La COVID-19 pourrait accélérer la formation de plaques d’athérome dans les artères coronaires, augmentant ainsi le risque de complications cardiaques, surtout chez les patients atteints de maladies cardiovasculaires. C’est ce que révèle une étude récente menée par des chercheurs chinois, établissant un lien entre l’infection au SARS-CoV-2 et un risque accru d’événements cardiovasculaires sévères. Selon leurs conclusions, le volume des plaques coronariennes augmente significativement chez les patients ayant contracté le virus, avec une propension accrue à évoluer vers des plaques à haut risque.
Les effets de la COVID-19 sur le système cardiovasculaire ont déjà été largement documentés, notamment en ce qui concerne l’augmentation du risque de caillots sanguins, les troubles du rythme cardiaque, l’inflammation du muscle cardiaque (myocardite) et l’insuffisance cardiaque dans l’année suivant l’infection.
En 2021, une étude avait exploré les effets à long terme de la COVID-19 sur la santé cardiovasculaire, suggérant que même après la guérison, les patients restaient exposés à un risque accru de maladies cardiaques. Une autre recherche, menée la même année par Paltiel et Zheng, avait mis en évidence une susceptibilité accrue aux complications graves, notamment aux événements thromboemboliques chez les patients ayant des antécédents de pathologies cardiaques.
La récente étude, dirigée par le Dr Junbo Ge, professeur et chef du service de cardiologie à l’hôpital Zhongshan de l’Université Fudan à Shanghai, s’inscrit dans cette continuité. Elle renforce l’hypothèse selon laquelle la COVID-19 pourrait avoir des répercussions majeures sur le système cardiovasculaire. Si les mécanismes précis de ce phénomène restent encore partiellement élucidés, les chercheurs ont constaté que l’infection provoque une réponse inflammatoire intense chez certains patients.
« La COVID-19, causée par le SARS-CoV-2, se manifeste initialement par des atteintes pulmonaires aiguës et une insuffisance respiratoire », explique le Dr Ge dans un communiqué. « Cependant, de nouvelles données montrent qu’elle induit également une réponse inflammatoire exacerbée, susceptible d’affecter le système cardiovasculaire », ajoute-t-il.
L’inflammation chronique étant un facteur bien connu de l’aggravation de l’athérosclérose – un processus de durcissement et de rétrécissement des artères dû à l’accumulation de plaques –, le Dr Ge et son équipe ont cherché à comprendre comment la COVID-19 peut influencer ce phénomène, en particulier dans les artères coronaires qui alimentent le cœur en sang.
Une étude fondée sur l’angiographie coronaire par tomodensitométrie
Pour mener à bien leurs travaux, les chercheurs ont eu recours à l’angiographie coronaire par tomodensitométrie (ACTC), afin d’examiner le cœur et les artères coronaires de 803 patients ayant subi au moins deux examens entre septembre 2018 et octobre 2023 – une période incluant la pandémie de COVID-19. Ces examens ont permis d’analyser l’évolution du tissu entourant les artères coronaires, en se focalisant sur l’inflammation, l’accumulation de plaques et la détection de rétrécissements artériels à haut risque.
Parmi les participants, 690 avaient reçu un diagnostic de COVID-19 entre leur premier et leur dernier scanner. L’étude a recensé un total de 2 588 lésions coronariennes, dont 2 108 chez des patients infectés et 480 chez des patients non infectés.
Les résultats, publiés dans la revue Radiology, montrent qu’au début de l’étude, la sténose moyenne – soit le rétrécissement des artères – était de 31,3 %, avec seulement 8,1 % des lésions atteignant une sténose de 50 % ou plus. Toutefois, les analyses révèlent que le volume des plaques augmentait plus rapidement chez les patients ayant contracté la COVID-19, avec une probabilité accrue de transformation en plaques à haut risque par rapport aux patients non infectés (20,1 % contre 15,8 %).
L’étude souligne également une inflammation plus marquée des artères chez les patients ayant été infectés par le virus, les exposant à un risque trois fois plus élevé de défaillance de la lésion cible – un terme désignant un risque accru de crise cardiaque ou d’accident vasculaire cérébral.
Concrètement, 10,4 % des patients infectés ont présenté cette complication, contre seulement 3,1 % chez ceux n’ayant jamais contracté le virus. Les auteurs estiment que ces effets délétères pourraient persister au-delà de la phase aiguë de l’infection, et ce, indépendamment d’autres facteurs de risque comme l’âge ou le diabète.
Une surveillance cardiovasculaire nécessaire sur le long terme
Les résultats de cette étude suggèrent que l’infection par le SARS-CoV-2 peut favoriser la progression des plaques vulnérables et l’inflammation des artères coronaires, augmentant ainsi le risque de complications cardiovasculaires sévères. « Les patients infectés par le SARS-CoV-2 présentent un risque accru d’infarctus du myocarde, de syndrome coronarien aigu et d’accident vasculaire cérébral sur une période pouvant aller jusqu’à un an », alerte le Dr Ge.
Si ces observations demandent à être confirmées par d’autres travaux, elles soulèvent néanmoins la question d’une potentielle augmentation des maladies cardiovasculaires dans les années à venir en raison de la pandémie. Un éditorial rédigé par le Dr Jonathan Weir-McCall du King’s College de Londres et le Dr Jack Bell du Liverpool Centre for Cardiovascular Science met en avant la nécessité d’anticiper cette problématique de santé publique.
« Il est important de se préparer à une augmentation des maladies cardiovasculaires dans les années à venir, y compris chez les patients ayant récupéré d’une infection aiguë au SARS-CoV-2 », insiste le Dr Ge. « Le risque d’infarctus du myocarde, de syndrome coronarien aigu et d’accident vasculaire cérébral pourrait rester élevé jusqu’à un an après l’infection », conclut-il.