Un dispositif expérimental visant à soigner le diabète utilise de l’eau très chaude pour tuer certaines cellules indésirables qui tapissent l’intestin. En tuant ces cellules, le traitement pourrait changer la réponse hormonale des patients à la nourriture.
Cette technique consiste à mettre un tube dans la gorge du patient, jusque dans la première partie du petit intestin, appelé duodénum (qui est le segment initial de l’intestin grêle), pendant que ce dernier est sous sédation. Connue sous le nom de Revita, cette procédure utilise de l’eau chauffée à 75 °C pour tuer la couche la plus externe des cellules.
Les personnes atteintes de diabète de type 2 ont souvent une prolifération des cellules tapissant le duodénum : « cela peut être le résultat de plusieurs années de mauvaise alimentation », explique Harith Rajagopalan, de Fractyl, l’entreprise effectuant cette procédure.
En effet, lorsque nous mangeons, les cellules du duodénum produisent une hormone appelée polypeptide inhibiteur gastrique (GIP), qui déclenche plusieurs autres hormones qui contrôlent la manière dont nous métabolisons les nutriments. Chez les personnes souffrant de diabète, la production de GIP est augmentée. De ce fait, « éliminer certaines des cellules intestinales en excès, devrait rendre la réponse hormonale du patient à la nourriture plus semblable à celle d’une personne non-diabétique », explique Rajagopalan.
Plus de 300 personnes ont déjà bénéficié de l’intervention
À ce jour, environ 300 personnes au Royaume-Uni, dans trois autres pays européens et au Brésil, ont bénéficié de l’intervention. Parmi ceux-ci, 34 personnes ont ensuite été étudiées pendant deux ans, et les résultats ont démontré que leur taux d’HbA1c (la forme glyquée de la molécule d’hémoglobine, qui permet, grâce à sa valeur biologique, de déterminer la concentration de glucose dans le sang – la glycémie) sur trois mois est passé de 8,5 à 7,5%. Malheureusement, malgré cette amélioration, ces personnes restent toujours classées comme atteintes de diabète.
Un autre essai randomisé a été effectué sur 70 personnes : la moitié des participants ont eu droit à une version factice du traitement (placebo), tandis que l’autre moitié a subi le traitement réel. Les résultats ont montré que les individus qui ont subi le traitement réel ont effectivement présenté des améliorations quant au contrôle glycémique ainsi que dans des marqueurs impliquant la santé du foie.
Ces chiffres devaient être présentés la semaine dernière, lors de la conférence Endo 2020 à San Francisco, qui a été annulée en raison de la pandémie COVID-19 qui fait actuellement rage à travers le monde entier.
À noter également que cette procédure a tendance à entraîner une petite perte de poids d’environ 3 kg, mais elle ne sera pas commercialisée comme traitement de l’obésité : « C’est une réinitialisation métabolique plutôt qu’une procédure de perte de poids », explique Rajagopalan. « Si les gens continuent à suivre un régime alimentaire malsain par la suite, leurs cellules intestinales malsaines peuvent très réapparaitre, mais cela prendra probablement plusieurs années », ajoute-t-il.
Selon certains scientifiques, il manque encore des preuves d’essais cliniques plus solides
Roy Taylor, de l’Université de Newcastle, au Royaume-Uni, explique que le mécanisme impliqué dans l’amélioration du contrôle du glucose n’est pas clair, car ce dernier pourrait résulter de la perte de poids (et non l’inverse).
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« Il est passionnant de voir émerger des traitements innovants comme celui-ci, mais la recherche n’en est encore qu’à ses débuts et il reste de nombreuses questions importantes à résoudre », déclare Faye Riley, de Diabetes UK. « Nous sommes impatients de voir des preuves d’essais cliniques plus solides et mieux comprendre le fonctionnement de cette approche », a ajouté Riley.
L’option du bypass gastrique et du manchon gastrique
À l’heure actuelle, il existe plusieurs options pour les personnes en cas d’obésité importante qui ne peuvent pas perdre du poids à l’aide d’un régime alimentaire et d’exercice : par exemple, le bypass gastrique, qui est une opération chirurgicale consistant à réduire le volume de l’estomac et à modifier le circuit alimentaire. En effet, l’estomac est connecté à l’intestin grêle inférieur, afin que la nourriture évite de passer par le duodénum. Une autre option consiste à faire poser un manchon gastrique : il s’agit d’un mince manchon placé à l’intérieur du duodénum, bloquant le contact entre ses cellules et la nourriture.
Selon les scientifiques, ces deux méthodes fonctionnent grâce à la réduction de l’absorption des aliments, « mais elles peuvent également modifier la libération d’hormones du duodénum », a ajouté Rajagopalan.