Utiliser la puissance de la mécanique quantique et des qubits, c’est la promesse des futurs ordinateurs quantiques. Ces ordinateurs de nouvelle génération devraient être capables de trouver des solutions à des problèmes devant lesquels des ordinateurs classiques seraient impuissants. Dans ce cadre, l’entreprise D-Wave déclare avoir développé l’ordinateur quantique le plus puissant existant actuellement. Appelé Advantage, il surpasserait tous les autres ordinateurs quantiques. Cependant, plusieurs experts remettent en cause cette nouvelle, affirmant qu’Advantage n’est pas vraiment un ordinateur quantique, et qu’il ne surpasse pas certains ordinateurs quantiques comme ceux développés par IBM ou Google.
D-Wave, une société d’informatique quantique basée à Burnaby, au Canada, a annoncé ce qu’elle prétend être « de loin le plus grand et le plus puissant ordinateur quantique existant aujourd’hui ». La société compte déjà plusieurs clients utilisant son nouvel appareil, appelé Advantage, mais d’autres experts dans le domaine ont des doutes sur ses affirmations, soulignant qu’il existe des ordinateurs classiques et quantiques qui dépassent ses capacités.
Les ordinateurs quantiques utilisent des bits quantiques, ou qubits, pour stocker des informations. Alors que les bits normaux ne peuvent être que dans l’un des deux états — un 0 ou un 1 —, les qubits peuvent être dans une combinaison de ces états, ce qui leur permet de contenir et traiter plus d’informations à la fois. Le nouvel appareil quantique de D-Wave possède 5000 qubits, plus que tout autre ordinateur quantique actuellement disponible, mais le nombre de qubits n’est pas une mesure fiable de la puissance d’un appareil quantique.
Les qubits eux-mêmes sont conservés dans une puce similaire à une carte de circuit imprimé ordinaire. « Sur la puce, qui a à peu près la taille d’une vignette — elle mesure huit millimètres de côté — il y a environ 110 mètres de câblage supraconducteur qui mesure pour la plupart environ un quart de micron d’épaisseur. C’est une prouesse technique que d’avoir des centaines de fils qui parcourent cette puce et restent froids », explique Mark Johnson de D-Wave . La puce doit rester en dessous d’environ -273.135 °C — près du zéro absolu — pour fonctionner.
Un dispositif optimisé pour résoudre un type particulier de problème
Pourtant, les experts soulignent que le dispositif D-Wave a une utilisation limitée. « Ce qu’ils ont construit n’est pas tout à fait un ordinateur quantique — c’est un matériel sur mesure qui peut résoudre facilement un type particulier de problème », explique Ciarán Gilligan-Lee de l’Université de Londres. Le dispositif D-Wave ne peut résoudre que des problèmes d’optimisation, dit-il, comme trouver le moyen le plus efficace de créer un calendrier ou de plier une protéine.
D’autres ordinateurs quantiques, tels que le Sycamore 54 qubits de Google, sont des appareils polyvalents comme les smartphones : vous pouvez en utiliser un comme réveil, mais il a de nombreuses autres utilisations. L’appareil D-Wave ressemble plus à un réveil ordinaire, dans le sens qu’il n’a qu’une seule fonction qu’il remplit extrêmement bien. « Il s’agit peut-être du réveil le plus sophistiqué que vous ayez jamais vu, mais si vous espérez qu’il s’agisse d’un smartphone quantique, vous vous trompez », déclare Gilligan-Lee.
Sur le même sujet : Des chercheurs développent une technologie d’ordinateur quantique stable et fonctionnelle
Un « ordinateur quantique »… Sans l’avantage quantique
Bien qu’il s’appelle Advantage, l’appareil de D-Wave n’atteint pas l’avantage quantique (aussi appelé suprématie quantique), une référence technique pour les ordinateurs quantiques qui marquerait une avancée majeure. « L’avantage quantique signifie démontrer que, dans un cadre réaliste avec un problème pratique, vous pouvez faire quelque chose qu’aucun ordinateur classique ne pourrait faire. Personne ne l’a encore fait », explique Gilligan-Lee.
Des chercheurs ont affirmé en octobre 2019 avoir atteint la suprématie quantique avec Sycamore. L’ordinateur quantique avait résolu un problème mathématique en 3.5 minutes, alors que le supercalculateur actuel le plus puissant au monde, Summit, aurait nécessité plus de 10’000 ans de calculs pour parvenir au même résultat.
Mais D-Wave n’a publié aucun résultat montrant que son appareil peut surpasser les autres ordinateurs, qu’ils soient quantiques ou classiques. Johnson dit que D-Wave n’essaie pas d’obtenir un avantage quantique, mais plutôt de fournir aux clients un avantage sur les systèmes qu’ils utilisaient auparavant.
En effet, récemment, un ordinateur quantique baptisé Sycamore a résolu un problème mathématique en 3.5 minutes, alors que le supercalculateur actuel le plus puissant du monde, Summit, aurait nécessité plus de 10’000 ans de travail pour arriver au même résultat.
Bien que cela puisse être un avantage pour les clients en termes commerciaux — D-Wave prétend avoir utilisé ses ordinateurs quantiques pour améliorer les systèmes classiques pour des clients allant de Volkswagen à Accenture —, ce n’est pas un avantage quantique. En fait, d’autres ordinateurs quantiques construits par des sociétés comme IBM et Google peuvent effectuer des calculs plus complexes qu’Advantage et progressent rapidement.