Cortical Labs dévoile le premier bio-ordinateur fonctionnel au monde, fusionnant neurones humains et silicium

Il sera possible d’y accéder à distance via le cloud.

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| Cortical Labs
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Cortical Labs, une entreprise australienne de biotechnologie, lance le premier ordinateur biologique fonctionnel au monde, combinant des processeurs en silicium avec des neurones humains. Baptisé CL1, le dispositif offre un tout nouveau genre d’intelligence informatique plus dynamique et plus évolutive que l’IA conventionnelle, tout en étant plus durable et à terme plus économe en énergie. Les premiers modèles seront commercialisés dès cette année et seront également disponibles pour une utilisation à distance via le cloud.

Les interfaces cerveau sur puce (ou intelligence biologique synthétique – SBI) sont un concept assez récent consistant à cultiver des neurones sur des puces en silicium, traditionnellement utilisées en électronique. Leur objectif est de fournir des interfaces bioniques disposant de la flexibilité et de l’évolutivité propres aux systèmes nerveux biologiques.

L’un des premiers concepts de ce type a été développé par Cortical Labs dans le cadre du projet DishBrain. Le dispositif consistait en une puce sur laquelle on a cultivé 800 000 neurones humains et murins placés au sein d’un environnement simulé. Après avoir effectué des cycles d’apprentissage par renforcement, le dispositif est parvenu à jouer au jeu d’arcade Pong en seulement 5 minutes.

La prochaine étape consistait à étendre le système à un véritable bio-ordinateur fonctionnel. « Nous avons connu une série de percées décisives ces dernières années grâce auxquelles des cultures [de neurones] ont été intégrées dans un monde de jeu simulé. Cependant, notre mission à long terme a été de démocratiser cette technologie, en la rendant accessible aux chercheurs sans matériel ni logiciel spécialisés. Le CL1 est la concrétisation de cette mission », explique Hon Weng Chong, fondateur et PDG de Cortical Labs, au New Atlas.

Lancé officiellement à Barcelone dimanche dernier, le CL1 constituerait le premier ordinateur biologique véritablement fonctionnel et disposant d’une évolutivité constante. Il surpasserait largement les processeurs d’IA utilisés pour les grands modèles de langage en matière de vitesse et de flexibilité d’apprentissage.

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Le CL1 est un grand boîtier contenant tous les systèmes de survie nécessaires aux cellules cérébrales humaines, qui interagissent avec les puces. © Cortical Labs

Un dispositif simple offrant un degré de contrôle élevé

En 2022, l’équipe de Weng Chong a démontré que les cellules souches pluripotentes induites humaines et murines pouvaient être stimulées électrophysiologiquement lorsqu’elles étaient intégrées à des réseaux multiélectrodes à haute densité. L’ensemble peut spontanément développer des voies d’échanges d’informations autonomes et hautement efficaces. Les chercheurs ont découvert que les neurones priorisaient les voies de connexion prévisibles et économes en énergie.

Cependant, les puces utilisées présentaient certaines limites. Elles étaient non seulement opaques et ne permettaient pas de voir les cellules établir des connexions, mais il était également impossible d’extraire la charge ou de l’équilibrer. Autrement dit, une accumulation de charge se produit au niveau des zones stimulées pendant de longues périodes, ce qui finit par endommager les cellules.

Le CL1 est un dispositif relativement simple permettant d’optimiser la connexion électrodes-neurones et offrant plus de stabilité de charge. « Lorsque vous introduisez deux microampères de courant, vous pouvez extraire deux microampères également. Et vous pouvez ainsi le maintenir stable plus longtemps », explique Brett Kagan, directeur scientifique de l’entreprise.

Pour ce faire, les neurones sont placés au sein d’un réseau de 59 électrodes planaires essentiellement composées de métal et de verre. Selon les chercheurs, cela offre un degré de contrôle nettement plus élevé. L’ensemble est ensuite placé à l’intérieur d’une unité de survie rectangulaire connectée à un système de logiciel pour une exploitation en temps réel.

Le dispositif comprend également un système de filtration des ondes électriques, un espace de stockage de médias, un mélange gazeux et des pompes maintenant l’ensemble en circulation, ainsi qu’un système de contrôle des températures. Chaque unité CL1 dispose de 30 interfaces cerveau sur puce et ne consomme qu’environ 850 à 1 000 watts d’énergie.

Les bio-ordinateurs sont également entièrement programmables et ne nécessitent pas d’ordinateurs externes pour fonctionner. Lors d’observations au microscope, les réseaux de neurones ont démontré un haut niveau de complexité et ont formé en temps réel des connexions entre les électrodes.

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Les neurones humains, visibles sur la puce en silicium, se connectent entre eux parmi un ensemble d’électrodes d’entrée/sortie. © Cortical Labs

Disponible à distance via le cloud

Les véritables performances du CL1 ainsi que son potentiel d’évolutivité ne seront visibles qu’une fois entre les mains des utilisateurs, précisent les chercheurs. Les premiers modèles seront disponibles avant la fin de cette année pour un prix de départ de 35 000 dollars (contre environ 85 000 dollars pour les autres dispositifs qui s’en rapprochent).

Par ailleurs, Cortical Labs propose une offre de type « Wetware-as-a-Service » (WaaS). Cela signifie que les clients qui ne peuvent pas acheter directement le bio-ordinateur peuvent acheter à la place du temps d’utilisation en y accédant à distance via le cloud. « Cette plateforme permettra aux millions de chercheurs, d’innovateurs et de grands penseurs du monde entier d’exploiter pleinement le potentiel du CL1 pour obtenir des résultats concrets », affirme Weng Chong. « Nous leur fournirons la plateforme et le soutien nécessaires pour investir dans la recherche et le développement et favoriser de nouvelles avancées et recherches ».

En effet, les technologies comme le CL1 pourraient transformer de nombreux domaines, allant de la découverte de médicaments à la modélisation des maladies. Elles permettraient de réduire les essais sur les animaux et de répondre à certaines des plus grandes énigmes de la biologie, telles que le « cerveau minimal viable » – un concept désignant le seuil minimal de complexité nécessaire à un réseau neuronal pour présenter des fonctions cognitives élémentaires.

En outre, alors que ce type de technologie se heurte généralement à d’importants défis en matière d’éthique, Cortical Labs assure que CL1 est encadré par des réglementations bioéthiques strictes assurant son utilisation au plus grand nombre de chercheurs.

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