Selon le modèle cosmologique standard, au moment du Big Bang, matière et antimatière sont créées en proportions identiques. Elles auraient donc dû s’annihiler, laissant un univers vide. Cependant, aujourd’hui, c’est un univers composé majoritairement de matière que nous observons. Ce défaut d’antimatière porte le nom d’asymétrie matière-antimatière et constitue l’un des thèmes de recherche les plus actifs en physique des particules. Plusieurs hypothèses ont été avancées : l’une d’elles suggère que les neutrinos ont joué un rôle clé dans ce mécanisme. Et récemment, des physiciens ont proposé un moyen de tester cette hypothèse.
L’hypothèse des neutrinos propose qu’environ un million d’années après le Big Bang, l’Univers s’est refroidi et a subi une transition de phase. Ce changement de phase a entraîné les neutrinos à se désintégrer en plus de matière que d’antimatière, impliquant une violation de la symétrie CP.
Mais selon Jeff Dror, auteur principal de la nouvelle étude et chercheur postdoctoral à l’université de Californie à Berkeley, il n’y a aucun moyen simple de sonder cette théorie et de comprendre si ce processus s’est réellement produit dans l’Univers primitif. Les résultats de l’étude ont été publiés dans la revue Physical Review Letters.
Une transition de phase à l’origine de la création de cordes cosmiques
Mais Dror et son équipe, à travers des modèles théoriques et des calculs, ont trouvé un moyen de voir cette transition de phase. Ils ont proposé que le changement aurait créé des fils d’énergie extrêmement longs et minces appelés cordes cosmiques, et qui seraient encore présents dans l’Univers aujourd’hui.
Les cordes cosmiques sont des défauts topologiques. Les défauts topologiques sont des structures hypothétiques présumées stables qui se seraient formées dans les premiers instants de l’Univers.
Les théories impliquant la formation de défauts topologiques prédisent qu’ils seraient apparus à l’issue de la période inflationnaire. Plus précisément, les défauts topologiques sont réputés s’être formés lors des différentes transitions de phase de l’Univers primitif.
Dans le Modèle Standard, ces transitions de phases se sont accompagnées de différentes brisures spontanées de symétries. Les cordes cosmiques sont donc apparues lorsque, à l’issue de la période inflationnaire, des symétries cylindriques et axiales se sont brisées.
Ce sont des défauts topologiques unidimensionnels de forme linéaire. Le nombre de cordes cosmiques dans l’univers ne peut pas être déterminé avec certitude, cependant, les calculs de Kibble indiquent qu’il y aurait approximativement une corde cosmique par volume de Hubble, soit une corde cosmique toutes les 1031 années-lumière cubes.
Cordes cosmiques : des sources potentielles d’ondes gravitationnelles
Dror et son équipe suggèrent que ces cordes cosmiques seraient très probablement à l’origine d’ondes gravitationnelles. Les ondes gravitationnelles les plus intenses se produisent lorsqu’une supernova émerge ; lorsque deux étoiles massives tournent l’une autour de l’autre ; ou lorsque deux trous noirs fusionnent. Mais les ondes gravitationnelles potentielles causées par des cordes cosmiques seraient beaucoup plus faibles que celles détectées jusqu’à maintenant.
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Cependant, lorsque l’équipe a modélisé cette transition de phase hypothétique dans diverses conditions de température, qui auraient pu se produire pendant cette transition de phase, ils ont fait une découverte encourageante : dans tous les cas, les cordes cosmiques créeraient des ondes gravitationnelles détectables par de futurs instruments, tels que le Laser Interferometer Space Antenna (LISA) de la NASA, Le Big Bang Observer de l’ESA et le Deci-hertz Interferometer Gravitational Wave Observatory (DECIGO) de la JAXA.
« Si ces cordes sont produites à des échelles d’énergie suffisamment élevées, elles peuvent en effet générer des ondes gravitationnelles qui peuvent être détectées par les futurs observatoires », conclut Tanmay Vachaspati, physicien théoricien à l’Arizona State University.