Il y a quatre ans, une équipe d’astrophysiciens, au moyen d’observations effectuées avec le spectromètre HARPS, détectaient ce qui semblait être une planète orbitant l’étoile la plus proche de notre soleil, Proxima Centauri. Malgré la robustesse des données acquises, l’existence de la planète n’était pas totalement confirmée. C’est aujourd’hui chose faite grâce à de récentes observations menées avec le spectrographe ESPRESSO du VLT. Les données ont en effet confirmé la présence de Proxima b, une exoplanète de taille similaire à la Terre orbitant Proxima Centauri.
L’existence d’une planète de la taille de la Terre autour de l’étoile la plus proche du Soleil, Proxima Centauri, a été confirmée par une équipe internationale d’astrophysiciens comprenant des chercheurs de l’Université de Genève (UNIGE). Les résultats, publiés dans la revue Astronomy & Astrophysics, révèlent que la planète en question, Proxima b, a une masse de 1.17 masse terrestre et est située dans la zone habitable de son étoile, qu’elle orbite en 11.2 jours.
Cette confirmation a été possible grâce à des mesures de vitesse radiale d’une précision sans précédent à l’aide d’ESPRESSO, le spectrographe de fabrication suisse, le plus précis actuellement en service, installé sur le Very Large Telescope au Chili. Proxima b a été détectée pour la première fois il y a quatre ans au moyen d’un spectrographe plus ancien, HARPS, également développé par l’équipe basée à Genève, qui mesurait une faible perturbation de la vitesse de l’étoile, suggérant la présence d’une planète.
Des mesures hautement précises réalisées grâce à ESPRESSO
Le spectrographe ESPRESSO a effectué des mesures de vitesse radiale sur l’étoile Proxima Centauri, à seulement 4.2 années-lumière du Soleil, avec une précision de 30 centimètres par seconde (cm/s), environ trois fois plus de précision que celle obtenue avec HARPS, le même type d’instrument mais de la génération précédente.
« Nous étions déjà très satisfaits de la performance de HARPS, qui a été responsable de la découverte de centaines d’exoplanètes au cours des 17 dernières années. Nous sommes vraiment ravis qu’ESPRESSO puisse produire des mesures encore meilleures, et c’est gratifiant et une récompense pour le travail d’équipe qui a duré près de 10 ans », déclare Francesco Pepe, professeur au Département d’astronomie de la Faculté des sciences de l’UNIGE et responsable d’ESPRESSO.
Alejandro Suarez Mascareño, principal auteur de l’article, explique : « Confirmer l’existence de Proxima b était une tâche importante, et c’est l’une des planètes les plus intéressantes connues dans notre voisinage ». Les mesures effectuées par ESPRESSO ont précisé que la masse minimale de Proxima b est de 1.17 masse terrestre (l’estimation précédente était de 1.3) et qu’elle orbite autour de son étoile en seulement 11.2 jours. ESPRESSO a permis de mesurer la masse de la planète avec une précision supérieure à un dixième de la masse de la Terre.
Vers une étude future des conditions régnant à la surface de Proxima b
Bien que Proxima b soit environ 20 fois plus proche de son étoile que la Terre du Soleil, elle reçoit une énergie comparable, de sorte que sa température de surface pourrait signifier que l’eau (s’il y en a) est sous forme liquide par endroits et pourrait donc potentiellement abriter la vie. Cela dit, bien que Proxima b soit une candidate idéale pour la recherche sur les biomarqueurs, il reste encore beaucoup à faire avant de pouvoir suggérer que la vie a pu se développer à sa surface. En fait, l’étoile hôte est une naine rouge active qui bombarde sa planète de rayons X, qui en reçoit environ 400 fois plus que la Terre.
« Y a-t-il une atmosphère qui protège la planète de ces rayons mortels ? Et si cette atmosphère existe, contient-elle les éléments chimiques qui favorisent le développement de la vie (oxygène par exemple) ? Depuis combien de temps ces conditions favorables existent-elles ? Nous allons aborder toutes ces questions, notamment avec l’aide d’instruments futurs comme le spectromètre RISTRETTO, que nous allons construire spécialement pour détecter la lumière émise par Proxima b, et HIRES, qui sera installé sur le futur télescope géant ELT de 39 m que l’Observatoire Européen Austral (ESO) construit au Chili », explique Christophe Lovis, chercheur au Département d’astronomie de l’UNIGE.
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Une seconde planète autour de Proxima Centauri ?
En attendant, la précision des mesures effectuées par ESPRESSO pourrait amener une autre surprise. L’équipe a trouvé des preuves d’un deuxième signal dans les données, sans pouvoir en établir la source définitive. « Si le signal était d’origine planétaire, cette autre planète potentielle accompagnant Proxima b aurait une masse inférieure à un tiers de la masse de la Terre. Ce serait alors la plus petite planète jamais mesurée à l’aide de la méthode de la vitesse radiale », explique le professeur Pepe .
Il est à noter qu’ESPRESSO, qui est devenu opérationnel en 2017, en est à ses balbutiements et ces premiers résultats ouvrent déjà des opportunités inespérées. La route a été parcourue à un rythme effréné depuis la découverte de la première planète extrasolaire par Michel Mayor et Didier Queloz, tous deux du Département d’astronomie de l’UNIGE. En 1995, la planète géante gazeuse 51Peg b a été détectée à l’aide du spectrographe ELODIE avec une précision de 10 mètres par seconde (m/s). Aujourd’hui ESPRESSO, avec ses 30 cm/s (et bientôt 10 après les derniers réglages) permettra peut-être d’explorer des mondes qui nous rappellent la Terre.