Rien qu’en 2018, environ 12 millions d’hectares de forêts dans des régions tropicales ont été perdus : cela équivaut à une surface de 30 terrains de football perdue chaque minute.
Ce qui est particulièrement inquiétant, c’est la destruction continue de ce que l’on appelle les forêts primaires. À savoir qu’une forêt primaire (ou forêt vierge) est une forêt intacte (ou originelle) n’ayant jamais été détruite ni exploitée, ni fragmentée, ni directement ou manifestement influencée par l’Homme. Malheureusement, une partie de ces anciennes forêts intactes a été perdue en 2018 : soit une perte de la taille de la Belgique, rien qu’en une année.
Aujourd’hui, le nouveau rapport du Global Forest Watch décrit avec détails ce qui se passe dans les régions tropicales fortement boisées du monde, qui vont de l’Amazonie en Amérique du Sud à l’Indonésie, en passant par l’Afrique de l’Ouest et centrale. Et nous allons mettre en lumière aujourd’hui certains de ces faits alarmants.
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Dans un premier temps, il ne faut pas oublier que le bassin amazonien abrite quelque 20 millions d’habitants. Parmi eux se trouvent des tribus vivant en isolement volontaire par rapport au reste du monde. En plus de leur fournir de la nourriture et des abris, les arbres de ces régions sont importants pour le monde entier, car ils stockent le dioxyde de carbone et jouent un rôle clé dans la régulation du changement climatique mondial.
Le problème est aujourd’hui que des millions d’hectares de ces forêts ont été perdus au cours des dernières décennies, après avoir été défrichés par des intérêts commerciaux ou agricoles.
De ce fait, même si en apparence les données de 2018 font apparaître une baisse par rapport aux deux années précédentes, les experts expliquent que cette unique bonne nouvelle reste nuancée, de plus que les années précédentes, de nombreux arbres ont en plus été perdus en raison d’incendies. « C’est vraiment tentant de célébrer la deuxième année de déclin depuis le pic de perte de couvert forestier de 2016. Mais si vous regardez les 18 dernières années, il est clair que la tendance générale est toujours à la hausse. Nous sommes loin de gagner cette bataille », a déclaré Frances Seymour du World Resources Institute, qui dirige Global Forest Watch.
En quoi est-ce que les forêts primaires sont-elles importantes ?
Comme mentionné plus haut, les forêts primaires sont celles qui existent dans leur état d’origine et qui ne sont pratiquement pas touchées par l’Homme. Ces anciennes forêts peuvent abriter des arbres ayant des centaines, voire des milliers d’années. De ce fait, elles sont absolument vitales quant au maintien de la biodiversité et abritent des animaux comme les jaguars, les tigres, les orangs-outans et les gorilles de montagne.
De plus, ces anciennes forêts sont de véritables réserves de dioxyde de carbone, d’où l’importance inquiétante de la perte des 3.6 millions d’hectares en 2018… « Pour chaque hectare de forêt perdue, nous nous rapprochons des scénarios effrayants du dérèglement climatique », a déclaré Frances Seymour.
Un problème global
Malheureusement, ce problème touche les forêts à l’échelle mondiale. Par exemple, en 2002 déjà, le Brésil et l’Indonésie perdaient environ 71% de leurs forêts tropicales primaires. À présent, c’est la République démocratique du Congo qui est le deuxième pays au monde avec les pertes les plus importantes en forêts primaires, tandis que des pays tels que la Colombie, la Bolivie et le Pérou assistent tous à la rapide disparition de leurs forêts primaires. Autrement, il y a également Madagascar, qui a perdu 2% de toute sa forêt primaire en 2018. Un taux plus élevé que tout autre pays tropical.
Certains pays comme le Ghana et la Côte d’Ivoire ont enregistré la plus forte augmentation en pourcentage des pertes de forêts primaires : en effet, le Ghana a connu une énorme augmentation de 60%, tandis que la Côte d’Ivoire a enregistré une hausse de 26%. À savoir que la majeure partie de cette augmentation, en particulier au Ghana, serait due à l’extraction d’or à petite échelle. De plus, il y a eu une expansion de la culture du cacao.
Bien que de nombreuses entreprises de fabrication de cacao et de chocolat aient déclaré vouloir mettre fin à la déforestation au sein de leurs chaînes d’approvisionnement, de nombreux militants à travers le monde entier s’inquiètent que leurs paroles ne soient pas suffisantes.
Mais alors, y a-t-il de l’espoir ? Étrangement, oui.
En 2018, l’Indonésie a réussi à réduire les pertes de ses forêts primaires d’environ 40%, atteignant ainsi son taux le plus bas depuis 2003. Cette baisse est due à un certain nombre de facteurs, notamment au fait que deux années très humides et consécutives ont pu limiter les cas d’incendies.
Il y a également eu une action très importante de la part du gouvernement : il existe à présent des zones protégées, où la déforestation a très fortement diminué. Aussi, un accord conclu avec la Norvège quant à la réduction des émissions dues à l’abattage des arbres a aidé le processus.
« Notre application de la loi est une autre politique qui montre que nous prenons cela au sérieux. Dans le pays, plusieurs entreprises ont été sanctionnées ou ont reçu une lettre du gouvernement. Nous essayons vraiment d’appliquer la loi », a déclaré le Dr Belinda Margono, du ministère indonésien de l’Environnement et des Forêts.
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Quant au Brésil, selon les experts, il est encore trop tôt pour définir si les modifications apportées aux lois sur l’environnement par le président Jair Bolsonaro ont déjà eu un impact positif, ou non. Dans tous les cas, le pays a connu une baisse importante de la déforestation entre 2007 et 2015 (autour des 70%). Malheureusement, avec les incendies survenus en 2016 et 2017, une nouvelle chute a été enregistrée.
Donc globalement, bien que les chiffres de 2018 aient été inférieurs à ceux de 2017, ces totaux sont toujours au-dessus du niveau historique et restent absolument alarmants à l’échelle mondiale.
À noter que le rapport du Global Forest Watch souligne également le fait qu’en 2018, plusieurs zones de pertes de forêts primaires sont situées près ou à l’intérieur de territoires autochtones : c’est notamment le cas de la réserve d’Ituna Itata, qui abrite certaines des dernières tribus vivant en autarcie totale, qui a perdu quelque 4000 hectares pour cause de défrichement illégal.