Une récente étude révèle que des préjugés inconscients peuvent significativement désavantager les personnes évaluées tardivement dans une séquence donnée. Autrement dit, que ce soit un candidat lors d’un entretien d’embauche ou pour une émission de téléréalité, plus ce dernier est évalué tardivement, plus il est jugé négativement. Des chercheurs de l’Université de Chicago et de l’Université de la Ruhr à Bochum ont étudié de près cette différenciation de la perception sociale afin d’essayer d’en déterminer la cause.
Lors d’un entretien d’embauche ou d’une audition, les personnes les plus talentueuses (et qui le démontrent) et qui ont de l’expérience sont celles qui ont forcément plus de chances d’être retenues. C’est ce que nombre d’entre vous pensent et pourtant, ce n’est pas toujours le cas.
Alex Koch et Andrew Bromley, tous deux de l’Université de Chicago, ainsi que Johanna Woitzel et Hans Alves, membres du département de psychologie de l’Université de la Ruhr à Bochum (en Allemagne), viennent de réaliser ensemble une étude sur la différenciation de la perception sociale. Publiée dans The journal of Personality and Social Psychology, elle révèle que les personnes, même compétentes, peuvent être désavantagées lorsqu’elles se présentent en dernier. En effet, elles sont souvent décrites de manière négative à cause de préjugés inconscients. Les préjugés en question seraient le fruit d’effets sériels et d’effets de récence négatifs.
«L’effet de position en série» au centre de l’attention
Dans leur document d’étude, les chercheurs indiquent avoir identifié la source du problème. Il s’agit d’un mécanisme que les chercheurs ont baptisé « l’effet de position en série ». C’est un phénomène cognitif où le rappel des éléments présents dans une liste est influencé par leur position. Ainsi, des effets de primauté et de récence se créent et les éléments – même des personnes – se trouvant au début d’une liste bénéficient d’un jugement positif contrairement à ceux qui sont placés à la fin.
L’effet de position en série se caractérise principalement par des effets de primauté et de récence suivant une courbe en forme de U. Cependant, la présente étude s’est penchée sur l’effet de récence. Les chercheurs ont d’ailleurs émis une hypothèse stipulant que lorsqu’un individu rencontre une personne de manière séquentielle, il a tendance à se concentrer sur des attributs distincts. Ces attributs différencient chaque nouvelle personne de celles précédemment rencontrées et sont, la plupart du temps, négatifs.
Pour tester cette hypothèse, les scientifiques ont réalisé diverses expériences. Dans l’une d’entre elles, 992 participants se sont basés sur une simple photo de profil Facebook pour décrire 20 personnes. Les premiers individus ont été décrits de manière positive par les participants, mais au fur et à mesure que la séquence progressait, leur description est passée de 6,2 mots à connotation positive à seulement 4,7.
Une autre expérience est venue soutenir ce phénomène. Pour cette dernière, 987 femmes et hommes (50 %/50 %) ont été sélectionnés. Tous les participants ont visionné de courts clips vidéo montrant des femmes qui se présentaient à l’émission The Bachelor. Le résultat est le suivant : les femmes qui sont apparues en premier ont été jugées comme accrocheuses et créatives. Cependant, au fur et à mesure des séquences vidéo, les participants ont décrit les femmes de manière négative, et ce malgré le fait que l’ordre des vidéos était aléatoire. Durant cette expérience, les chercheurs ont également conclu que les descriptions effectuées par les participants étaient de plus en plus précises.
Ces jugements hâtifs vont-ils perdurer ?
Est-ce possible d’atténuer ces préjugés négatifs ? Combien de temps perdurent-ils ? Ce sont des questions auxquels les chercheurs de l’étude tentent encore de répondre. D’ailleurs, ils envisagent de réaliser de nouvelles recherches à ce sujet avec l’ambition de mettre un frein aux jugements hâtifs lors des entretiens d’embauche et des évaluations de performance.