Une supernova découverte par un groupe d’astronomes internationaux (notamment Tom Holoien de Carnegie et Maria Drout), dirigée par Ben Shappee de l’Université d’Hawaï, offre un nouveau regard sur les premiers moments d’une violente explosion stellaire. La lumière observée durant les premières heures de l’explosion stellaire a démontré un schéma pour le moins inattendu : c’est Anthony Piro, également de Carnegie, qui a analysé cette lumière et qui a pu révéler que la genèse de ces phénomènes est encore plus mystérieuse qu’on ne le pensait auparavant.
Étudier les supernovae thermonucléaires (ou supernova de type la) est fondamental pour notre compréhension du cosmos : leurs fours nucléaires sont essentiels pour générer de nombreux éléments que nous retrouvons autour de nous, et elles sont utilisées comme véritables règles cosmiques dans le but de mesurer les distances à travers l’univers.
Malgré leur importance, le mécanisme qui a déclenché l’explosion de la supernova de type Ia, est resté indéfinissable pendant des décennies. C’est pourquoi il est absolument vital de les « prendre en flagrant délit ».
En effet, les astronomes tentent depuis longtemps d’obtenir des données détaillées aux premiers instants de ces explosions, dans l’espoir de comprendre comment ces phénomènes se déclenchent. Cela s’est finalement produit en février de cette année, avec la découverte d’une supernova de type Ia appelée ASASSN-18bt (également connue sous le nom de SN 2018oh).
La supernovae ASASSN-18bt a été découverte grâce à l’ASAS-SN (All-Sky Automated Survey for Supernovae), un réseau international de télescopes basé à l’Université d’État de l’Ohio, qui surveille régulièrement le ciel à la recherche de supernovae et autres explosions cosmiques.
De plus, le télescope spatial Kepler de la NASA a pu collecter simultanément des données complémentaires concernant cet événement. En effet, Kepler a été conçu pour être incroyablement sensible aux minuscules changements de lumière dans le cadre de sa mission de détection de planètes extrasolaires. Il a ainsi pu obtenir des informations particulièrement détaillées sur la genèse de l’explosion : « ASASSN-18bt est la supernova la plus proche et la plus brillante jamais observée par Kepler. C’est donc une excellente occasion de tester les théories prédominantes sur la formation des supernovae », a déclaré Shappee, principal auteur de la découverte.
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En combinant les données d’ASAS-SN, de Kepler et de télescopes du monde entier, les astronomes ont réalisé qu’ASASSN-18bt semblait inhabituelle au cours de ses premiers jours : « Beaucoup de supernovae augmentent graduellement la lumière qu’elles émettent », a déclaré Drout, de l’Université de Toronto. « Mais concernant cet événement, vous pouviez clairement voir qu’il se passait quelque chose d’inhabituel et d’excitant au début ; une émission supplémentaire inattendue », a ajouté Drout.
Le type de supernovae Ia, consiste en l’explosion intégrale d’un cadavre stellaire de type naine blanche par dépassement de la limite de Chandrasekhar (soit le dépassement de la pression de dégénérescence électronique), initiée par la capture de matière déversée par un compagnon proche. La nature du compagnon proche a longtemps été débattue. Une possibilité est que cette lumière supplémentaire observée au début de la supernova provienne de l’explosion de la naine blanche, entrant en collision avec l’étoile compagnon.
Bien que ce soit l’hypothèse de départ, des comparaisons détaillées avec les travaux de modélisation théorique de Piro ont démontré que cette lumière supplémentaire pouvait avoir une origine différente et, totalement inexpliquée.
« Tandis que la brusque augmentation de la luminosité initiale d’ASASSN-18bt pourrait indiquer que l’explosion se heurte à une autre étoile, nos données de suivi ne correspondent pas aux prévisions », a déclaré Holoien. « D’autres possibilités, telles qu’une distribution inhabituelle de matières radioactives dans l’étoile éclatée, expliquent mieux ce que nous avons vu. Davantage d’observations d’ASASSN-18bt et de découvertes plus précoces comme celle-ci aideront à différencier les modèles et à mieux comprendre les origines de ces explosions », a ajouté Holoien.
« La nature trouve toujours de nouveaux moyens de nous surprendre, et des observations uniques comme celle-ci sont excellentes pour motiver de nouvelles approches créatives de la façon dont nous imaginons ces explosions », ajoute Piro.
Cela corrobore l’hypothèse avancée dans les travaux récents du projet Carnegie Supernova, dirigé par Maximilian Stritzinger de l’Université d’Aarhus et co-dirigée par Shappee et Piro, selon laquelle il pourrait exister deux populations distinctes de supernovae de type la : celles qui présentent une émission de lumière précoce et celles qui n’en ont pas.
Heureusement, grâce à ASAS-SN et à la prochaine génération d’enquêtes qui permettront de mieux analyser le ciel toutes les nuits, les astronomes pourront très certainement découvrir de nombreuses nouvelles supernovae et les observer au moment de leur explosion. Au fur et à mesure de ces prochaines découvertes et analyses, les scientifiques pourront, espérons-le, résoudre le mystère de longue date quant à l’origine exacte de ces explosions stellaires.