Des chercheurs britanniques révèlent que les impacts psychologiques de la crise sanitaire seraient tels qu’elle aurait déclenché une seconde « crise de la quarantaine » chez les plus de 50 ans. Cet état de détresse psychologique serait plus prononcé chez les femmes et pourrait, sur le long terme, affecter la santé générale.
En franchissant le cap de la quarantaine, bon nombre d’entre nous éprouvent des épisodes de détresse psychologique. Il s’agit souvent d’une crise existentielle, nourrie par de profondes remises en question sur des sujets variés tels que la vie de couple, la vie familiale, le travail, etc. Les personnes concernées se montrent généralement déprimées, voire présentent des tendances suicidaires et d’autres troubles plus ou moins handicapants tels que l’anxiété. Communément appelée « crise de la quarantaine », cette étape de la vie est parfois difficile à comprendre pour l’entourage, et peut entraîner des revirements de comportements soudains ainsi que des décisions impulsives. En vieillissant, cette crise finit par s’estomper, et les individus sont généralement plus heureux après 60 ans.
La nouvelle étude, publiée dans la revue PLOS Medicine, révèle que la pandémie de COVID-19 aurait déclenché une sorte de deuxième crise de la quarantaine chez les Britanniques. L’isolement et les bouleversements drastiques dans la vie quotidienne (perte d’emploi, difficultés financières, décès de proches, etc.) auraient été tels que les adultes britanniques ont connu des niveaux record d’altération de la santé mentale pendant la crise sanitaire.
Cependant, en comparaison des impacts sur la santé physique ou sur l’économie, les répercussions psychologiques de la pandémie de COVID-19 sont peu étudiées. Durant la crise sanitaire, d’importants signes de détresse psychologique, des symptômes de dépression et d’anxiété ont été rapportés. Des pensées et des comportements suicidaires ont été détectés non seulement chez les patients et leurs proches, mais également chez le personnel soignant.
De plus, les services dédiés à la santé mentale ont été considérablement perturbés, alors que les besoins augmentaient. Cela s’est principalement manifesté au début de la pandémie, lorsque les travailleurs et les infrastructures de santé ont été réquisitionnés en priorité pour les urgences directement liées au virus. Par ailleurs, les mesures de confinement ont également contribué à empêcher l’accès aux soins psychologiques.
L’anxiété et la dépression augmentent l’incidence de nombreux autres problèmes de santé. « Le fait que nous observions un nouveau pic inattendu des problèmes de santé mentale qui peuvent conduire à ces trajectoires à long terme est profondément préoccupant », estime Darío Moreno-Agostino, auteur principal de la nouvelle étude et chercheur du Centre ESRC pour la société et la santé mentale au King’s College de Londres. Selon l’expert, un deuxième pic de crise existentielle au cours de la vie pourrait notamment accélérer et exacerber l’apparition d’autres problèmes de santé mentale et physique chroniques.
Une crise plus fréquente chez les femmes
Pour parvenir à leurs résultats, les chercheurs ont analysé des données collectées auprès de plus de 16 000 adultes nés en 1946, en 1958 et en 1970. Les données couvrent quatre décennies et incluent trois études de cohorte de naissances au Royaume-Uni. Les niveaux de détresse psychologique des participants ont ainsi été évalués plusieurs fois au cours de leur vie adulte, par le biais de sondages liés à la dépression et à l’anxiété. Trois séries de sondages ont également été effectuées au cours de la pandémie, notamment en mai 2020, en septembre et octobre 2020, et en février et mars 2021.
Il a été constaté qu’à l’automne 2020, les personnes nées en 1958 et en 1970 présentaient les niveaux les plus élevés de détresse psychologique qu’elles aient connus au cours de leur vie d’adulte. En revanche, ceux nés en 1946 éprouvaient selon le sondage une détresse similaire à celle vécue lors de leur crise de la quarantaine. Les résultats indiquent ainsi que la pandémie engendre l’équivalent de la détresse psychologique d’une crise de la quarantaine, et que les personnes l’ayant déjà surmontée font en quelque sorte une « rechute ».
Par ailleurs, les chercheurs ont révélé que l’apparition de la crise ou la rechute était plus fréquente chez les femmes. Cette différence s’explique probablement par le fait que les femmes ont généralement subi plus de stress durant la crise sanitaire. Gérer leurs ménages en assumant beaucoup plus de tâches et de responsabilités que d’ordinaire est, entre autres, un important facteur de stress. De plus, 45% des femmes dans le monde auraient subi des formes de violence (directe ou indirecte) au cours de la première année de la pandémie selon l’OMS, et en sont donc, globalement, psychologiquement plus affectées que les hommes.