Une scientifique de l’Université de Cambridge a réussi à développer 300 cerveaux en laboratoire, à partir d’échantillons de peau humaine. Le but de cette étude est d’étudier les pathologies neuronales et remplacer les expérimentations sur les animaux.
C’est en effet depuis plusieurs mois, que la biologiste Madeline Lancaster cultive en laboratoire son petit potager. Un potager hors du commun, car la scientifique y a développé plusieurs centaines d’organes des plus complexes : soit, des cerveaux humains.
Dans ce laboratoire de biologie moléculaire situé dans le Medical Research Council de l’Université de Cambridge, la biologiste a réussi à cultiver 300 cerveaux humains. Le but de cette expérience est de permettre aux scientifiques d’étudier des cerveaux en stade de développement. Bien qu’il y ait une absence de sensations (vue, ouïe, goût, toucher, odorat) car ils ne sont pas rattachés à un corps humain, et que ces cerveaux soient incapables de « penser », les neurones qui s’y trouvent interagissent néanmoins de manière totalement fonctionnelle.
Il s’agit donc de cerveaux dit « primaires » qui permettront aux chercheurs d’étudier cet organe si complexe, et qui sait, peut-être également à déceler les premiers facteurs déclenchant certaines maladies neuronales, comme Alzheimer ou Parkinson par exemple. Ou encore, tenter de mieux comprendre la schizophrénie.
Une véritable culture de cerveaux humains, une opération pas si compliquée au final…
En fait, l’opération ne nécessite aucun prélèvement particulier. Un simple échantillon de peau collecté sur des donneurs, ainsi qu’un peu de liquide nutritif, suffisent à faire pousser ces cerveaux. Les échantillons sont placés dans des boites Pétri stérilisées, et sont ensuite arrosés d’un liquide nutritif capable de littéralement effacer la spécialisation des cellules. Les cellules ne sont donc plus des cellules de peau, mais de simples cellules souches. Ces dernières vont par la suite commencer à se multiplier et finiront par former une substance cellulaire. La substance cellulaire sera ensuite roulée en boule afin de forcer les cellules humaines à entrer en interaction, à s’organiser, et à reprendre le chemin d’une « spécialisation ».
La chercheuse prive ensuite ces nouvelles cellules de nourriture (ce qui élimine les plus faibles). Seules les cellules les plus résistantes, les cellules cérébrales, survivent à ce traitement. Ces dernières sont ensuite placées dans une gelée spéciale, afin de les pousser à se développer. Elles finiront par former un cerveau artificiel équivalent à celui d’un fœtus âgé de neuf semaines. Soit à un cerveau contenant environ deux millions de neurones.
« Ces cerveaux se développent de la même manière que ceux qui se développeraient chez un embryon », explique Lancaster. Cela est vrai, mais leur environnement reste cependant très différent : au lieu de se trouver dans le ventre de leur mère, ces cerveaux sans corps sont élevés dans des incubateurs géants. Comme ils ne sont pas approvisionnés en sang, ils reçoivent un fluide riche en nutriments pour les faire grandir (et survivre). Celui-ci est changé régulièrement. Tout ce qui entre en contact avec les cerveaux doit absolument être désinfecté auparavant avec de l’alcool.
Ces cerveaux, une fois cultivés, sont considérés comme des cerveaux « primaires », qui permettront aux chercheurs de comprendre la manière dont se développent nos cerveaux sur le plan biologique, à un stade avancé. Mais là n’est pas l’unique bénéfice ! Grâce à cette technique, les laboratoires pourraient effectivement arrêter les tests sur les animaux (et éventuellement uniquement prélever des échantillons de peau, sans causer de dommage).
Quels espoirs pour la suite ? Plusieurs groupes de chercheurs travaillent d’arrache-pied afin d’améliorer ces cerveaux. En effet, pour beaucoup de scientifiques, le but ultime serait que ceux-ci puissent sur le long terme fonctionner à 100% comme de vrais cerveaux, afin de permettre des études les concernant encore plus poussées.