Depuis le début de la pandémie et des premiers cas de COVID-19, la question de l’immunité se pose au sein de la communauté scientifique. Au cours des derniers mois, de nombreuses études se sont penchées sur le sujet et plusieurs d’entre elles ont révélé qu’une immunité était au mieux incertaine, au pire très peu probable, notamment au regard de la dynamique immunitaire concernant les autres coronavirus. Cependant, une analyse récente menée sur plus de 180 patients rétablis de la COVID-19 a montré la persistance de cellules immunitaires dirigées contre le virus SARS-CoV-2 plusieurs mois après l’infection. Ces nouveaux résultats, s’ils venaient à être confirmés, conforteraient l’efficacité de la vaccination dans la création d’une couverture immunitaire suffisante à court terme pour endiguer la pandémie.
Les patients atteints de COVID-19 qui se sont rétablis ont toujours une immunité solide contre le coronavirus huit mois après l’infection, selon une nouvelle étude publiée dans la revue Science. Ce résultat est un signe encourageant que les auteurs interprètent comme signifiant que l’immunité au virus dure probablement plusieurs années et devrait atténuer les craintes selon lesquelles le vaccin anti-COVID-19 pourrait nécessiter des injections de rappel répétées pour se protéger contre la maladie et enfin maîtriser la pandémie.
« Au départ, on craignait que ce virus n’induise pas beaucoup de mémoire immunitaire. Au lieu de cela, la mémoire immunitaire semble assez bonne », explique Shane Crotty, chercheur à l’Institut La Jolla d’immunologie. L’étude contraste avec les résultats antérieurs qui suggéraient que l’immunité à la COVID-19 pourrait être de courte durée, exposant des millions de personnes déjà rétablies à un risque de réinfection. Cette situation n’aurait pas été une surprise totale, car l’infection par d’autres coronavirus génère des anticorps qui disparaissent assez rapidement.
Mais cette nouvelle étude suggère que la réinfection ne devrait être un problème que pour un très petit pourcentage de personnes qui ont développé une immunité — que ce soit par une infection initiale ou par vaccination. Les résultats montrent qu’un petit nombre de personnes rétablies ne développent pas d’immunité durable. Cependant, la vaccination devrait compenser ce problème en garantissant la couverture immunitaire à l’ensemble de la population.
La persistance d’une réponse immunitaire après l’infection
L’équipe a étudié des échantillons de sang de 185 hommes et femmes qui s’étaient rétablis de la COVID-19 — la plupart d’une infection bénigne, bien que 7% aient été hospitalisés. Chaque personne a fourni au moins un échantillon de sang entre six jours et huit mois après ses premiers symptômes, et 43 des échantillons ont été prélevés après six mois. Les chercheurs ont mesuré les niveaux de plusieurs agents immunologiques qui agissent ensemble pour empêcher la réinfection : les anticorps (qui marquent un agent pathogène en vue de sa destruction par le système immunitaire ou neutralisent son activité), les cellules B (qui produisent des anticorps) et les cellules T (qui tuent les cellules infectées).
Les chercheurs ont découvert que les anticorps diminuaient modérément après huit mois, bien que les niveaux variaient énormément entre les individus. Mais le nombre de lymphocytes T n’a diminué que modestement, et le nombre de lymphocytes B est resté stable et a parfois augmenté de manière inexplicable. Cela signifie que malgré la diminution des anticorps à écoulement libre, les composants qui peuvent redémarrer la production d’anticorps et coordonner une attaque contre le coronavirus restent à des niveaux assez élevés. Crotty ajoute que les mêmes mécanismes qui conduisent à la mémoire immunitaire après l’infection forment également la base de l’immunité après la vaccination, de sorte que les mêmes tendances devraient également s’appliquer aux personnes vaccinées.
Des résultats encourageants qui devront être confirmés
Et bien que l’immunité contre d’autres coronavirus ait été moins persistante, des études se sont penchées également sur les personnes qui se sont rétablies du SARS-CoV du SRAS, un cousin proche du coronavirus SARS-CoV-2. Une étude publiée en août a montré que les cellules T spécifiques au SRAS peuvent rester dans le sang pendant au moins 17 ans, renforçant l’espoir que l’immunité à la COVID-19 puisse durer des décennies.
La nouvelle étude n’est cependant pas parfaite. Il aurait été préférable de prélever plusieurs échantillons de sang de chaque participant. « L’immunité varie d’une personne à l’autre, et les individus rares dont la mémoire immunitaire est faible peuvent encore être susceptibles d’être réinfectés », prévient Crotty. Et nous ne pouvons pas tirer de conclusions définitives sur l’immunité contre la COVID-19 avant que des années ne se soient écoulées — il est tout simplement trop tôt. Néanmoins, ce dernier résultat est une bonne indication que si le déploiement de la vaccination se déroule bien, nous pourrions bientôt être en mesure de combattre efficacement la pandémie.