Depuis la déclaration de déploiement armé du président Vladimir Poutine, il y a quelques jours, tous les regards sont tournés vers l’Ukraine. Les Nations Unies s’accordent pour affirmer que cette crise est l’une des plus importantes de l’histoire de l’Europe, depuis les grandes guerres. En soutien à l’Ukraine, l’ONU et ses États membres ont alors assuré infliger les plus lourdes sanctions possibles pour la Russie : une isolation sans précédent, dans l’espoir d’entraver son économie et son système d’information. D’un autre côté, Elon Musk a répondu à un appel à l’aide (ou plutôt réagi au quart de tour) en répondant au tweet du Premier ministre ukrainien. La critique de ce dernier a fait s’engager le célèbre milliardaire à aider l’Ukraine, en y déployant des terminaux Starlink. L’initiative part sûrement d’une bonne intention, mais soulève quand même beaucoup de questions et d’inquiétudes.
Rappelons que le projet Starlink de SpaceX, qui développe des terminaux satellites à la pointe de la technologie, a pour objectif de répondre à la demande croissante de connexion internet mondiale. Il projette surtout de desservir les zones les plus enclavées à l’aide de 42 000 mini-satellites en orbite, à terme. Placés en orbite basse, les dispositifs du projet assurent un plus haut débit grâce à un temps de latence réduit, comparé aux appareils de connexion satellite actuels (25-35 ms contre 600 millisecondes).
D’un autre côté, SpaceX concentre également beaucoup d’efforts dans son projet de conquête spatiale, pour envoyer les premiers humains sur Mars. Engageant des dépenses de plusieurs milliards de dollars, le programme suscite beaucoup de critiques, car jugé non urgent, alors que des besoins vitaux sont encore loin d’être satisfaits sur notre propre planète.
Le Premier ministre ukrainien, Mykhailo Fedorov, a alors identifié le PDG de SpaceX dans un tweet : « Pendant que vous essayez de coloniser Mars, la Russie essaye d’occuper l’Ukraine ! ». Conscient de l’influence du milliardaire, tout en désirant peut-être titiller son égo, « si vos fusées atterrissent avec succès depuis l’espace, des fusées russes attaquent des civils ukrainiens ! Nous vous demandons de fournir à l’Ukraine des stations Starlink et d’inviter les Russes sains d’esprit à se lever », ajouta-t-il.
Dans un effort de solidarité pour l’Ukraine, où l’on y déplore déjà plusieurs centaines de victimes, la réponse de Musk fut aussi immédiate qu’inattendue : « Le service Starlink est maintenant actif en Ukraine. Plus de terminaux sont en route ». Promesse tenue : des terminaux Starlink sont désormais en orbite au-dessus de l’Ukraine, fournissant une connexion internet sécurisée et indispensable.
D’après le rapport, des coupures de connexion sont déjà survenues plusieurs fois en Ukraine, parallèlement à la progression des soldats russes, probablement à cause des bombardements. De plus, Poutine déploie aussi des pirates informatiques, en plus des troupes armées. L’intervention de Musk pourrait alors considérablement aider du côté ukrainien.
Bonne ou mauvaise idée ?
Malgré l’effort, Elon Musk subit tout de même quelques critiques. Certains experts s’inquiètent de sa réelle « capacité à aider », vu ses erreurs passées. Et en effet, les terminaux Starlink auront encore besoin de relais terrestres (câbles, routeurs, paraboles, …) pour fonctionner. De nombreuses installations sont donc encore à mettre en place avant que le service soit vraiment actif. Et au milieu d’un conflit, comment les Ukrainiens pourraient-ils assurer ces installations ? Cela pourrait même faire prendre plus de risques aux soldats ou aux civils.
À noter aussi que Starlink a déjà été maintes fois critiqué, surtout après la récente tempête géomagnétique que les satellites ont subi et qui a généré des milliers de débris. Ces derniers sont un véritable danger pour les astronautes et pour les civils, en rentrant dans l’atmosphère. En janvier dernier par exemple, des observateurs ont cru apercevoir une météorite, tentant de traverser l’atmosphère au-dessus du Maroc, de l’Espagne et près de la France. Mais il s’agissait en fait d’un satellite Starlink.
D’autres questions méritent aussi d’être soulevées : Musk fournira-t-il ce service gratuitement à l’Ukraine (il faut normalement compter 499 € rien que pour le kit d’installation, sans compter les frais logistiques) ? Et, alors que Joe Biden cherche à entraver au maximum l’exportation de technologies en Russie, les équipements Starlink ne pourraient-ils pas tomber entre leurs mains en atteignant l’Ukraine ? Même si SpaceX garantit la sécurité des dispositifs, sont-ils vraiment infaillibles et inexploitables pour les hackers russes ?