Parmi les défis auxquels la science moderne est confrontée, l’origine de la vie sur Terre est certainement l’un des plus grands. La question est de savoir comment, à partir d’éléments de base et de réactions biochimiques, les premières cellules sont apparues et ont ensuite évolué pour former des organismes complexes. Récemment, des biochimistes ont identifié une molécule particulière qui pourrait expliquer l’émergence et l’évolution des premières protocellules sur la Terre primitive.
Une nouvelle étude dirigée par Ramanarayanan Krishnamurthy, biologiste au Scripps Research, et Sheref Mansy de l’Université de Trento, offre une explication sur la façon dont des « protocellules » auraient pu émerger sur la Terre primitive, pour finalement aboutir aux cellules que nous connaissons aujourd’hui. Leurs travaux, publiés dans la revue SMALL, suggèrent que des molécules appelées cyclophospholipides pourraient avoir été l’ingrédient nécessaire pour que les protocellules forment des structures internes complexes appelées vésicules, déclenchant probablement le processus d’évolution.
« Les protocellules auraient été les ancêtres des cellules d’aujourd’hui, si vous voulez » déclare Krishnamurthy. « Elles ne possédaient pas toutes les fonctionnalités des cellules modernes, mais elles avaient la structure de précurseurs, jetant les bases pour la suite de l’évolution cellulaire ».
Les protocellules : des précurseurs cellulaires à l’origine de l’évolution des cellules
Les cellules actuelles sont le siège d’un grand nombre de molécules et de réactions biochimiques différentes, mais les protocellules auraient été beaucoup plus simples, comme des vésicules. L’une des caractéristiques de ces vésicules était les zones creuses internes appelées lumens, des espaces capables de capturer des molécules de plus en plus grandes, nécessaires pour la formation d’ARN et la fabrication de protéines, éléments de base nécessaires à la vie.
Finalement, grâce aux vésicules, les protocellules auraient pu être divisées en générations plus avancées de protocellule qui captaient les nutriments de l’environnement pour croître et se diviser à nouveau.
La nouvelle étude offre une solution simple à l’énigme de la façon dont les vésicules stables auraient pu se développer. Dans le passé, les chercheurs ont essayé d’utiliser des molécules appelées acides gras pour construire des vésicules, mais ces vésicules réagissaient aux ions métalliques et se désagrégeaient.
« Les vésicules d’acides gras ne survivent tout simplement pas à la plupart des conditions présentes sur Terre, et certainement pas aux conditions nécessaires pour que des molécules de type biologique puissent s’activer » déclare Mansy. « Cet écart entre plausibilité et stabilité nous a rendu la tâche difficile pour imaginer comment des protocellules auraient pu émerger ».
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Les cyclophospholipides : des molécules nécessaires à la stabilité et la complexification des protocellules
Les chercheurs n’avaient jamais essayé auparavant d’utiliser des cyclophospholipides pour former des vésicules, mais en 2018, le laboratoire de Krishnamurthy a publié une étude dans la revue Nature Chemistry montrant que les conditions prévalant sur la Terre primitive auraient pu conduire à des cyclophospholipides.
Après avoir démontré que les cyclophospholipides auraient pu exister au tout début de la vie, les scientifiques ont cherché à savoir si les molécules pourraient aider les protocellules à construire des vésicules. « Nous ne savions pas si elles seraient suffisamment stables pour être utiles ou fonctionnelles » déclare Krishnamurthy.
Il s’est avéré que les nouvelles vésicules étaient étonnamment stables. Elles ont résisté à une gamme plus large de conditions physiques et chimiques que les vésicules d’acides gras, y compris les changements de pH. En fait, les nouvelles découvertes suggèrent que les cyclophospholipides pourraient être la base idéale pour les vésicules qui ont permis l’évolution des protocellules.
« Les travaux du professeur Krishnamurthy sur la phosphorylation prébiotique nous ont amenés à explorer un nouveau type de lipide, qui pourrait nous aider à au moins comprendre les types de propriétés chimiques nécessaires pour construire une protocellule prébiotique robuste » déclare Mansy.