Situées à seulement 7800 années-lumière de la Terre, deux étoiles mortes ont été découvertes en orbite l’une autour de l’autre, se déplaçant à une vitesse record ! Leur orbite est si proche que les astronomes s’attendent à détecter les ondes gravitationnelles de cette paire d’étoiles dans quelques années, lorsque nous aurons des outils plus sensibles.
À l’échelle cosmique, nous sommes habitués à ce que les choses prennent beaucoup de temps, mais deux naines blanches — faisant donc partie d’un système binaire connu sous le nom de ZTF J1539+5027 (ou simplement J1539 pour faire court), possèdent une période orbitale de seulement 6.91 minutes ! Il s’agit de la période orbitale la plus courte jamais détectée dans un tel système binaire. Cette orbite est si proche que la totalité du système binaire pourrait tenir dans un diamètre équivalant à celui de Saturne.
Il faut savoir que les naines blanches sont un type d’étoiles « mortes » dont le géniteur avait une masse inférieure à environ 10 fois celle du Soleil. En effet, si une étoile est plus massive que cela, elle se transforme plutôt en étoile à neutrons lorsqu’elle s’effondre (pouvant aboutir également à un trou noir).
À l’heure actuelle, les experts pensent que c’est ce qui va fatalement arriver au Soleil, un jour lointain. En effet, lorsqu’il n’aura plus d’hydrogène et ne pourra plus assurer son processus de combustion, il se gonflera et se transformera en une géante rouge, fusionnant hélium et carbone jusqu’à épuisement total de ces éléments. Puis, les couches extérieures disparaîtront et le noyau ultradense et brillant qui restera du processus (soit littéralement le cadavre de l’étoile morte…) sera la naine blanche.
Les deux étoiles de J1539 ont déjà subi cette transformation. L’une, l’étoile principale, possède environ 60% de la masse du Soleil dans un noyau faisant la taille de la Terre. L’autre, l’étoile secondaire, a une masse d’environ 20% celle du Soleil mais est plus grande que la première étoile, et donc moins dense.
Une densité plus faible et une masse plus faible signifient également que l’étoile est moins brillante, donc lorsqu’elle se déplace entre nous et la première étoile, qui est plus lumineuse, elle obscurcit totalement cette dernière. C’est de cette manière que les astronomes ont découvert ce système binaire, avec les données de ZTF (Zwicky Transient Facility) de Caltech, à l’Observatoire de Palomar (Californie, USA).
« Comme l’étoile moins brillante passe devant celle qui est plus lumineuse, elle bloque la majorité de sa lumière, ce qui résulte dans le modèle de clignotement qui dure presque 7 minutes et que nous voyons dans les données de ZTF », a expliqué le physicien Kevin Burdge, de Caltech.
Cette proximité orbitale extrême signifie également que les deux étoiles propagent déjà des ondes gravitationnelles dans l’espace. Cependant, nous ne pouvons pas détecter ces ondes. Du moins pas encore (avec notre technologie actuelle).
En effet, jusqu’à présent, les seules ondes gravitationnelles qui ont été détectées sont celles ayant été émises au cours des derniers instants d’une collision entre des objets volumineux (des étoiles à neutrons ou des trous noirs). Et le système J1539 est relativement peu massif en comparaison à ces objets, sans compter qu’il resterait encore un certain temps avant que les étoiles ne fusionnent.
Pourtant, ces étoiles se rapprochent d’environ 26 centimètres par jour : cela signifie que ce processus durera encore environ 130’000 ans avant qu’elles ne fusionnent potentiellement. À ce stade, le transfert de masse de l’étoile secondaire à l’étoile primaire va augmenter considérablement.
À ce moment-là, deux scénarios sont possibles. Si le transfert de masse est stable, les deux étoiles se sépareront un peu, ce qui donnera lieu à ce que l’on appelle une étoile de type AM Canum Venaticorum, soit un système dans lequel l’étoile primaire accroît progressivement la matière de son compagnon.
Cependant, si le transfert de masse n’est pas stable, les deux étoiles fusionneront très probablement, ce qui donnera naissance à un type d’étoile connu sous le nom de R Coronae Borealis (soit une supergéante jaune de faible masse), un objet irrégulièrement pulsé, considéré comme l’analogue de faible masse d’une supernova de type Ia.
Mais nous n’en sommes pas encore là. Pour l’instant, nous ne pouvons pas détecter leurs ondes gravitationnelles avec les équipements que nous possédons. Cependant, les astronomes pensent que le développement actuel d’interféromètres, comme l’interféromètre LISA (Laser Interferometer Space Antenna) de l’ESA, ainsi que d’autres futurs détecteurs d’ondes gravitationnelles situés dans l’espace, pourront changer ce fait. Espérons-le !
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À noter également que la mission LISA ne sera lancée qu’en 2034 et aura pour but précis de détecter des ondes gravitationnelles de basse fréquence depuis l’espace. Il s’agira du tout premier observatoire spatial d’ondes gravitationnelles (les observatoires actuels, notamment LIGO et Virgo, étant terrestres).
Nous avons donc encore le temps de localiser d’autres sources potentielles d’ondes gravitationnelles. Dans tous les cas, pour l’instant, J1539 est le signal le plus puissant connu que pourrait détecter LISA à l’avenir.
Entretemps, J1539 peut nous aider à comprendre la dynamique de ce type de systèmes binaires et peut-être même à en localiser d’autres dans l’immensité de l’Univers.
VIDÉO : Vue d’artiste illustrant le système binaire
Cette vidéo nous montre une vue d’artiste illustrant le système binaire ZTF J1530+5027, constitué de deux objets extrêmement denses (des étoiles naines blanches) qui gravitent autour de leur orbite toutes les (moins de) sept minutes. Une seconde dans l’animation représente deux minutes en temps réel. La séparation orbitale de ces objets diminue d’environ 26 centimètres par jour en raison de l’émission d’ondes gravitationnelles, qui apparaissent en vert vers la fin du film :