Les produits de vapotage sont des dispositifs électroniques conçus pour simuler le fait de fumer de véritables cigarettes. La principale différence étant que ces dispositifs utilisent un liquide, qui une fois chauffé, produit de la vapeur (et non du monoxyde de carbone). Ces liquides peuvent contenir différents taux de nicotine, voire un taux nul. En cela, les cigarettes électroniques pourraient constituer une aide intéressante au sevrage tabagique. Une récente étude menée au Royaume-Uni confirme ce potentiel.
En matière d’e-cigarette, ou cigarette électronique, les avis sont souvent partagés, y compris au niveau des autorités sanitaires. En novembre dernier, le Haut conseil de la santé publique a d’ailleurs actualisé son avis relatif aux bénéfices-risques de ce dispositif : ce rapport confirme que la cigarette électronique peut être considérée comme une aide pour arrêter ou réduire la consommation de tabac des fumeurs, mais parallèlement, il souligne qu’elle peut également constituer une porte d’entrée vers le tabagisme — notamment chez les jeunes consommateurs, séduits par l’objet et tant d’arômes attrayants.
Même constat de la part de l’Organisation mondiale de la santé, qui s’inquiète du fait que les enfants qui recourent à ces produits sont jusqu’à trois fois plus susceptibles de consommer des produits du tabac par la suite. L’Institut national du cancer rappelle toutefois que les principales substances cancérigènes ou responsables de maladies cardiovasculaires liées au tabac « n’existent pas à des taux significatifs dans les systèmes électroniques ». S’il existe encore des incertitudes sur les effets à long terme des e-cigarettes sur la santé, leur usage en tant qu’aide au sevrage semble néanmoins porter ses fruits, en particulier chez les femmes enceintes.
Deux fois plus efficaces que les patchs de nicotine chez la femme enceinte
Il est couramment proposé aux femmes enceintes fumeuses des patchs nicotiniques pour les aider à arrêter de fumer — et ainsi préserver la santé de l’enfant qu’elles portent. Fumer pendant la grossesse augmente en effet le risque de fausse couche, de naissance prématurée et de mort subite du nourrisson, entre autres conséquences graves. Ces patchs présentent toutefois une efficacité limitée sur cette catégorie de personnes.
Deux médicaments ont par ailleurs déjà été testés sur des femmes enceintes qui fument, dans le cadre de plusieurs essais contrôlés par placebo. L’un, connu sous le nom de thérapie de remplacement de la nicotine (ou TRN) a lui aussi montré des effets limités (la nicotine étant métabolisée plus rapidement chez les femmes enceintes, il se pourrait que la dose standard de TRN ait été trop faible), tandis que l’autre (le bupropion) n’a eu aucun effet du tout.
Afin d’identifier une meilleure approche pour aider ces femmes, des chercheurs du Wolfson Institute of Population Health de Londres ont entrepris d’évaluer l’efficacité des e-cigarettes en tant qu’aide au sevrage, comparativement aux patchs à la nicotine. Selon l’équipe, les e-cigarettes présentent plusieurs avantages par rapport aux aides au sevrage traditionnelles : elles permettent de moduler l’apport en nicotine, de sélectionner un arôme agréable et par conséquent, de conserver un certain plaisir (apporté tant par l’arôme choisi que par la gestuelle).
Pour mener à bien leur étude, les chercheurs ont recruté 1140 fumeuses enceintes dans 24 sites hospitaliers anglais et écossais. Les participantes fumaient 10 cigarettes par jour et étaient enceintes de 15,7 semaines en moyenne. Cette cohorte a été divisée en deux groupes : l’un a bénéficié de patchs de nicotine, l’autre a utilisé des cigarettes électroniques.
Une option recommandée en cas de sevrage difficile
En premier lieu, les chercheurs ont constaté que les taux d’abstinence prolongée (évalués grâce à des tests salivaires effectués à la fin de la grossesse) n’étaient pas significativement différents d’un groupe à l’autre. Mais il se trouve que certaines participantes du groupe patchs avaient finalement arrêté de fumer à l’aide d’une e-cigarette au cours de l’étude ! Finalement, après correction, les taux de sevrage étaient de 6,8% pour le groupe e-cigarettes, et de 3,6% pour le groupe « patchs ». Quant à l’abstinence tabagique autodéclarée en fin de grossesse, elle était de 19,8% dans le groupe e-cigarettes contre 9,7% dans le groupe patchs.
Par ailleurs, les résultats à la naissance et les effets indésirables se sont avérés largement similaires entre les deux groupes, à l’exception de l’insuffisance pondérale à la naissance (< 2,5 kg), qui était moins fréquente dans le groupe affecté aux cigarettes électroniques (9,8%) que dans l’autre groupe (14,8%). « Compte tenu des questions qui subsistent sur les risques de la nicotine pendant la grossesse, il est préférable d’arrêter de fumer sans utiliser de produits contenant de la nicotine plutôt que de passer à de tels produits », soulignent les chercheurs. Mais s’il s’agit de choisir entre e-cigarettes ou poursuite du tabagisme, les e-cigarettes sont l’option recommandée, ajoutent-ils.
À noter qu’une revue Cochrane, qui a passé au crible 61 études sur l’efficacité des cigarettes électroniques en tant que dispositif de sevrage, a confirmé qu’elles peuvent aider les fumeurs à arrêter de fumer. « Il y avait des données probantes de certitude modérée, limitées par l’imprécision, que les taux d’abandon étaient plus élevés chez les personnes ayant utilisé une e-cigarette », écrivent les auteurs. En outre, aucun effet secondaire grave n’a été associé à leur utilisation (les irritations de la gorge et de la bouche étaient les effets secondaires les plus fréquemment signalés à court et moyen terme).
Quant à savoir si ces dispositifs pourraient servir de « passerelle » au tabagisme pour les non-fumeurs — en particulier parmi les enfants et adolescents – les premières données de la cohorte Constances sur le sujet se veulent rassurantes : elles révèlent que l’usage de la cigarette électronique chez les non-fumeurs est « très rare » (11 sujets sur 8042). « L’évolution sur un an montre qu’aucun usager exclusif de cigarette électronique n’est devenu fumeur un an après », conclut le rapport, ce qui suggère que l’e-cigarette ne favorise pas le passage au tabac, mais est plutôt largement utilisée pour arrêter de fumer.