Le ténia (Taenia saginata ou Taenia solium) est un plathelminthe (ver plat) rubané et segmenté de la classe des Cestodes. Plus connu sous le nom de « ver solitaire », c’est un parasite du tube digestif des vertébrés, et notamment de l’Homme. Lorsqu’il est dans son hôte, le ténia perd quotidiennement des centaines de segments de son corps (éliminés par l’organisme de l’hôte) puis se régénère totalement, selon un cycle. Jusqu’à présent, le mécanisme de régénération des ténias était mal connu. Mais récemment, des biologistes ont identifié la source de cette régénération. Une découverte qui pourrait aider à développer des stratégies thérapeutiques plus efficaces.
Les biologistes ont identifié les cellules souches qui permettent aux ténias de se régénérer et ont découvert que leur localisation à proximité de la tête était essentielle, selon une nouvelle étude publiée dans la revue eLife. Ces nouveaux indices peuvent aider à expliquer comment les ténias se développent chez leurs hôtes humains et animaux et pourraient être utiles pour trouver de nouvelles façons de cibler ces parasites.
Les ténias sont connus pour leur grande longueur et leur capacité à faire croître des milliers de segments, appelés proglottis. Au cours de leur cycle de vie normal, ils perdent de grandes parties de leur corps et se régénèrent ensuite afin de conserver une certaine longueur. Cependant, les biologistes n’ont jamais réussi à identifier clairement le mécanisme sous-tendant cette régénération.
« Nous savons que la régénération du ver solitaire implique probablement des cellules souches, mais jusqu’à présent, leur potentiel de régénération n’a jamais été étudié de manière exhaustive » explique l’auteur principal Tania Rozario de l’Institut de recherche Morgridge de l’Université du Wisconsin. « Dans cette étude, nous avons exploré quelles parties du ténia sont capables de se régénérer et comment cette régénération est conduite par les cellules souches ».
Des cellules souches globalement réparties
L’équipe a utilisé une boîte à outils moléculaires pour répondre à ces questions. Tout d’abord, les chercheurs ont retiré certains fragments des vers, puis les ont cultivés en laboratoire pour déterminer quelles régions du corps peuvent se régénérer. Cela a montré que ni la tête ni le corps postérieur ne peuvent se régénérer et que la partie du cou est nécessaire. Étonnamment, séparer la tête du cou n’empêchait pas le ténia de continuer à se développer, mais la régénération de nouveaux segments était inhibée.
Ce n’est que lorsque la tête et le cou du ténia ont été laissés intacts que le ténia pouvait se régénérer en continu. Ensuite, ils ont vérifié si le cou contenait des cellules souches spéciales qui permettent aux ténias de se régénérer. Ils ont isolé les cellules se multipliant rapidement dans les vers, puis ont étudié leur emplacement dans le corps. Ils ont découvert que ces cellules existaient dans tout le corps et pas seulement dans le cou. D’autres études ont également révélé l’absence de cellules souches uniques au cou.
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Le cou : une partie nécessaire pour activer la régénération
Ces découvertes ont conduit l’équipe à supposer que les cellules souches se trouvent partout dans le ver solitaire, mais que des signaux opérant uniquement dans le cou sont nécessaires pour les activer. Pour tester cela, ils ont injecté à des ténias irradiés (destinés à mourir) des cellules de donneur provenant de différentes parties d’un ver en bonne santé. Ces cellules donneuses ont sauvé les vers et leur ont permis de se régénérer. Lorsque les cellules souches ont été retirées des cellules du donneur, cette récupération n’a pas pu avoir lieu.
Cela prouve que les cellules à croissance rapide identifiées dans l’étude sont des cellules souches authentiques qui peuvent s’établir et se régénérer au sein d’un autre ver hôte. De plus, les cellules souches de n’importe quelle partie du corps peuvent sauver les vers blessés, ce qui suggère que des facteurs externes, plutôt que des caractéristiques des cellules souches du cou, permettent la régénération.
« Il semble que la localisation chez les ténias compte énormément. Les environnements de la tête et du cou fournissent des indices qui contrôlent la capacité des cellules souches à régénérer des segments, même si les cellules souches impliquées dans ce processus ne se limitent à aucune de ces zones du corps » conclut Phillip Newmark, chercheur du Howard Hughes Medical Institute.