Des astronomes ont repéré une étrange exoplanète en forme de citron, dotée d’une atmosphère majoritairement composée d’hélium et de carbone, une composition inhabituelle pour un objet de ce type. Elle formerait, avec le pulsar autour duquel elle orbite, un système dit « veuve noire », au sein duquel elle est lentement « dévorée » par son étoile. La pression y serait également si extrême que le carbone pourrait, selon les chercheurs, se cristalliser en diamant.
Les systèmes « veuve noire » constituent une catégorie rare de systèmes dans lesquels un pulsar en rotation rapide — le plus souvent un pulsar milliseconde — est accompagné d’un objet compagnon de masse nettement plus faible, évoluant sur une orbite extrêmement serrée. En accrétant progressivement la matière de ce compagnon, le pulsar accélère sa rotation, tandis que ce dernier se déleste peu à peu de sa masse. À l’image de l’araignée dont il porte le nom, le pulsar consume lentement sa proie.
Environ 50 systèmes veuve noire ont été recensés jusqu’à présent, avec des étoiles ou objets compagnons de très faible masse — bien inférieure à celle du Soleil. Une équipe codirigée par l’Université de Chicago affirme avoir identifié un nouveau système de ce type, mais, cette fois-ci, avec une exoplanète jupitérienne, dont la masse est proche de celle de Jupiter, comme compagne d’un pulsar en rotation rapide.
Baptisée PSR J2322-2650b, l’exoplanète présente une composition et une morphologie jamais observées jusqu’ici pour un objet de cette catégorie. « C’était une surprise totale », a confié à l’UChicago News le coauteur de l’étude, Peter Gao, membre du Laboratoire Carnegie de la Terre et des planètes, à Washington. « Je me souviens qu’après avoir recueilli les données, notre réaction collective a été : “mais qu’est-ce que c’est que ça ?” »
Du carbone sous pression extrême pouvant se cristalliser en diamants
Le pulsar autour duquel orbite PSR J2322-2650b émet, à intervalles de quelques millisecondes, des faisceaux de rayonnement électromagnétique depuis ses pôles magnétiques. Ces émissions sont dominées par des rayonnements gamma et d’autres radiations de haute énergie. Le pulsar lui-même demeure invisible à l’œil nu ; en revanche, le télescope spatial James Webb (JWST) permet d’observer avec une précision inédite la planète, éclairée par ces émissions extrêmes.
« Ce système est unique, car nous pouvons observer la planète illuminée par son étoile hôte sans pour autant voir directement l’étoile elle-même », explique Maya Beleznay, doctorante à l’Université de Stanford et coauteure de l’étude. « Nous obtenons ainsi un spectre d’une pureté exceptionnelle, ce qui nous permet d’étudier ce système avec un niveau de détail rarement atteint pour les exoplanètes. »
Selon les résultats publiés dans The Astrophysical Journal Letters, PSR J2322-2650b évolue à une distance extrêmement faible de son pulsar : environ 1,6 million de kilomètres, contre près de 160 millions de kilomètres entre la Terre et le Soleil. Cette proximité extrême implique une période orbitale de seulement 7,8 heures. Soumise à une force gravitationnelle intense, exercée par un pulsar bien plus massif, la planète serait fortement déformée, adoptant une silhouette allongée évoquant celle d’un citron.
Les analyses menées par les chercheurs montrent également que l’atmosphère de PSR J2322-2650b est majoritairement composée d’hélium et de carbone. Une telle composition, atypique, n’avait encore jamais été observée pour une exoplanète.
Plus précisément, alors que la plupart des exoplanètes étudiées jusqu’à présent possèdent des atmosphères dominées par le méthane, l’eau ou le dioxyde de carbone, celle de PSR J2322-2650b se distingue par la présence de carbone moléculaire, sous forme de C₂ et de C₃. Les nuages carbonés qui l’enveloppent seraient comparables à de la suie, et la pression extrême qui y règne pourrait, selon des modèles théoriques, permettre au carbone de se cristalliser en diamants.

Une composition excluant tout mécanisme de formation connu
D’après les chercheurs, la composition de PSR J2322-2650b exclut l’ensemble des mécanismes de formation planétaire actuellement connus. « Cette planète s’est-elle formée comme une planète classique ? Non, car sa composition est radicalement différente », explique Michael Zhang, de l’Université de Chicago, l’auteur principal de l’étude. « S’est-elle formée par l’arrachement de la couche externe d’une étoile, comme dans les systèmes de veuve noire plus traditionnels ? Probablement pas, car la physique nucléaire ne produit pas de carbone pur en abondance dans ce contexte », précise-t-il.
L’un des membres de l’équipe avance l’hypothèse selon laquelle un mélange de carbone et d’oxygène, présent à l’intérieur de la planète, se cristalliserait progressivement à mesure de son refroidissement. Les cristaux de carbone élémentaire pourraient alors remonter vers la surface et se mêler à l’hélium atmosphérique. Ce scénario demeure toutefois incomplet : il suppose l’existence d’un mécanisme supplémentaire capable d’empêcher l’oxygène de suivre le même chemin.
Autrement dit, PSR J2322-2650b soulève, pour l’heure, davantage de questions qu’elle n’apporte de réponses. Elle constitue néanmoins un nouveau cas d’étude pour approfondir notre compréhension des processus de formation planétaire dans des environnements extrêmes.
Vidéo montrant le mouvement de PSR J2322-2650b autour du pulsar :



