour l’aider à scanner, naviguer et cartographier son environnement de manière sûre et autonome.
Système Lidar et intelligence artificielle
Au-Spot traite les données reçues d’un système Lidar (télédétection par impulsions laser), de capteurs visuels, thermiques et de mouvement, pour créer des cartes 3D de son environnement. Il utilise également l’IA pour comprendre quelles structures éviter et pour identifier les objets pouvant présenter un intérêt scientifique, tandis qu’un module de communication permet au robot de transférer des données à la surface pendant qu’il explore le sous-sol.
Actuellement, les membres de l’équipe CoSTAR testent Au-Spot dans toute une série de courses d’obstacles, en le faisant traverser des tunnels et des couloirs, monter des escaliers et des rampes, et dans des lieux extérieurs qui imitent les paysages martiens, comme les tunnels de lave en Californie du Nord. Ces essais montrent que le robot chien est, conformément aux attentes, capable de se déplacer autour des rochers et cartographier les grottes profondes.
« Ces possibilités de déplacement pourraient un jour permettre de réaliser des missions scientifiques révolutionnaires à la surface et dans le sous-sol martien, repoussant ainsi les limites de la capacité de la NASA à explorer des sites traditionnellement inaccessibles », ont déclaré les chercheurs à l’AGU.