Dans un e-mail envoyé à ses employés, Elon Musk les a avertis d’un risque « sérieux » de faillite auquel fait face actuellement l’entreprise SpaceX. Le retard de production sur les moteurs Raptor, destinés au lancement de la fusée Starship, est l’objet de cette inquiétude.
En effet, nous rappelons que SpaceX est actuellement en plein développement de sa nouvelle fusée Starship, au Texas. Celle-ci, qui devrait aussi être réutilisable, a pour but à plus ou moins long terme d’envoyer pour la première fois des humains sur Mars. Dans un premier temps, Elon Musk souhaitait faire arriver une mission sur la Lune. Un premier vol orbital devait aussi se faire début 2022.
Long de 120 mètres, l’engin doit être capable d’envoyer plus de 100 tonnes de charge utile dans l’espace. Des moteurs plus que solides sont donc requis pour faire décoller Starship. D’où le développement de Raptor, un moteur à combustion étagée de plus de 3 mètres de hauteur. Les essais sur ce fameux moteur ont débuté en 2019.
Autrement dit, que ce soit la Lune, Mars ou ailleurs, Starship n’ira nulle part sans ces fameux propulseurs. Dans un e-mail adressé à ses employés, tombé entre les mains de plusieurs médias américains, dont SpaceExplored, Elon Musk confiait sa forte inquiétude face à une « crise de la production » sur la ligne de création des moteurs Raptor.
Le directeur de SpaceX, dans ce message interne, enjoint même ses employés à rester travailler durant les fêtes pour sauver le navire. Il affirme que lui-même comptait prendre son « premier week-end de congé depuis longtemps », mais qu’il restera finalement sur la « ligne Raptor toute la nuit et tout le week-end ».
Le projet Starlink remis en cause ?
La raison de cette forte inquiétude n’est pas vraiment claire. Cependant, Elon Musk fait allusion au départ de membres de la direction. Il s’agit vraisemblablement des deux vice-présidents qui auraient quitté l’entreprise au mois de novembre, selon CNBC. Une chose est sûre : Elon Musk est inquiet quant au futur du projet Starlink 2, qui nécessite un lancement par le biais de la fameuse fusée. Projet nécessaire à l’équilibre financier de SpaceX, si l’on en croit ses propos. Il affirme ainsi qu’un risque sévère de faillite est en vue si la fusée n’atteint pas un rythme de deux vols par mois pour la fin de l’année prochaine.
Pour rappel, le projet Starlink, dont la première partie a déjà été lancée, a pour objectif de fournir un service d’Internet à haut débit partout sur la planète en déployant une « constellation » de satellites en orbite basse. Quelque 42 000 « mini » satellites, en tout, qui ne font d’ailleurs pas l’unanimité, tant pour des raisons de pollution lumineuse que pour les risques de collision accrus. Vous avez sans doute d’ailleurs vu par vous-mêmes le lancement de la première partie de ce projet : les « trains » lumineux, ces chapelets de points brillants que nous avons vu défiler dans le ciel…
Selon Elon Musk, cette première partie, Starlink V1, n’était pourtant pas la partie rentable, et le lancement de la seconde partie est pour lui critique pour l’avenir de son entreprise. L’une des raisons est que des bornes qui ne fonctionnent qu’avec ces satellites sont déjà en déploiement autour du monde… Interrogé sur Twitter au sujet de ses déboires, le dirigeant est laconique :
It’s getting fixed
— Elon Musk (@elonmusk) November 30, 2021
Sur le problème des moteurs, il affirme ainsi : « C’est en train d’être réglé ». Pourtant, il minimise aussi quelque peu le ton alarmiste utilisé dans l’e-mail en répondant à un article sur le sujet :
If a severe global recession were to dry up capital availability / liquidity while SpaceX was losing billions on Starlink & Starship, then bankruptcy, while still unlikely, is not impossible.
GM & Chrysler went BK last recession.
“Only the paranoid survive.” – Grove
— Elon Musk (@elonmusk) November 30, 2021
« Si une grave récession mondiale venait à tarir la
disponibilité du capital/la liquidité alors que SpaceX perdait des
milliards sur Starlink & Starship, alors la faillite, bien que
toujours improbable, n’est pas impossible. GM & Chrysler ont fait
faillite lors de la dernière récession.
‘Seuls les paranoïaques survivent.’ – Grove »
L’entreprise a tout de même été valorisée en octobre dernier à plus de 100 milliards de dollars… Il se peut donc qu’elle ait encore de la ressource.
Le texte du mail d’Elon Musk
Sur son site internet, le média SpaceExplored retranscrit le contenu du mail en question, que l’on pourrait traduire ainsi :
Malheureusement, la crise de la production de Raptor est bien pire qu’elle ne l’avait semblé il y a quelques semaines. Comme nous avons creusé les problèmes suite au départ de la haute direction précédente, ils se sont malheureusement avérés beaucoup plus graves que ce qui avait été rapporté. Il n’y a aucun moyen d’édulcorer cela.
J’allais prendre ce week-end de congé, comme mon premier week-end de congé depuis longtemps, mais à la place, je serai sur la ligne Raptor toute la nuit et tout le week-end. À moins que vous n’ayez des problèmes familiaux critiques ou que vous ne puissiez physiquement retourner à Hawthorne, nous aurons besoin de toutes les mains sur le pont pour nous remettre de ce qui est, franchement, un désastre.
Les conséquences pour SpaceX si nous ne pouvons pas fabriquer suffisamment de Raptors fiables, c’est que nous ne pouvons alors pas piloter Starship, ce qui signifie que nous ne pouvons alors pas piloter Starlink Satellite V2 (Falcon n’a ni le volume ni la masse en orbite nécessaires pour le satellite V2). Le satellite V1, en lui-même, est financièrement faible, tandis que V2 est fort. De plus, nous déployons la production de terminaux à plusieurs millions d’unités par an, ce qui consommera des capitaux massifs, en supposant que le satellite V2 sera en orbite pour répondre à la demande de bande passante. Ces bornes seront inutiles sinon.
En résumé, nous sommes confrontés à un véritable risque de faillite si nous ne pouvons pas atteindre un taux de vol Starship d’au moins une fois toutes les deux semaines l’année prochaine.
Merci,
Elon