La respiration (de dioxygène) est considérée comme une caractéristique fondamentale maintenant en vie les animaux multicellulaires. Pourtant, des chercheurs ont découvert qu’un petit parasite déjà connu, Henneguya salminicola, peut entièrement se passer de cette molécule qui nous est vitale pour survivre.
« Il a perdu la capacité de respirer de l’oxygène », explique Dorothee Huchon de l’Université de Tel Aviv en Israël. Selon elle, cet animal, un parasite notamment connu pour infecter le saumon, obtient l’énergie dont il a besoin sans oxygène. Comment ? Probablement en puisant cette dernière directement de son hôte.
Jusqu’en 2010, l’on pensait que toutes les plantes et tous les animaux sans exception utilisaient de l’oxygène pour générer un précieux carburant biologique appelé adénosine triphosphate (ATP), qui alimente les processus cellulaires. La génération d’ATP à partir de l’oxygène a lieu dans des structures appelées mitochondries.
Chaque mitochondrie possède son propre petit génome en plus du génome principal dans le noyau cellulaire. Mais lorsque l’équipe d’Huchon a séquencé l’ADN de Henneguya salminicola, un petit animal probablement issu de la méduse, ils pensaient avoir fait une erreur, car ils n’avaient trouvé aucun ADN mitochondrial.
D’autres études ont depuis confirmé la découverte. Lorsque l’équipe a injecté un colorant bleu fluorescent qui se lie à l’AND dans un H. salminicola, aucun ADN n’était visible dans les cellules à l’extérieur du noyau. En revanche, lorsqu’ils ont coloré un parasite étroitement apparenté, des points bleus correspondant aux génomes mitochondriaux étaient visibles à l’extérieur du noyau. Les résultats de la nouvelle étude ont été publiés dans la revue PNAS.
Des mitochondries incapables d’utiliser l’oxygène pour produire de l’ATP
Ainsi, alors que les cellules de H. salminicola possèdent des structures qui ressemblent à des mitochondries, elles ne peuvent pas fabriquer les enzymes nécessaires pour utiliser l’oxygène pour produire de l’ATP. « Ce ne sont pas de véritables mitochondries », explique Huchon.
En d’autres termes, cela signifie que H. salminicola est un animal multicellulaire capable de survivre en l’absence totale d’oxygène. « Il existe beaucoup d’animaux capables de se passer d’oxygène pendant de longues périodes, mais aucun qui peut le faire durant tout le cycle de vie », explique Nick Lane de l’University College London. Du moins, pas à notre connaissance.
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Il faut savoir qu’en 2010, Roberto Danovaro, de l’Université polytechnique des Marches en Italie, a rapporté qu’un groupe de minuscules animaux appelés loricifères, qui vivent dans les sédiments des grands fonds, ne possèdent pas de mitochondries visibles lorsqu’ils sont observés au microscope, et doivent s’appuyer sur d’autres sources d’énergie, tel que le sulfure d’hydrogène.
Cependant, d’autres biologistes déclarent que des études génomiques sont nécessaires pour confirmer que les loricifères ont vraiment perdu la capacité de respirer l’oxygène, comme cela est le cas pour H. salminicola. « Les analyses génomiques sont en cours », explique Danovaro. « Je ne peux pas en dire plus ». D’ici là, H. salminicola reste donc le seul animal connu dont il est confirmé qu’il peut se passer d’oxygène.
Une origine probablement liée aux méduses
Jusqu’ici, nous ne savons pas pourquoi H. salminicola a perdu cette capacité que tous ses proches parents que nous avons identifiés possèdent, celle d’utiliser l’oxygène. Comme ces parasites se déplacent tout au long de leur cycle de vie, ils peuvent également vivre à l’intérieur d’un hôte (généralement des vers), où ils parviennent également à survivre avec pratiquement aucun oxygène. L’hôte principal de H. salminicola n’a jamais été identifié, mais il pourrait aussi vivre dans des sédiments avec de très faibles niveaux d’oxygène.
Bien que ce parasite soit inoffensif pour l’Homme, il constitue un problème majeur pour les pisciculteurs, car il provoque des taches blanches disgracieuses dans la chair des poissons infectés. Les chercheurs pensent qu’il pourrait être issu d’un ancêtre plus avancé de la méduse, il y a des millions d’années.